Le géant minier Nornickel a annoncé avoir payé l'amende record à laquelle l'a condamné la justice russe après une vaste pollution arctique qui avait suscité la colère du président Vladimir Poutine. Il y a vingt ans, Nornickel avait envisagé un grand complexe industriel en Nouvelle-Calédonie.
Au début des années 2000, le géant russe du nickel avait renoncé à un projet industriel et minier en Nouvelle-Calédonie, et notamment à cause d’exigences trop importantes en matière de protection de l’environnement. Le 8 août 2002, le géant russe Norilsk annonçait qu’il se retirait du projet de développement d’un gisement latéritique de nickel et d’une usine hydro-métallurgique. Ce projet, qui prévoyait l’exploitation des gisements de Nakety et de Bogota en Nouvelle-Calédonie, devait produire 50.000 tonnes de nickel chaque année pour un investissement de 800 millions de dollars. "Trop cher, trop compliqué, trop d’exigences environnementales, sans garantie sur le rendement des placements pour les actionnaires" avançait à l’époque la direction de Norilsk Nickel (Nornickel) à Moscou pour justifier son retrait. Le géant russe s’en est allé et ce n’est peut-être pas plus mal...
Pollution arctique: le russe Nornickel a payé une amende record
Le groupe a déclaré dans un communiqué avoir "versé 146,2 milliards de roubles (1,66 milliard d'euros au taux actuel, ndlr) de paiements nécessaires pour les dommages causés à l'environnement suite à la fuite massive de diesel du 29 mai 2020" près de la ville arctique de Norilsk, au nord du cercle polaire arctique.
La somme est destinée au budget fédéral. Durant une réunion du gouvernement, Vladimir Poutine a demandé à "veiller à ce que le montant (de l'amende) soit utilisé avant tout (...) pour améliorer la situation environnementale à Norilsk et dans sa région", selon les agences de presse russes RT et Sputnik.
"On peut noter avec satisfaction que la compagnie remplit ses obligations. Et nous espérons que ça restera comme ça", a-t-il ajouté.
21.000 tonnes de carburant s'étaient déversées dans plusieurs cours d'eau après l'affaissement d'un réservoir d'une centrale thermique appartenant à une entité de Nornickel qui n'avait pas effectué des travaux dont la nécessité avait été établie en 2018.
A l'époque des faits, le groupe Nornickel avait estimé que l'accident avait pu être provoqué par le dégel du pergélisol - ou permafrost -, conséquence du changement climatique qui aurait entraîné l'effondrement des piliers soutenant la citerne. Cette pollution avait suscité une immense marée rouge, visible depuis l'espace. Le nettoyage complet de la zone devrait prendre des années. Le principal actionnaire du groupe est Vladimir Potanine, régulièrement en tête de la liste des hommes les plus riches de Russie selon le classement Forbes et proche du président russe, avec lequel il jouait notamment au hockey sur glace.
Cette proximité ne lui a pas évité les foudres du président qui, après l'annonce de la catastrophe, avait ordonné que l'entreprise endosse tous les frais de nettoyage, ce que le groupe a d'abord rechigné à faire (proposant une somme bien inférieure) avant d'obtempérer.
L'entreprise, un des plus gros pollueurs de Russie, selon les ONG spécialisées, semble chercher depuis à verdir son image, une démarche déjà entreprise par son principal concurrent le Brésilien Vale après la rupture d'un barrage au Brésil. La direction de Nornickel a déclaré récemment avoir "appris une leçon importante" et vouloir "revoir drastiquement son approche de la gestion de risques environnementaux".
Nornickel a également annoncé ces derniers mois la fermeture d'une fonderie de nickel sur la péninsule de Kola (région de Mourmansk, nord-ouest du pays), des endroits considérés parmi les plus pollués au monde du fait notamment d'émissions de dioxyde de soufre.
En février, Nornickel a connu une autre catastrophe: trois personnes ont été tuées et cinq autres blessées dans un effondrement dans une usine métallurgique du groupe située également à Norilsk, à l'arrêt depuis. "Selon des données préliminaires, l'accident est survenu en raison d'une violation flagrante des règles de sécurité et des normes de sécurité industrielle", avait indiqué Nornickel.
Le groupe russe, premier producteur mondial de nickel, a précisé par la suite que deux de ses mines avaient été également fermées au moins jusqu'au 16 mars, et que des inspections étaient en cours. A Londres, les analystes ont estimé que cette baisse, même provisoire, de la production russe allait entraîner des tensions sur l'offre de nickel du marché. Le cours du métal est donc reparti en hausse à la Bourse des métaux de Londres…
Cours du nickel au LME de Londres, le 11/03/2021 à 16:00 GMT +10h 03:00 Nouméa : 16.345 dollars/tonne +1,38 %