Manus: « nous sommes libres, mais dans le périmètre de notre prison »

Le centre de rétention de Manus est désormais une « semi-prison ».
Ils sont libres, mais sur le papier uniquement. Les réfugiés de Manus restent enfermés au centre de rétention. L'Australie refuse de les envoyer en Nouvelle-Zélande.
« On peut dire que nous sommes libres, mais dans le périmètre de notre prison. » C'est ainsi que Behrouz Bouchani, un Iranien kurde, résume la situation au centre de rétention de Manus, en Papouasie Nouvelle-Guinée.
 
Le 26 avril, la Cour Suprême papoue a jugé que la  détention des migrants étaient anticonstitutionnelle. Le Premier ministre, Peter O'Neill, a donc annoncé que le centre allait fermer, sans indiquer de date.
 
Environ la moitié des détenus de Manus ont été reconnus par les autorités papoues comme d'authentiques réfugiés, ils devraient donc normalement être des hommes libres. Le 28 avril au soir, les gardes du centre de rétention ont donc ouvert les portes qui séparaient ces réfugiés de leurs camarades considérés comme des migrants économiques - ceux dont la demande d'asile a été retoquée par les autorités papoues.
 
Autre changement: les réfugiés détenus peuvent désormais posséder un téléphone portable et ne sont plus soumis à des fouilles. Mais il manque l'essentiel, la liberté de circuler. Environ 850 hommes restent détenus au sein du centre. 
 

En parallèle, le bras de fer se poursuit entre l'Australie et la Papouasie Nouvelle-Guinée.

Les deux gouvernements se rejettent la responsabilité de ces 850 migrants. Voici ce que le ministre de l'Immigration, Peter Dutton, a répondu, sur ABC le 28 avril, quand on lui a demandé quel pays devait prendre soin de ces réfugiés et migrants économique: 
 
« La Papouasie Nouvelle-Guinée, c'est ce que stipule l'accord passé avec le pays par le gouvernement de Kevin Rudd. » 
 
Et quand ABC a demandé à Charles Lepani, l'ambassadeur papou en Australie, la réponse inverse a aussitôt fusé: 
 
« Bien sûr que c'est la responsabilité de l'Australie. C'est ce que nous avons toujours dit. »
 
Le 29 avril, Malcolm Turnbull a laissé entendre qu'elle n'accepterait pas l'offre de la Nouvelle-Zélande. Wellington se dit prêt à accueillir 300 réfugiés de Manus sur les 2 prochaines années. Cette option déplaît au Premier ministre australien, car, a-t-il déclaré, elle serait utilisée comme« un argument de vente par les passeurs ». Autrement dit par Peter Dutton, le ministre australien de l'Immigration, ce serait une façon pour les anciens boat-people de « passer par la porte de derrière ». En effet, une fois que les migrants obtiennent le passeport néo-zélandais, ils peuvent s'installer librement en Australie. 
 
Il semble que l'option favorisée par le gouvernement australien soit toujours de transférer les 850 migrants de Manus au centre de rétention de Nauru, où les conditions de vie ne sont pas meilleures qu'à Manus. Poussé à bout par 3 ans de rétention et la totale incertitude sur son avenir, un réfugié iranien s'est immolé par le feu le 27 avril. Évacué à Brisbane pour y être soigné, le jeune homme de 23 ans, prénommé Omid, est décédé de ses blessures le 29 avril dans l’après-midi.