Les contes prennent vie à Poya

"Lisapo", le mois du conte a débuté cette semaine en province Nord. Une 15ème édition qui se déroule à Poya où la caravane de l’association Tagadé s’est installée. Jusqu’à samedi, les conteurs du Nord vont se relayer et créer du lien entre les paroles, les gestes et les objets.
« La fourmi, tous les jours, elle prépare sa nourriture. Elle travaille. De son côté, la cigale continue à chanter », le conte de Jean de la Fontaine fait encore battre le cœur des enfants. A l’ombre des pieds de tamarins, Poingou Pidjépatch, conteuse originaire de la tribu de Hwâât sur la commune de Voh, capte l’auditoire. A chaque conte, sa morale, Poingou Pidjépatch a la sienne. « C’est bon de travailler lorsque le mauvais temps arrive. Tu as déjà bien préparé », explique t-elle, « à la tribu, les gens qui travaillent bien font des projets pour nourrir leurs enfants. Celui qui chante toute l’année, qui ne fait rien, n’aura forcément rien en retour », poursuit la septuagénaire.
 

Des contes d'ici et d'ailleurs 


Depuis lundi, les conteurs de Tagadé, nom de l’Association des Conteurs du Nord, se succèdent dans l’espace ouvert de la MIJ. Petits et grands se délectent inlassablement des contes d’ici et d’ailleurs. Certains mêmes reviennent le jour suivant pour ne pas en perdre une miette. « Quand je suis arrivé, j’ai pu écouter tous les contes. Il y avait l’histoire sur la liane. J'ai beaucoup aimé », raconte le jeune Wéko Doazénon « ensuite, ils ont raconté des contes sur les insectes et la poule. Par la suite, on a préparé ensemble un chant sur la poule ».

 Des paroles et des gestes


Avec les années, l’association Lisapo innove. En 2015, après chaque conte, elle offre un espace de création. Des ateliers vivants qui ont valeur de transmission des savoir-faire des anciens. « Le concept est de raconter le conte au public », indique Désiré Menrempon, le président de l’Association Tagadé, « ensuite, prendre les éléments du conte comme les paroles et les gestes, en créant des objets ou des chants dans les ateliers partagés. Il s’agit de mettre en valeur ce qu’ils ont compris et aussi montrer les objets du conte comme la poterie, les sagaies, l’épuisette à crevette ou le panier à nourriture ». Une innovation qui prend désormais toute sa place au sein de l’évènement Lisapo.
 

Vivre le conte 


Conteur depuis 1982, Charles Pébou-Polaé, originaire de la tribu de Paimboa à Ouégoa, suit l’association depuis ses débuts et constate une évolution de l’approche du conte « on observe aujourd’hui que l’on a intégré d’autres éléments autour du conte », soulève le vieil homme, « les femmes viennent avec les pandanus ou les feuilles de cocotier pour faire du tressage. La manière de faire aujourd’hui est totalement différente de celle d'autrefois. On a voulu renouveler les conteurs mais c’est très difficile », admet t-il, «  les jeunes ne sont pas intéressés. Beaucoup préfèrent aller vers la modernité. Conter aujourd’hui, c’est vivre le conte ». Jusqu’à samedi, les visiteurs pourront encore prendre plaisir à écouter les contes. Les conteurs se déplaceront dans les tribus afin que l’imaginaire reste intact et ne soit plus une frontière.