Cela fait plusieurs décennies que les chocolatiers calédoniens bénéficient de mesures de protection. Cette fois, on ne parle que de Biscochoc, mais cela concerne sept autres sociétés : Socalait, Cabosse d'or, Chocolat Morand, Tonton Jules, Pause chocolat, Absolu chocolat et Choc'Aulotte. "Les petites structures ont l'habitude de se regrouper derrière un poids lourd pour porter la demande", explique Xavier Benoist, le président de la Fédération des industries de Nouvelle-Caledonie.
Avis défavorable
"Nous sommes régulièrement consultés, en tant qu'association de consommateurs, sur les demandes de régulation de marché, indique Philippe Lassauce, trésorier de l'UFC Que choisir. La Direction des affaires économiques (DAE) nous a questionnés sur le renouvellement demandé par les chocolatiers. Nous avons fourni un avis, basé sur un dossier qui comprend des élements qui ne sont pas confidentiels, et pas sur le dossier complet."
Un avis défavorable, qui ne semble s'intéresser qu'au seul cas de Biscochoc. "Dans un monde économique qui bouge aussi rapidement, prendre des décisions d'une durée de dix ans, c'est en dehors du temps. S'il elle est justifiée, la régulation pourrait se faire sur une période de trois à cinq ans, pour laisser le temps à une entreprise qui démarre. Dans le cas de Biscochoc, c'est une société qui est complètement mature, qui exporte, qui développe son activité au Vanuatu, qui investit à Nouville dans une nouvelle usine."
On est sur une logique de continuité qui n'a plus de sens économique pour une entreprise mature. L'association émet un avis très défavorable à un Xe renouvellement de la mesure de protection qui, en l'espèce, correspond à un déni des goûts et des choix des Calédoniens.
Extrait de l'avis de l'UFC Que choisir
"Cette entreprise a les armes nécessaires pour faire face à un marché concurrentiel, où on laisse au Calédonien le choix du chocolat qu'il a envie de consommer, ajoute Philippe Lassauce. Certains n'achèteront jamais cette marque, d'autres adorent."
Maintenir la compétitivité
La Finc s'est fendue d'une lettre pour répondre à l'avis de l'association de consommateurs. "L'UFC a visiblement manqué d'informations avant d'émettre son avis", estime son président. En effet, elle n'a pas eu accès aux 159 pages du dossier déposé à la DAE. Xavier Benoist rappelle que "les mesures de régulation de marché ne bénéficient pas à une seule entreprise, mais profitent à tous les acteurs de la filière. Il est inexact de considérer que les Calédoniens n'ont pas d'autre choix que de consommer du chocolat Biscochoc."
Il met en avant trois arguments :
- D'abord, parce que les mesures de prohibition à l’importation ne concernent que deux catégories de produits : les petites tablettes de chocolat (goûters de 14g mis dans le pain des enfants, tablettes de moins de 5g servies avec le café ou intégrées dans les pains au chocolat des boulangers) et les chocolats moulés creux vendus à Pâques.
- Ensuite, parce que trois industriels, cinq artisans chocolatiers et plusieurs chocolatiers-pâtissiers locaux proposent leurs collections tout au long de l'année (et à Pâques, à Noël et à Halloween).
- Enfin, parce que le volume de chocolat importé est supérieur à la production locale. Selon l'ISEE, en 2021, plus de 710 000 kg de chocolat (produit fini).
La Finc souhaite "corriger l'idée préconçue selon laquelle lorsqu'une entreprise industrielle atteint sa maturité, elle peut se passer de régulation de marché. Aujourd'hui, le marché mondial est organisé de telle manière que des entreprises qui délocalisent leur production peuvent le faire sur des territoires où les règles sont différentes, explique Xavier Benoist. Mais on ne peut pas demander aux entreprises calédoniennes de respecter des règles, des normes, de payer des cotisations sociales et l'impôt sur les sociétés, de suivre le code du travail, alors qu'on laisse importer des produits qui ne les respectent pas. Il faut rééquilibrer l'avantage concurrentiel au profit des entreprises calédoniennes, parce qu'elles sont désavantagées sur le marché mondial."
Ça n'est pas Biscochoc qui fait monter le prix du chocolat aujourd'hui. Certes, ses produits sont peut-être plus chers que l'équivalent dans l'Hexagone, mais les produits importés, qui n'ont pas de taxe à payer, sont encore plus onéreux.
Xavier Benoist, président de la Finc
C'est la direction des affaires économiques qui instruit la demande de la filière. Elle proposera une synthèse au gouvernement, qui prendra la décision d’accepter ou non de reconduire la régulation de marché.