Les métallurgistes calédoniens s'inquiètent pour l'avenir de leur ferronickel

A l'usine pyrométallurgique de KNS, à Vavouto.
Koniambo Nickel SAS présentait ce mercredi ses résultats 2022. Avec une bonne nouvelle, une production qui passe désormais la barre des trois mille tonnes par mois. Mais aussi beaucoup d’inquiétude pour l’avenir, dans un marché en pleine mutation. Chez KNS comme à la SLN, la pertinence de continuer à produire du ferronickel en l'état est interrogée.

Quel avenir pour le ferronickel produit, aussi bien par KNS, que par la SLN ? Ce nickel qualité acier, vendu principalement à la Chine, ne peut pas être utilisé tel quel dans le très porteur marché des batteries de voiture électrique. Alors si, à la bourse de Londres (ou LME), les cours du nickel s’envolent et atteignent aujourd’hui plus de 25 000 dollars la tonne, ce n’est pas du tout à ce prix que les deux métallurgistes vendent leur ferronickel, dont le prix de référence se situe plutôt autour de 17 000 dollars du côté de la SLN. 

Un coût du charbon démultiplié

C’est mieux qu’il y a quelques années, quand le secteur du nickel traversait une passe difficile. Mais loin d’être mirobolant quand on sait que le coût du charbon utilisé pour produire ce nickel a été multiplié par cinq ou sept en raison de la crise ukrainienne. A cela s’ajoute la concurrence toujours plus forte du Nickel pig iron, certes de moins bonne qualité, mais qui contribue à tirer vers le bas le cours du ferronickel.

Le ferronickel souffre du fait que certains acheteurs voudraient que ce produit ne soit plus lié au prix LME, mais à ce qu'on appelle le marché secondaire. Plus les cours au LME augmentent, plus le fossé se creuse sur le marché. Il est très important de comprendre qu'un prix élevé au LME, ça ne veut pas du tout dire un prix de vente élevé pour nous ou la SLN. 

Neil Meadows, président de Koniambo Nickel SAS

Relancer la production de matte ? 

Dans ces conditions, les industriels doivent-il changer leur fusil d’épaule ? La SLN comme la société KNS peuvent toutes deux transformer le ferronickel en ce qu’on appelle de la matte. Un produit dont on peut ensuite faire du sulfate de nickel, produit qui lui est utilisé dans la fabrication des batteries. La Société Le Nickel l’a d’ailleurs fait jusqu’en 2016, avant d'abandonner une production jugée non rentable à une époque où les cours du nickel étaient au plus bas. Et si l’idée de relancer la production de matte refait régulièrement surface avec le développement du marché des batteries, ni la SLN, ni Koniambo Nickel n’ont à ce jour décidé de sauter le pas, et d'ainsi investir un domaine encore peu mature.

Cela fait vingt ans que je suis dans l'industrie du nickel et jamais je n'aurai pensé vivre une situation pareille. Ce qui va se passer sur le long terme est très difficile à prédire. On a un ferronickel très riche en nickel et économiquement, ce serait intéressant de produire de la matte. C’est ce qu'a fait la SLN dans le passé et ça reste une possibilité. On y pense. Mais pour le moment il n'y a pas de projet lancé.

Neil Meadows, KNS