Papouasie Nouvelle-Guinée: le Speaker perd sa croisade contre les objets « païens » du Parlement

¨PNG : têtes après croisade
En 2013, Theodore Zurenuoc, un fervent chrétien, a fait décapiter 19 masques en bois à coups de tronçonneuse, car il considère qu'elles représentent le mal. Cette semaine un juge lui a ordonné de restituer les sculptures.



Ces têtes sculptées ornaient le linteau de la porte d'entrée du Parlement papou. Il y en avait 19, pour représenter les 19 provinces du pays. Il y a trois ans, le Speaker a aussi fait arracher un poteau totémique de 10 mètres de haut, qui se dressait dans l'enceinte du Parlement. Il avait l'intention de le remplacer par un « Pilier de l'Unité » avec une inscription gravée au sommet: « La parole de Dieu ». 

Selon le Speaker (président) du Parlement papou, ces masques et poteau sont des idoles païennes, des objets qui incarnent « le mal et l'impiété ». Theodore Zurenuoc est en effet un membre fervent de l'église évangélique luthérienne. Il rêve de transformer le Parlement papou en maison de Dieu.
Le Speaker Theodore Zurenuoc est un fervent luthérien et il a juré de nettoyer le Parlement de tous ses symboles païens. Le juge lui a donné tort.

Le geste de Theodore Zurenuoc a fortement déplu à l'ancien Premier ministre, Sir Michael Somare, le père fondateur de la Papouasie Nouvelle-Guinée, ainsi qu'au directeur du Musée national papou (National Museum and Art Gallery), Andrew Mouto. Les deux hommes ont poursuivi en justice le Speaker.

Trois ans après, le juge David Cannings a conclu que Theodore Zurenuoc a tenté d'imposer sa religion personnelle au pays, et donc violé l'article 45 de la Constitution papoue, qui garantit la liberté de croyance et de religion pour tous les Papous. Le Speaker a aussi enfreint le code national de la propriété culturelle.

Le juge Cannings a donc ordonné à Theodore Zurenuoc de restituer les sculptures et de les remettre à leur place sous les six mois. Et c'est le Parlement qui paiera la facture des travaux.
Avant 2013, les 19 têtes ornaient le linteau de la porte d'entrée du Parlement.

Mais d'après Andrew Mouto, le directeur du Musée national papou, les totems ont été très grossièrement détourés à la tronçonneuse et sont donc trop endommagés pour être restitués au Parlement.

Timothy Bonga, lui-même ancien Speaker du Parlement papou- et ancien ministre de la Police de Michael Somare, se montre plus optimiste. « Theodore Zurenuoc peut restaurer et remettre les sculptures dans l'enceinte du Parlement, estime-t-il, mais les gens ont été très blessés par le geste du Speaker, il a détruit la fierté des Papous pour leurs cultures. Les Papous doivent conserver leur droit de choisir leur religion librement, et de maintenir leurs rituels. »

Theodore Zurenuoc est toujours soutenu dans sa croisade par un homme d'église influent, le révérend Joseph Walters. Mais le père Danny Gukatells, le Président du conseil des églises de la Papouasie Nouvelle-Guinée, condamne les actions du Speaker, et les juge « contraires à la religion chrétienne ».v