Prony Resources : l’inquiétude des syndicats

La base vie de l'usine de Prony Resources dans le Sud de la Nouvelle-Calédonie.
C’est un conseil d’administration très attendu qui se tient ce mercredi 30 août, à Prony Resources. La trésorerie du métallurgiste est à bout de souffle. Et sans nouvel apport financier, l'avenir de l'usine du Sud pourrait bien s'assombrir rapidement. Du côté des syndicats, les réactions oscillent entre pragmatisme et inquiétudes.

Les administrateurs de Prony Resources se réunissent ce mercredi 30 août sur fond de crise. L’entreprise doit trouver rapidement de nouvelles garanties financières, au risque sinon de voir sa trésorerie se dégrader très rapidement. 

Renégocier les prix

Parmi les pistes pour passer le creux de la vague : geler les embauches mais aussi renégocier le prix de vente du NHC, le nickel pour batterie, avec l’actionnaire et négociant suisse Trafigura.  
"Le schéma qui a été discuté il y a deux ans n’est plus viable aujourd’hui" explique Alexis Falematagia, chef de section Prony Resources et délégué syndical au Soenc-Nickel. "On avait des prévisions qui étaient à 80 % du LME (London Metal Exchange), aujourd’hui on tourne autour de 60 à 65 %. C’est trop bas par rapport aux charges de l’entreprise et nos besoins de fonds de roulement".  

Une nouvelle défiscalisation pour le projet Lucy

Prony Resources compte également sur le feu vert de l’État pour une nouvelle tranche de défiscalisation, laquelle n’a toujours pas été confirmée à ce jour.   
"On attend un accord de l’État qui nous officialise par une lettre pour dire que la défiscalisation, ça représente 100 millions d’euros (12 milliards CFP). Donc c’est ça qui va nous permettre une bouffée d’oxygène pour pouvoir tenir l’année 2024" poursuit Alexis Falematagia.  
Car Prony Resources a encore besoin de financer de gros investissements, comme la fin du chantier Lucy. Un projet d’un montant de 50 milliards CFP, pour traiter et stocker les résidus du complexe hydrométallurgique.    
Or sans Lucy, plus d’usine, rappelle Antonio Newedou, secrétaire général de la fédération des mines, des carrières et de la métallurgie de l’USTKE : "Lucy est dédiée à vider le barrage (KO2). Si on n’arrive pas à vider le barrage, on n’aura plus de place pour stocker nos résidus".  

Le barrage KO2 de l'usine du Sud de Prony Resources en décembre 2020


 

Le problème des garanties environnementales

Prony Resources a bien encore de l’argent en réserve. Mais il est immobilisé sur un compte destiné à financer des engagements environnementaux. Soit la remise en état et la réhabilitation des zones dégradées par l'exploitation minière, la réparation des dommages environnementaux en cas d’accident ou le réaménagement du site en cas de cessation d’activité.  
Pour utiliser cette trésorerie, il faudrait que des compagnies d'assurances acceptent de couvrir ces garanties environnementales au profit de la province Sud. Mais l’usine se heurte à des refus.  
"L’assurance nous a été refusée parce qu’on présente un compte de résultats qui n'est pas très favorable pour les banques" souligne Alexis Falematagia délégué syndical du Soenc-Nickel. "Aujourd’hui, on a besoin de l’appui de l’État et de Trafigura pour avoir un dossier et des garanties financières solides. Là, on recherche des soutiens pour la suite de Prony Resources".  

La menace d’un plan social

Et il y a urgence. Dans un courrier adressé au personnel, la PDG Béatrice Pierre indique qu’un plan social "n’est pas prévu dans l’immédiat mais si aucun accord de refinancement n’est trouvé à hauteur des besoins de trésorerie, ce n’est pas à exclure". 
A l’USTKE, on se dit très inquiet : "on a passé plusieurs plans sociaux déjà. On sait les conditions dans lesquelles les plans sociaux se dessinent. On est au début du tunnel. Je ne sais pas si on va en sortir vivant", confie Antonio Newedou.   
Le Soenc-nickel, syndicat majoritaire (lors des dernières élections la semaine dernière), tempère : "On a ce risque de plan social mais pour l’instant, il n’est pas encore sur la table. On fait tout pour avoir les aides des parties prenantes : l’État, Trafigura, CFP (Compagnie financière de Prony, regroupant des investisseurs industriels, des clients et le management de Prony Resources), l’engagement des salariés au travers de l’actionnariat salarié... Aujourd’hui, on est tous mobilisés pour sauvegarder nos 1 300 emplois, voire 3000 emplois avec les sous-traitants". 
L’entreprise s’est donné deux à trois semaines pour trouver de nouvelles sources de financement. Avec, sans doute, pour date butoir son prochain conseil d’administration, le 20 septembre.   
Contactée, la direction a déclaré "qu’à ce stade, il n’y a aura(it) pas de prise de parole".