C'était le monde d'avant, juste après la seconde guerre mondiale, en 1948. L’usine de Larymna, nichée au fond d’un bras de mer dans l’une des régions les plus pauvres de Grèce, avait pu bénéficier de l’expertise d’experts calédoniens de la SLN, pour sa reconstruction et pour l’exploitation minière. Le site industriel avait été détruit par l'armée allemande pensant sa retraite. Sur place, dans les bureaux de la direction, se trouvaient encore de vieux ouvrages de géologie portant le tampon "SLN-Nouméa". Les deux entreprise avaient été liées jusqu'en 1968. L'aventure du ferronickel grec est terminée.
Récemment, un concert de solidarité a rassemblé plus de 450 mineurs et métallurgistes, leurs familles, des syndicalistes de la région et d'autres sympathisants. Le centre industriel, aujourd'hui silencieux, se trouve à environ deux heures de route au nord d'Athènes.
Le gouvernement grec essaie encore de favoriser une solution de reprise. Elle pourrait se trouver dans la production d'un nickel destiné aux batteries électriques, mais les investissements se chiffreraient en centaines de millions d'euros. En attendant, l'usine est morte. Un arrêt définitif dû principalement aux coûts exorbitants de l’électricité et à un endettement abyssal, mais aussi au manque d’investissements, aux exigences européennes de remboursement du prêt accordé par la Grèce, et surtout à la concurrence à bas coût, indonésienne ou balkanique. LARCO qui a produit jusqu’à 40 000 tonnes de nickel n’en produisait plus que 2 000 tonnes par an depuis 2021.
Deux projets de reprise sont donc en cours d’examen; le premier envisage la production de concentrés ou mattes de nickel pour les batteries électriques, le second mise principalement sur l’exploitation minière, sans production métallurgique. Ces deux dossiers associent des fonds d’investissement mêlant des capitaux néerlandais, kosovars, macédoniens et grecs. Ils suscitent l’inquiétude des syndicalistes locaux peu convaincus de leur sérieux.
"1 200 ouvriers et sous-traitants de LARCOI ont été licenciés. Chaque salarié a dû signer un contrat temporaire pour lui permettre de travailler jusqu'à fin décembre", a déclaré Panagiotis Politis, président du Syndicat des Travailleurs de l’usine.
"Beaucoup de métallurgistes et de cadres ont été mis à contribution pour fermer les immenses fours et sécuriser les installations. Le ferronickel c’est fini et avec lui 74 ans de notre histoire."
"Le gouvernement grec nous a proposé un programme "passerelle", qui est une passerelle vers le chômage. Mais nous ne voulons pas d'allocations – nous exigeons le droit de travailler", a-t-il poursuivi avant de conclure "Nous avons réussi à rester dans l'usine jusqu'à présent, et nous ne partirons pas. Nous exigeons que tout le monde soit réembauché par le futur repreneur, en gardant notre représentation syndicale."
Trois cents familles étaient censées abandonner leurs appartements, qui appartiennent à l'entreprise depuis 1950, mais elles sont toujours là. "Les plus anciens vont partir en retraite, le plus dur sera pour les plus jeunes, il n’y a pas d’emplois dans la région, pas de tourisme, il leur reste à émigrer au Canada, c’est tout une communauté qui risque de disparaître" a précisé un cadre dirigeant de l’usine, sous couvert d’anonymat, qui ajoute: "certains disent qu'il n'y aura plus de pollution mais il y a pire, c'est le chômage de centaines de personnes et le déclin d'une petite ville qui bénéficiait des emplois du nickel ".
LARCO était aussi le symbole d’une culture ouvrière traditionnelle, fortement syndiquée. Les deux candidats à la reprise ont prévenu : les salariés qui seront repris devront comprendre que les temps ont changé.
La semaine du nickel
Le séisme survenu en Indonésie, principalement dans la province de Java, a fait plusieurs centaines de morts. La pluie et les répliques ralentissent les exportations minières et la production métallurgique. C’est à Java que se trouve la première usine de batteries pour véhicules électriques d'Indonésie. Le tremblement de terre a "contribué" à soutenir les cours du nickel, dont le pays est le premier producteur mondial.
Cette semaine, L’agence chinoise de prévisions industrielles Mysteel a rapporté que les aciéries d’acier inoxydable chinoises étaient susceptibles de réduire leur production de 4,9% en novembre en raison du ralentissement saisonnier hivernal.
L’OMC a conclu lundi que les plans de l'Indonésie visant à interdire les exportations de minerai de nickel pour raffiner le minerai sur place, violeraient ses règlements a relevé le négociant Marex Spectron.
Les données économiques américaines ont été décevantes mercredi, le dollar a baissé, ce qui a soutenu, un peu, le marché du nickel.
LME Nickel le 25/11/2022 après clôture : 25 594 dollars -1,94 % - semaine +0,82%