Les propos de Manuel Valls dans "Le Monde" menacent-ils sa visite en Nouvelle-Calédonie ?

Manuel Valls avait été à la tête d'une mission parlementaire sur la Nouvelle-Calédonie en 2017.
Dans un récent article du Monde, le ministre des Outre-mer affirme que l'Accord de Nouméa est une trajectoire "allant d'une souveraineté partagée à une souveraineté pleine et entière". Une "douche froide", pour le député non-indépendantiste Nicolas Metzdorf, qui pourrait avoir des répercussions sur la visite ministérielle fin février, si ces propos n’étaient "pas rectifiés".

"Respecter l’accord de Nouméa, c’est respecter le choix des Calédoniens". C’est le titre du communiqué diffusé ce vendredi par les Loyalistes et le Rassemblement. Les deux formations non-indépendantistes s’insurgent contre une déclaration de Manuel Valls, retranscrite dans le journal Le Monde du 11 février.

Pour le ministre des Outre-mer : "la trajectoire est celle d’une souveraineté partagée à une souveraineté pleine et entière, ce sont les accords". Faut-il comprendre que la Nouvelle-Calédonie sera, à terme, indépendante ?

Différences d'interprétation

Comme souvent dans le cas d’une parole politique, la réponse dépend de l’interprétation que l’on en fait. Le ministre des Outre-mer expose les possibilités offertes par l’Accord de Nouméa : une Calédonie française avec sa large autonomie, sa souveraineté partagée avec la France, ce que le territoire vit déjà avec ses larges compétences. Ou bien une Calédonie indépendante, hors de la France. Sans oublier aussi les autres hypothèses qui pourraient être envisagées entre ces deux options.

Ce que dénoncent le Rassemblement et les Loyalistes, c’est le fait qu’un représentant de l’Etat,  ministre de surcroît, acte, en la mentionnant publiquement, la possibilité d’une souveraineté pleine et entière en dépit des "non" aux trois référendums.


Préparer un compromis

Est-ce à dire qu’il affirme sa préférence ? A priori non. Dans le même article du Monde, Manuel Valls précise qu’il s’agit de préparer un compromis qu’il souhaite définitif et qu’il a proposé aux élus : "une souveraineté avec la France", "la démocratie face à la violence" et "la citoyenneté calédonienne".

Pour rappel, également, dans son livre intitulé Pas une goutte de sang français, paru en 2021, l’actuel ministre des Outre-mer écrivait alors sans ambiguïté : "je ne souhaite pas l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie".

La méthode Rocard

Pour autant, Loyalistes et Rassemblement veulent un positionnement clair. Sur le réseau social X, Nicolas Metzdorf livre son sentiment : "si ces propos ne sont pas rectifiés, le prochain voyage du ministre à Nouméa risque de tourner court", prédit le député calédonien.

Manuel Valls, partisan de la "méthode Rocard", qui a porté ses fruits en 1988 pour sortir la Nouvelle-Calédonie de l’impasse, chercherait ainsi à poser les bases d’un processus similaire. Chacun expose ses positions antagonistes pour ensuite travailler à un compromis. Ce qui impliquerait, pour chaque camp, une part de renoncement à son idéal.

Dans le contexte actuel de radicalisation des positions et d’improbables trilatérales, pas sûr que le compromis trouve beaucoup d’espace.