Privé de touristes, l’artisanat à la peine

Premier employeur de Calédonie, avec ses 11 000 entreprises artisanales, le secteur est en difficulté depuis la fermeture des liaisons aériennes. Ce sont surtout les 300 sociétés qui vivent directement du tourisme qui sont touchées. 
 
Si la chambre de métiers n'enregistre pas plus de radiations ni de fermetures que les années précédentes, la situation pourrait bien changer pour ce secteur, qui est le premier pourvoyeur d’emplois sur le Caillou.
Les artisans du pays souffrent de l’absence des touristes depuis le confinement et la fermeture des frontières en mars dernier. A l’image de  Frédéric Le Bouler, de la galerie « les arts du pacifique ». Cette boutique, qui commercialise les œuvres de 70 artistes locaux, a enregistré des pertes conséquentes. « La majeure partie du chiffre d’affaires était réalisée grâce au tourisme (entre 60 et 70 %) et effectivement, il n’y en a plus en Calédonie mais on peut remercier et même féliciter les Calédoniens en général de leur soutien, de promouvoir l’artisanat local et le fait de continuer à faire marcher cette machine. Nous avons baissé en chiffre d’affaires mais pas d’autant. Ça veut dire qu’il y a un réel soutien de la part de la Calédonie. »
Frédéric Le Bouler, galeriste
 

Une forte clientèle touristique 

La reprise des manifestations dans le pays après le confinement est une bénédiction pour les artisans comme Hélène Chernovsky, une créatrice de bijoux en nacre. Pour s’en sortir, elle a aussi eu l’idée de créer un site de vente à l’international. « Notre chiffre d’affaires est réduit d’à peu près la moitié. 80 % de notre clientèle sont des touristes, même ceux qui viennent de France visiter la famille. Sans les touristes, on est vraiment pris de court, s’inquiète l'artisane de« Sea art galery ». On a mis en place un site Internet et on compte là-dessus pour travailler dans l’Océanie et en France. On s’en sort mais pas comme avant. »
Hélène Chernovsky, créatrice de bijoux
 

Des robes... et des masques 

Artisane et gérante d'Eseka, Suzanne Humbert, elle, a n’a jamais vraiment compté sur la clientèle touristique. Mais cette styliste réputée pour ses créations de robes missions a surtout souffert du manque de clients locaux pendant et après le confinement. C’est grâce à des commandes spéciales qu’elle a pu s’en sortir.
« La confection des robes s’est arrêtée depuis le Covid, parce que les gens n’allaient plus aux événements. Il n’y avait plus de cérémonies, ni de mariages. Mais grâce aux commandes de masques, on a bien travaillé à ce moment-là, pour les écoles, les pharmacies », les entreprises… 
Suzanne Humbert, artisane et gérante de la boutique Eseka
 

Des aides pour passer le cap

Le secteur de l’artisanat a su s’adapter et réagir à la crise mais il est quand même à la peine. Sur les 11 000 entreprises artisanales du Caillou, tous secteurs confondus, 300 sont directement dépendantes de la clientèle touristique. 
Laure Le Gall, directrice de la communication de la chambre de métiers et d'artisanat
Les soutiens financiers du pays les ont aidés à passer le cap critique. « On a eu un plan de soutien du gouvernement calédonien assez dynamique, dont les entreprises artisanales ont su bénéficier, rappelle Laure Le Gall, directrice de la communication de la chambre de métiers et de l’artisanat. Elles ont pu se faire accompagner par leurs chambres de métiers. Et aujourd’hui, en octobre, les éléments qu’on a nous font dire que le pire a pu être évité. »
Pour l’artisanat d’art, l’avenir reste flou car nul ne sait quand la situation mondiale permettra de rouvrir les frontières et d’accueillir à nouveau les touristes.
Jusqu’ici, les artisans arrivent à maintenir leur activité et à survivre. Mais pour combien de temps encore ?  

Le reportage de Nathalie Rougeau et Laura Schintu : 
©nouvellecaledonie