La chimie verte est l’un des défis de la planète. La demande en nickel pour les batteries des voitures électriques devrait atteindre 300 000 tonnes de poudres métalliques en 2022.
Le procédé par bio-extraction du nickel et du cobalt que teste le BRGM permettrait de compléter l’offre métallurgique du Territoire par l’installation d’unités de production à faibles coûts, sans gros investissements, ni besoins énergétiques élevés. Les minerais utilisés sont abondants. Il s’agit des résidus des grandes mines calédoniennes.
Le projet est financé par La France et l’Union européenne. Il a reçu le soutien de la direction de l’Industrie, mines et énergies (DIMENC) de la Nouvelle-Calédonie qui a envoyé 500 kilos de minerais de Thio et de Tiebaghi à l’équipe du BRGM.
Après plusieurs années de recherche intensive en laboratoire à Orléans, le projet avance. Il est déjà utilisé depuis des décennies pour extraire l’or et le cuivre. Mais chaque métal à sa propre complexité. Le cobalt calédonien est relativement facile à extraire mais le nickel est plus complexe. C'est pour cette raison qu'on l'appelle depuis toujours "le métal du diable".
Le projet novateur du BRGM consiste donc à utiliser des bactéries naturelles pour récupérer le cobalt et le nickel dans une petite usine pilote. Des cuves, du minerai, de l’eau, des bactéries liquides, un lent brassage : 48 heures plus tard, les métaux ont été séparés et extraits dans le laboratoire d'Orléans.
L’étude est menée par Anne-Gwenaëlle Guezennec, chef de projet au BRGM. Les bactéries naturelles se trouvent dans des milieux extrêmes comme les geysers d'eau chaude du parc naturel de Yellostone, "mais il y en a sans doute aussi en Nouvelle-Calédonie" explique la chercheuse. Ces bactéries aiment les environnements chauds et acides des métaux, et il en faut de petites quantités. "Ces micro-organismes aiment particulièrement les minerais calédoniens sur lesquels nous les avons testés, le processus biologique permet de réduire le fer et de concentrer, d'isoler le nickel et le cobalt."
Ces bactéries naturelles venant des sources d'eau chaude remplacent les réactifs chimiques et elles peuvent isoler les métaux à des températures relativement basses, à partir de 35 degrés. On est très loin des températures nécessaires à la production métallurgique traditionnelle, grande consommatrice d’énergie. "Ces bactéries produisent l’équivalent des réactifs chimiques, elles séparent les minerais à l’état liquide pour isoler le nickel et le cobalt. Lors des essais en laboratoire à partir de minerais calédoniens, elles ont montré qu'elles pouvaient extraire pratiquement 100% du cobalt et jusqu'à 80% du nickel."
Il faudra encore plusieurs années pour aboutir à un procédé industriel qui permette d'atteindre de bons rendements. C'est tout l'enjeu de la recherche du BRGM sur les minerais calédoniens. Les bactéries naturelles, contenues dans des sources d’eau chaude, permettront un jour d’extraire les deux métaux à partir des résidus miniers. Le procédé sera sans doute rentable, et d’autant plus si les cours du nickel et du cobalt poursuivent leur rallye haussier, et surtout il est bon pour la planète.
"L’idée serait de récupérer les grandes quantités de cobalt et de nickel restant sur les mines en Nouvelle-Calédonie, de les traiter dans des cuves ou des bassins en utilisant des micro-organismes, des bactéries" conclut Anne-Gwenaëlle Guezennec.
Pour le BRGM, la France et l'Union européenne, il s'agit donc d'arriver à produire, d’abord en Nouvelle-Calédonie, et plus tard en Afrique, des métaux encore plus propres et respectueux de l'environnement. Cette révolution verte serait une véritable opportunité pour l’industrie mondiale du nickel et du cobalt.