Entre 1996 et 1998, le "préalable minier" s'invitait dans le débat politique

La mobilisation du collectif « Usine du Sud = Usine Pays » rappelle une autre mobilisation, en faveur de l’usine du Nord cette fois, à la fin des années 90. Les indépendantistes avaient posé un « préalable minier » avant la reprise des discussions politiques. Retour sur une période tendue. 
Tout avait commencé en avril 1996, lors du comité de suivi des Accords de Matignon. Le FLNKS introduit alors un « préalable minier » à toute continuation des discussions. Le nickel devient alors un enjeu.
Il s’agit pour la SMSP, afin d'alimenter la future usine du Nord, d’obtenir le massif minier de Tiébaghi, alors propriété de la Société Le Nickel, filiale d'Eramet, qui refuse de céder cette concession.
 

Barrages et blocages 

À la fin d'octobre 1996, le FLNKS décide de bloquer les sites miniers du Nord, et est relayé dans son action par l'USTKE et le SOENC. En clair, pas de solution politique, pas de paix en Nouvelle-Calédonie, sans accès pour la SMSP à la ressource du nickel.
Pendant près de deux ans, les négociations avec l'Etat sont suspendues, barrages routiers et blocages de sites miniers se succèdent. Les indépendantistes font monter la pression. Le mot d'ordre provoque une paralysie quasi totale des sites, les centres miniers ne fonctionnent plus.
Le FLNKS reste sur ses positions. la cession de Tiébaghi demeure un préalable à la reprise des négociations sur l'avenir de la Nouvelle-Calédonie.
Un barrage durant le préalable minier
 

L’accord de Bercy

Malgré les fortes pressions du gouvernement, Yves Rambaud, le PDG d'Eramet, s'oppose à cette cession au nom des intérêts à long terme de son groupe. Mais Le FLNKS espère obtenir rapidement un engagement de l’Etat.
Enfin, en février 1998, après d'âpres négociations qui s'achèvent une nuit dans les couloirs de Bercy, un accord voit le jour : la SLN, acculée par l'Etat, laisse le gisement de Koniambo à la SMSP – société minière vendue auparavant par Jacques Lafleur aux indépendantistes. A une condition : la mise en valeur du minerai doit se faire en Nouvelle-Calédonie. Cet accord de Bercy ouvre la voie à un rééquilibrage économique de l'île avec la construction potentielle d'une usine de traitement de nickel dans la province Nord, contrôlée par les indépendantistes.
Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie et des finances, signe l'accord de Bercy en 1998
 

Vers l’Accord de Nouméa

A Nouméa, sur le terrain, la nouvelle de la signature de ce protocole a été plutôt bien accueillie. Les barrages routiers sont levés. Selon les responsables indépendantistes cette signature permet « d'envisager avec sérénité les discussions sur l'avenir institutionnel et politique » de la Nouvelle-Calédonie.
Ce n'est qu'une fois ce marché conclu, que les discussions tripartites reprennent à Paris, puis à Nouméa à partir de la fin février, pour s’achever avec l’Accord de Nouméa le 5 mai 1998.
Le récit de Laurence Pourtau