“La France est toujours là” : Manuel Valls attendu de pied ferme samedi en Nouvelle-Calédonie

Interview de Nora Nonet et Nordine Bensmaïl d'Outre-mer la 1ère. ©nouvellecaledonie
Après des premières discussions bilatérales à Paris, le ministre des Outre-mer arrive le 22 février en Nouvelle-Calédonie avec une mission ardue. Manuel Valls devra rétablir le dialogue entre l'État et les forces politiques locales, dans un contexte extrêmement tendu. Il a accordé un entretien exclusif à la 1ère.

Huit jours pour faire avancer le dialogue, le compromis et la paix. Ce sont les ambitions de Manuel Valls, à quarante-huit heures de son arrivée en Nouvelle-Calédonie. Le ministre des Outre-mer l’a dit ce jeudi matin, lors d’un entretien exclusif accordé à la 1ère.

Le locataire de la rue Oudinot pose les deux axes majeurs de son déplacement. Premier enjeu : la poursuite du dialogue entre l’État, les indépendantistes et les non-indépendantistes sur l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie.


Maintenir la paix

Manuel Valls espère parvenir lors de sa venue, à "de véritables négociations avec l’ensemble des partenaires politiques qui siègent au Congrès". Son message, dit-il, est simple : "la France est toujours là”. “Nous avons soutenu l’économie, les entreprises, les collectivités de la Nouvelle-Calédonie".

L’ancien premier ministre, bon connaisseur du dossier calédonien, assure qu’il fera "un certain nombre de propositions" pour continuer dans ce sens et "construire une nouvelle économie pour ce territoire".

Autre "message" de cette visite : maintenir la paix. "Le sang a coulé il y a quelques mois." Il y a eu "des morts, des blessés, des fractures qui existent et qui sont de nouveau profondes dans la société calédonienne. Et pour en sortir, il faut le dialogue, trouver le compromis", rappelle Manuel Valls, qui espère "aboutir un accord politique".

Je pense que les positions sont conciliables, même si elles viennent de loin.

Manuel Valls


Trilatérales

Pour parvenir à cet accord, il n’y a pas d’autre voie que des trilatérales, selon le ministre. "Il faut que tout le monde se mette autour de la table", martèle-t-il. "Chacun est conscient de la gravité du moment. Il faut empêcher la violence de revenir."

Afin de rétablir ce dialogue entre les forces politiques et faire avancer les discussions, le ministre des Outre-mer veut mettre l’accent sur leurs convergences. "Il y en a !", assure-t-il. "Je pense que les positions sont conciliables, même si elles viennent de loin."


"Un discours de franchise"

Manuel Valls a aussi tenu à répondre à la polémique née à la suite de ses propos dans le Monde. Dans un article du 11 février, il rappelait que la trajectoire de l'Accord de Nouméa pouvait aller "d'une souveraineté partagée à une souveraineté pleine et entière". Les non-indépendantistes avaient vivement réagi, en menaçant la bonne tenue de cette visite ministérielle.

"Cette phrase n’est pas de moi. C’est pour ça que je ne comprends pas très bien ce débat. Elle est dans l’Accord de Nouméa. La souveraineté partagée, c’est ce qui existe, jusqu’à une souveraineté pleine. C’est dans l’Accord de Nouméa, qui est dans la Constitution française."

Manuel Valls ne s’en est pas caché, dit-il, lors des bilatérales avec les différents interlocuteurs à Paris. "Je leur ai tenu les mêmes mots, les mêmes discours." Le ministre prône un "discours de franchise". "La base, c’est l’Accord de Nouméa pour que chacun reprenne cette trajectoire pour achever le débat."

>> Nouvelle-Calédonie : les non-indépendantistes mobilisent massivement avant la venue de Manuel Valls


Un signe encourageant pour les indépendantistes

À l'inverse, les indépendantistes du Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS) voient dans ce déplacement un signe encourageant. La référence du ministre à l'Accord de Nouméa, qui a doté l'archipel d'un statut unique dans la République française reposant sur une autonomie progressive, a été "un premier élément de satisfaction", a estimé le député Emmanuel Tjibaou durant une conférence de presse à l'Assemblée nationale la semaine dernière.

"Le ministre d'État a posé certaines choses qui nous parlent", a renchéri Roch Wamytan, figure historique du camp indépendantiste. Mais le FLNKS n'envisage pas encore d'entrer dans une phase de négociations formelles. Emmanuel Tjibaou a expliqué que la délégation présente à Paris devait d'abord rendre compte au bureau politique du Front avant d'aller plus loin.


Les premières lignes du programme

À deux jours de la venue du ministre, le détail de ce déplacement n’est pas encore connu. Mais le locataire de la rue Oudinot en a dessiné une ébauche dans son entretien à la 1ère.

Lundi 24 février, il entamera une série de rencontres avec les élus (présidente du Congrès, président du gouvernement, présidente de la province Sud et maire de Nouméa), durant lesquelles il exposera le bilan des rencontres bilatérales à Paris et sa méthode de travail en Nouvelle-Calédonie.

Mardi 25 février, le ministre se rendra en province Nord. Puis les jours suivant, il tentera de "mettre sur la table une méthodologie" sur les sujets de fond que sont l’avenir institutionnel et le dossier économique. 


Un dialogue très fragile

Neuf mois après le déclenchement de la crise insurrectionnelle du 13 mai, le contexte reste explosif en Nouvelle-Calédonie. Tous les acteurs concèdent que les chances d'aboutir à un accord sont minces.

Mais Manuel Valls se dit "ni optimiste ni pessimiste". "Je suis conscient et lucide des difficultés, confie-t-il avant de rappeler son objectif final. Il faut trouver un accord, un compromis".