La ville de Dumbéa a été condamnée pour des irrégularités dans l’attribution d’un marché d’assainissement. Décision rendue en avril par la Cour administrative d’appel de Paris. La municipalité devra verser 53 millions de francs à la société Epureau, évincée au profit de la Calédonienne des eaux.
C'est un peu le combat de David contre Goliath. D’un côté, Epureau, une société locale d’une quarantaine de salariés. De l’autre, la Calédonienne des eaux, filiale de la multinationale Suez, leader mondial du secteur.
En 2014, les deux entreprises se disputent un gros contrat de délégation de service public : le traitement des eaux usées, pour une durée de neuf ans, à la station d’épuration de Dumbéa. La plus grosse de Calédonie.
Offre la plus avantageuse
La société Epureau a toutes les chances de remporter le marché : son offre est moins chère et elle s'avère mieux notée techniquement. Mais après plusieurs atermoiements, et reports de la date-limite pour le dépôt des offres, la mairie tranche en faveur de la Calédonienne des eaux. Laquelle a baissé son prix au mètre cube d’eau d'environ 60 à 43,5 francs. Soit tout juste cinquante centimes de moins que son concurrent.
Le concurrent malheureux part au contentieux
Epureau dénonce une atteinte à la confidentialité des offres et part au contentieux. En 2016, le tribunal administratif lui donne raison. Et fait annuler le contrat. Un second appel d’offres est lancé, plus difficile à contester. Epureau se présente mais c’est la Calédonienne des eaux qui l'emporte.
Cette fois, l’entreprise perdante ne demande pas l'annulation du marché. En revanche, elle exige d’être indemnisée pour le manque à gagner subi dans cette affaire. En 2019, le tribunal administratif condamne la mairie de Dumbéa à lui verser 35 millions de francs CFP. La commune fait appel. En vain. A Paris, la Cour la condamne cette fois à la somme de 53 millions.
Victoire, et regret
Une victoire au goût amer, pour le directeur d'Epureau. Tugdual Piriou se dit "très satisfait sur le fond. Un troisième jugement en faveur d'Epureau par rapport à ce marché qui nous a été injustement retiré. Le seul regret que l'on puisse avoir, c'est que ce soit le contribuable calédonien qui paie ces dédommagements."
Ecoutez-le au micro de Coralie Cochin :
Dumbéa condamnée, réaction d'Epureau
On y a laissé des plumes. Mais c'était la X-ième injustice vécue sur des appels d'offres. A un moment, il faut dire Stop.
Pourvoi en cassation ?
Pour la municipalité dumbéenne, le dossier n'est pas refermé. Elle n’exclut pas la possibilité de se pourvoir en cassation, auprès du Conseil d’Etat, disposant de trois mois pour le faire.
L’affaire pourrait-elle glisser sur le terrain du droit pénal, si toutefois l’infraction de délit de favoritisme pouvait être retenue ? Le procureur de la République a été destinataire des deux précédentes décisions du tribunal administratif et de la cour administrative d'appel. Vendredi 7 mai, il n’avait pas répondu à nos sollicitations.