Il y a près de sept décennies, les eaux du détroit de l’Ironbottom étaient le théâtre de violents affrontements entre les forces alliées et l’armée impériale japonaise. Aujourd’hui, le cadre n’a pas changé, mais les luttes sont bien plus pacifiques, au large de Honiara, entre les planches à voile. Pourtant, c’est tout de même un ancien temps qui refait surface.
À l’arrivée, les barbes des Cagous sont argentées par le temps qui passe, mais le savoir-faire reste. Sur des planches à dérive comme la Windsurfer, ils sont les meilleures et ont remporté, pour l’instant, toutes les régates possibles. Laurent Cali en catégorie lourd et Sam Launay en léger, sur les eaux salomonaises, juste devant l’embouchure d’Aligator creek. "C’est exceptionnel de revivre des Jeux du Pacifique à nos âges, reconnaît Sam Launay, médaillé d’or en 1999 à Guam puis à Fidji quatre ans plus tard. Mais tout cela est aussi très naturel puisque, dès le début de la préparation, on a retrouvé toute la bande qui naviguait avec nous quand on était plus jeunes."
« Arrête tes blagues Michel ! »
Notamment Laurent Cali, un des noms de l’âge d’or de la planche calédonienne. Celle de Michel Quintin et des Jeux de 1995 à Tahiti. Laurent avait alors fini sur la troisième marche du podium derrière notamment Michel Quintin. Et justement, quand le désormais directeur du CTOS apprend que la Windsurfer va faire son retour, il contacte les anciens. "Quand Michel Quintin nous a envoyé les premiers mails pour nous informer du choix du support, on n'y a pas cru et on n'a même pas répondu, raconte Laurent Cali. Mais quand on a compris que ce n’était pas des blagues, on a basculé tout de suite vers la préparation. On est des compétiteurs."
Retour à la mode
La planche utilisée aux Jeux cette année est donc une antiquité, mais la nostalgie des hommes a fait son office. "La Windsurfeur, c’est un support qui s’est arrêté à Fidji en 2003, explique Laurent Cali. Je pense que c’était parce que la Calédonie remportait toutes les médailles d’or. Mais c’est un support qui explose dans le monde. C’est un retour aux sources, pas de course à l’armement. C’est le bonhomme qui fait la différence." Et tout cela pour un coût bien moindre qu’une planche foil, "quatre fois moins cher".
Néanmoins, "c’est un support qui aujourd’hui est totalement 'has been', pose Sam Launay. Ce n’est même pas particulièrement agréable de naviguer dans de bonnes conditions. Mais la force de cette planche, c’est sa simplicité d’utilisation. Dans des conditions un peu déventées, avec des variations, tout reste facile pour tout le monde."
Le temps passe
Trente ans après pour Laurent Cali, vingt ans pour Sam Launay, les deux voileux retrouvent donc les Cagous. Avec un plaisir non dissimulé. "Le coup de boost, c’est d’aller voir les autres Cagous dans d’autres disciplines, explique Laurent. On se nourrit de cette énergie. Ça, c’est quelque chose qui reste au fil du temps aux Jeux."
Malgré tout, le temps a fait son effet, selon Sam. "On ne perçoit pas les choses de la même manière à 40 ans et à 17 ans, constate celui qui avait également été l'encadrant des équipes de voile en 2011 et 2015. J’ai des choses qui me plaisent aujourd’hui que je ne mesurais pas avant. Et inversement, des choses que j’aimais avant et qui me plaisent moins. Je suis maintenant bien moins galvanisé par les discours. J’avoue que le tchap cagou fonctionne un peu moins (rires)."