"Le tourisme est la seule économie capable de redémarrer assez rapidement", les professionnels du secteur attendent les clients pour les vacances d'août

À l'Île des Pins, les prestataires touristiques sont prêts à accueillir les touristes locaux sur les plages de sable blanc.
Ce n'est un secret pour personne, le tourisme s'avère en berne dans l'ensemble de la Nouvelle-Calédonie. Mais l'envie de continuer est toujours là, de la Grande Terre aux îles Loyauté en passant par l’Île des Pins. De nombreux professionnels mettent toute leur énergie et leurs espoirs dans une reprise d’activité, à l’approche des deux semaines de vacances.

Les locaux seront-ils au rendez-vous pendant les vacances d’août ? Plus de deux mois maintenant que certains hébergements n’ont pas vu un seul touriste dans leurs bungalows ou leurs chambres. Mais l’heure est venue pour beaucoup de professionnels de se remettre en selle. Avec une saison fraîche couplée à une crise insurrectionnelle et économique, ainsi qu’une insécurité sur les routes, l’incertitude de retrouver des clients est grande. Pour autant, ils veulent y croire. 

Des offres plus attractives

En province Sud, les 450 prestataires touristiques semblent prêts à se relever. Roxanne Brun, directrice générale de Sud Tourisme, évoque un travail de longue haleine de la part des professionnels du secteur, à la veille des vacances scolaires. Prix en baisse, adaptation d’activité ou encore annulations sans frais… les idées ne manquent pas, pour attirer les clients. L’organisation vient de publier sur son site internet une nouvelle page mettant en avant des offres spéciales “saison fraîche”, ainsi que des offres solidaires de nombreux prestataires. 

Certains, par exemple, ont dû repenser leur activité. Cela fait plusieurs années qu'une entreprise privée est installée au parc provincial de la rivière Bleue. Mais avec la situation sur les routes, en particulier au Mont-Dore, le parc est fermé depuis la mi-mai. Alors pour le moment, les célèbres sorties pleine lune en kayak ne se font plus sur le lac de Yaté, mais en baie de Sainte-Marie, au départ de Ouémo. Tour de baies, stage vacances kayak-judo, l'activité a été complètement réadaptée. "On a fait un très gros travail de communication, aussi", précise Michaël, le gérant. À la veille des vacances, l'activité basée également à Dumbéa va elle aussi reprendre.

À Poé, destination très prisée des locaux en période de vacances, les prestataires sont presque tous à l’arrêt. Ils espèrent que la réouverture du Domaine de Deva leur donnera un nouvel élan.

Voyez ce reportage de Camille Mosnier et Brice Bachon.

©nouvellecaledonie

Eloignement rime avec difficultés de ravitaillement

Plus au nord du Caillou, sur la côte Est, les structures touristiques fermées pendant la crise rouvrent tout doucement. Elles sont prêtes à accueillir les touristes locaux dès cette semaine. Gîtes, accueil chez l'habitant et hôtels de Hienghène, par exemple, s'organisent pour accueillir les visiteurs à partir du 1er août. “Nous avons fait le point avec nos accueils en tribu, nos terrains de camping et nos gîtes, et la plupart sont prêts à accueillir de nouveaux touristes. Ça vaut aussi pour les activités”, confirme Sylvana Binet, la directrice de l'office du tourisme à Hienghène.

À Poindimié, les gérants des structures s'organisent en fonction de la situation. Pour eux, c'est compliqué, en particulier avec les blocages routiers, même filtrants. Mais certains sont prêts à accueillir des clients. “Pour l’instant, nous n’avons pas de réservation. On en avait après les évènements et tout a été annulé jusqu’au mois de décembre”, indique Kathy Collado, gérante du gîte Neweidjé.

Du côté de Ponérihouen, certaines structures restent fermées pour le moment. Mais d'autres sont prêtes à recevoir des visiteurs sous certaines conditions. C'est le cas au gîte Neouty découvertes, à Tchamba. “Ce qui va me poser problème pour l’instant, c’est le ravitaillement parce qu’au magasin, je n’ai pas tout ce qu’il faut encore, je n’ai pas de gaz. Si j’ai des réservations, je suis prête à faire un effort pour essayer d’ouvrir”, explique Edwige Blancher, la gérante de l’établissement.


Savoir tirer son épingle du jeu

D’après Judickaël Selefen, directeur du GIE Tourisme province Nord, sur la côte Ouest, 60 à 70 % des structures sont actuellement fermées, en particulier les plus grandes. Ce qui est dû à l’importance de leurs charges à payer. “Les laisser ouvertes n’est pas rentable financièrement”, précise-t-il. Ce sont les petites structures qui, pour certaines, restent ouvertes en cette période et qui donc pourraient reprendre plus rapidement un chiffre d’affaire positif. “Les réservations du mois d’août auraient déjà dû se faire le mois dernier. Là, il n’y en a quasiment pas”, indique toutefois Judickaël Selefen.

Une reprise difficile car selon le directeur du GIE, il faut avant tout retrouver la confiance des clients. 

On ne peut pas faire comme si il ne s’était rien passé. Je suis optimiste car il y a une réelle volonté des prestataires et je pense aussi que les Calédoniens ont envie de prendre l’air.

Judickaël Selefen, directeur du GIE Tourisme province Nord

Alors depuis quelques jours, sur sa page Facebook, le GIE publie quelques posts avec des paysages emblématiques, pour rappeler à quel point le Nord est une terre empreinte de diversité et d’authenticité. Dans l’un des derniers, qui met en valeur la grotte de Koumac, la grande majorité des internautes manifeste l'envie de découvrir ou re-découvrir l'endroit. 

Travailler à un plan de relance

Aux Loyauté, pas un touriste à l’horizon pour le moment. Mais “nous allons mettre un plan de relance en route. On va se focaliser sur Lifou et Maré, parce que les vols sont plus fréquents”, indique Cédric Ixeco, directeur de l’agence Îles Loyauté explorer. 14 vols pour Drehu, 7 pour Nengone, d’ici la semaine prochaine, l’agence espère proposer des promotions pour que “les gens sortent de la capitale.” Il l’assure, les prestataires sont prêts et veulent miser sur un tourisme de proximité. Avec un accueil plus personnalisé pour chaque personne, avec “des entrepreneurs qui ont toujours cette passion du tourisme”. 

Après un communiqué de l’aire coutumière d’Iaaï il y a quelque temps, les coutumiers indiquaient que les conditions de sécurité n’étaient pas réunies pour accueillir les touristes. Mais Cédric Ixeco l’assure : des échanges sont faits pour que tout revienne rapidement à la normale. “On espère un communiqué officiel d’Ouvéa pour inclure l’île dans la boucle de reprise.” 

Faire front commun

Même cas de figure à l’Île des Pins. Avec 100 % de perte de chiffres d’affaires pour la plupart des prestataires, des hôtels fermés et des piroguiers qui ne sortent plus en mer, le moral n’est pas au beau fixe. Pourtant, dans cette île qui vit exclusivement avec les visiteurs locaux et internationaux, la reprise n’est qu’une question de jours. “On est quelques-uns à rouvrir ce week-end ; timidement, mais c’est la seule solution qu’on a”, indique Lilian Morer, président de la fédération du tourisme et acteurs économiques de l'Île des Pins. Un long travail avec les chefferies, les tribus et tous les prestataires a été fait sur le terrain ces dernières semaines, pour assurer une reprise dans les conditions de sécurité "les plus optimales." 

On se devait de redémarrer tranquillement. On propose aux gens de venir pour profiter des plages. En tout cas, ici, les gens sont volontaires et attendent les touristes.

Lilian Morer, président de la fédération du tourisme et acteurs économiques de l'Île des Pins