Lors de son installation sur le Caillou en 2022, Bruno Dalles cumule les premières fois. Premier poste en Outre-mer et première nomination en qualité de procureur général près la Cour d’appel. Un nouveau défi pour le magistrat dont la carrière est jusque-là marquée par un travail contre la criminalité financière. Ancien juge d’instruction et procureur, il avait pris la tête de Tracfin entre 2015 et 2019, le service de renseignement français chargé de la lutte contre le blanchiment d’argent, le financement du terrorisme et la fraude fiscale et douanière.
“La justice a tenu et a répondu”
En Nouvelle-Calédonie, outre les avancées dans la création d’une unité médico-légale au Médipole ou dans la lutte contre le trafic de stupéfiants, le nom du magistrat est surtout associé à la demande de dépaysement du dossier judiciaire visant des militants de la CCAT, soupçonnés d’avoir orchestré les émeutes déclenchées en mai 2024. Une requête à laquelle il s’était opposé.
Entre temps, la chambre criminelle de la cour de cassation en a décidé autrement. Mais cela n'empêche pas Bruno Dalles, aujourd'hui au terme de sa mission sur le Caillou, d'avoir le "sentiment du devoir accompli”. Et de poursuivre, “la justice a participé au rétablissement de l’ordre, et comme j'aime à le dire, de l’ordre juste et pas juste de l’ordre.”
Des détenus de tous profils transférés en métropole
Un avis que ne partage pas la Cellule de coordination des actions de terrain (CCAT) qui continue d’exiger “la libération et le retour immédiat” de ses militants incarcérés en métropole. Militants qu'elle considère être des "prisonniers politiques". Mais Bruno Dalles revient sur le sens de cette détention provisoire dans l'Hexagone, [ce transfert en métropole a eu lieu] “dès la fin de leur garde à vue parce que les conditions de sécurité du camp Est n’étaient pas assurées. Aussi, parce qu’il y avait un risque, à la suite des mutineries, plus de cent places avaient été détruites. Et c’est pour cela que ce transfert a été réalisé.”
Et d'ajouter “ce qu’on ne dit pas c’est qu’ils n’ont pas été les premiers détenus provisoires, présumés innocents, à être transférés en métropole. Les premiers sont des personnes d’origine autre que mélanésienne, qui étaient les auteurs présumés de meurtres de jeunes mélanésiens. Ils ont eux aussi été mis en examen et envoyés dans des prisons en métropole.”
Une justice impartiale ?
Reste que la plus haute juridiction française a décidé que l’instruction du dossier se ferait loin du territoire calédonien. Une petite victoire pour les avocats des militants indépendantistes poursuivis par la justice. Eux qui formulaient des accusations de partialité de la justice nouméenne, dénonçant le “parti pris du ministère public au mépris de la présomption d’innocence”. Mais pour Bruno Dalles, “l’impartialité c’est la valeur cardinale du fonctionnement de la justice. Ceux qui regardent la justice considèrent peut-être qu’elle n’est pas impartiale parce que eux-mêmes ont des partis pris. Mais pour le juge, impartialité rime avec neutralité. Quelles que soient les pensées de ce juge, celles du fonctionnaire et du greffier, il doit appliquer la loi, toute la loi et rien que la loi.”
Bruno Dalles quittera la Nouvelle-Calédonie pour Monaco où il prendra la tête de l’Autorité monégasque de sécurité financière. Une autorité administrative, créée il y a un an, afin de lutter contre le blanchiment de capitaux.