"Attention, on assiste à une destruction de la demande", avertit un analyste du LME. La semaine dernière, la banque JP Morgan avait estimé le "juste prix" du nickel à 25.000 dollars la tonne. Il valait 10.000 dollars de plus ce vendredi en fin de matinée à Londres. Les échanges se sont effectués sans interruption et le nickel a trouvé un pallier à 35.000 dollars la tonne.
Nickel "made in New Caledonia"
Dans un contexte où l'industrie de l'inox et celle des batteries électriques doivent apprendre à vivre avec du "nickel cher", près de 7% de la production mondiale provient de Nouvelle-Calédonie, le cinquième producteur mondial de nickel.
"La Nouvelle-Calédonie est incroyablement importante pour le marché global du nickel et il est essentiel que nos partenaires et amis sachent qu’ils peuvent avoir confiance dans le prix du nickel fixé par le LME et je sais combien c’est important pour l’économie du Territoire", a commenté Matthew Chamberlain, le Directeur général (CEO) de la Bourse des métaux de Londres, dans une interview accordée à Outremer la1ère.
Et M. Chamberlain de poursuivre : "Bien-sûr, vous pouvez penser, si vous produisez du nickel, que c’est vraiment génial d’avoir un prix très élevé mais le problème, c’est quand le prix ne veut plus rien dire, n’a plus de réalité avec le marché industriel, alors vous détruisez la demande, plus personne n’achète le nickel que vous produisez".
Découvrez notre reportage à la Bourse des métaux de Londres. Prix du nickel, importance de la Nouvelle-Calédonie, interview de Matthew Chamberlain, CEO du LME
Images Nordine Bensmail
Le nickel est cher
Les prix du nickel avaient progressé jeudi à Londres et à Shanghai, les mouvements importants des cours du métal étant alimentés par des conditions commerciales difficiles.
"Très peu de vendeurs et d’acheteurs à ce prix, autour de 37.000 dollars la tonne. Les discussions portent toutes sur les capacités de financement des sociétés de négoce de matières premières sur des marchés aussi volatils que celui du nickel. Elles sont à la recherche désespérée de capitaux pour couvrir leurs positions", a indiqué l’analyste Zénon Ho à Singapour.
Les volumes négociés à la Bourse des métaux de Londres (LME) ont légèrement augmenté sur la première place mondiale de négociation du nickel, suggérant que le marché commence à revenir à la normale après deux semaines de chaos.
Le nickel fluctue, nerveusement, alors que les perturbations du conflit russo-ukrainien suscitent des inquiétudes quant à l'approvisionnement mondial. "La Russie fournit environ 10 % du nickel mondial, mais le géant russe Nornickel (Norilsk) est le plus grand fournisseur mondial de nickel de qualité batterie avec 15 à 20 % de l'approvisionnement mondial", a déclaré Dominic O'Kane, analyste chez JP Morgan.
Londres, Shanghai, Nouméa...
La divergence des prix entre Londres et Shanghai "reste le facteur clef, le marché chinois fournissant un élément de résistance au rallye londonien", mais un élément relatif car "le niveau des stocks est encore insuffisant et tire les prix vers le haut", a estimé Alastair Munro, observateur des échanges à la Bourse des métaux de Londres.
A la City, le prix du nickel reste élevé par rapport à son plus bas de la semaine qui était de 26.675 dollars mardi. Il affichait 35.509 dollars vendredi en fin de matinée, un cours bien plus élevé que le coût de production du nickel en Nouvelle-Calédonie.
"Les usines calédoniennes sont rentables et leur avenir est très positif, si les cours demeurent aussi élevés. Reste à connaître la quantité de nickel qu’elles sont capables de proposer au marché, plus elle sera élevée plus les profits seront importants et les coûts fixes en baisse. L’inverse serait tout aussi vrai ", a indiqué Jim Lennon. L’expert du nickel calédonien est le conseiller en investissements du géant bancaire australien Macquarie.
Vendredi matin, plusieurs négociants londoniens ont suspendu leur négoce à la corbeille du LME, et notamment celui des cathodes et des briquettes de nickel, étant donné la volatilité du marché. "Les gens sont à court de liquidités, et le cash reste roi lorsque les matières premières en général sont volatiles", ont conclu les analystes de Marex.
En fin de matinée et de cotation des cours du nickel au LME, la tonne de métal baissait d'environ 6.000 dollars, "il reste encore de la marge, on est sur des hauteurs plus accessibles", a estimé un responsable du LME, sous couvert d'anonymat.
LME Nickel 25/03/2022 (cours provisoire)
35.509 dollars/tonne : - 4,63% 17:50 GMT