Réfugiée chez ses voisins depuis maintenant plusieurs jours, Mylène* respecte quotidiennement le même rituel : une fois le soleil levé, elle revient passer plusieurs heures chez elle pour y aérer les pièces. Une routine indispensable car avec les émeutes, ses poubelles ont élu domicile à l'intérieur.
"On les a rentrées pour éviter que le feu n'y soit mis", explique cette habitante du nord de Nouméa. Faute d'éboueur en service ou de déchetterie ouverte, les ordures s'accumulent. Et si l'odeur reste supportable pour le moment, les désagréments commencent tout de même à poindre.
Ça attire les bêtes, les petits insectes. On a songé à incinérer les déchets, mais j'aurais peur de créer une certaine angoisse dans mon quartier, où tout le monde est déjà à l'affût du moindre feu.
Mylène
Mutualiser les déchets ?
Mêmes causes, mêmes conséquences du côté de Dumbéa, où certains planchent sur d'autres pistes pour éliminer les déchets. "On en parle avec le voisinage. On se dit qu'on pourrait prendre une grosse remorque ou une benne de camion pour les amener quelque part", indique Ilan*.
"Pour l'instant, on arrive à les tenir chez nous mais il y a des familles nombreuses, ça va commencer à devenir compliqué et poser un vrai problème d'hygiène", s'inquiète ce riverain d'un quartier proche de la mer.
Une appréhension ressentie également par bien d'autres. La problématique prend une dimension plus importante encore dans les établissements hébergeant du public, où le nombre de résidents participe à faire gonfler très rapidement les amoncellements de sacs noirs.
Sur les réseaux sociaux, certains internautes échangent des conseils pour réduire leurs déchets. On partage ici et là des photos de tas d'ordures, entreposés au soleil et chaque jour un peu plus gros. On s'interroge aussi sur les dépotoirs et les centres de tri ouverts.
Aucune visibilité
L'attente risque hélas de se prolonger, y compris à Nouméa où les tensions semblent pourtant légèrement diminuer. De fait, la mairie souhaite préserver son dispositif de camions-poubelles basé dans le quartier de Ducos, dont les forces de l'ordre n'ont pas encore totalement repris le contrôle.
"Tant que les accès ne seront pas sécurisés, les gens ne reprendront pas les camions. Il faut être très vigilant, et nous devrons mettre les bouchées doubles une fois l'ordre rétabli", explique un membre de l'équipe municipale.
La situation semble encore plus incertaine dans la commune de Païta, littéralement dévastée par la vague de violences initiée lundi soir. "Il n'y aura pas de ramassage des ordures dans les quelques jours à venir et on demande à la population de les garder à la maison le plus possible", rappelle Maryline D'Arcangelo, maire par interim depuis le départ de Willy Gatuhau. Et de conclure, un poil désemparée : "On ne s'imagine pas tout ce que les violences actuelles peuvent entraîner".
*Prénoms d'emprunt
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