Peut-on confondre des granulés orange hautement toxiques et du piment d’Espelette ? C'est ce qu'a voulu démontrer la défense de Monsieur T, mécanicien aéronautique de 60 ans jugé pour "administration volontaire de substance nocive avec préméditation". Une théorie à laquelle le tribunal n'a pas adhéré.
Les faits remontent au 5 octobre 2020, ce jour-là deux salariés d’Hélicocean sont pris de violents vomissements après avoir bu un café et doivent être hospitalisés. Les analyses montreront que du dichromate de potassium avait été versé dans la cafetière commune de l’entreprise.
En conflit avec son supérieur
Le dossier ouvert pour tentative d’assassinat avait été confié à un juge d’instruction qui a finalement décidé de renvoyer le mécanicien aujourd’hui à la retraite devant le tribunal correctionnel. "C’était une mauvaise blague, je croyais qu’il s’agissait de piment ou de sel. Je m’excuse auprès des victimes", s’est-il défendu. "Monsieur. T est un mécanicien à l’humour douteux, mais ce n’est pas un empoisonneur", a renchéri son avocat Maitre Frédéric De Greslan qui parle, lui, d’un simple accident domestique. Il a d'ailleurs versé au dossier des pots d’épices "sel au piment d’Espelette et piment fort" pour appuyer son propos.
Le mécanicien avait déjà fait par le passé des blagues à ses collègues, mais il était depuis plusieurs années en conflit avec son supérieur et il ne pouvait pas confondre des granulés avec une épice, a estimé pour sa part le parquet, qui a requis 14 mois de prison avec sursis probatoire.
Un aménagement de peine avec un bracelet électronique
Le tribunal a finalement condamné l'homme à 24 mois de prison dont 12 avec sursis. L’accusé bénéficiera d’un aménagement de peine sous forme de bracelet électronique. L’avocat de la défense Maitre De Greslan a regretté la décision du tribunal : "Nous n’avons pas été entendus. Monsieur T. est un brave homme qui a vraiment pensé faire une mauvaise blague. Il n’est pas plus coupable d’empoisonnement que la personne qui sert des champignons qui s’avèrent ensuite toxiques. C’est un accident domestique et il a énormément de regrets."
Satisfaction en revanche pour Maitre Thomas Gruet, avocat des parties civiles."Ce sont des faits extrêmement graves, il y a déjà eu des morts par empoisonnement au dichromate de potassium. Ce jour-là il y avait un vol vers l’île des Pins, le pilote n’a pas pris son café habituel car il était en retard. imaginez les conséquences s’il avait fait un malaise en vol."
Les réactions des avocats recueillies par Charlotte Mannevy et Christian Favennec :