L'hôpital de Nouvelle-Calédonie a besoin de médecins mais peine à les attirer. Une trentaine de postes non pourvus ont été recensés et des spécialistes manquent dans des services pointus. Les professionnels de santé s'inquiètent. La direction du CHT assure qu'elle va accélérer les recrutements.
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Au chevet de leurs patients, malgré l'inquiétude qui les tiraille. Les professionnels de santé qui exercent au médipôle doivent composer au quotidien avec un manque criant de médecins. Le syndicat des médecins et pharmaciens de Nouvelle-Calédonie, le SMPH, a recensé une trentaine de postes non pourvus, et on attend toujours des experts dans certains services pointus.
Le reportage de Dave Waheo-Hnasson et Laura Schintu.
Retrouvez son entretien.
Assurer les roulements
Le Dr Philippe Campana est anesthésiste-réanimateur et algologue, c'est-à-dire spécialisé dans le traitement de la douleur. «Ce qui est le plus frappant, décrit-il, c'est que les domaines d'expertise dans lequel l'hôpital est irremplaçable - la prise en charge des urgences, le Smur, la grosse traumatologie, la réanimation - et tant d'autres très pointus ne peuvent fonctionner que s'il y a un certain nombre de médecins pour les roulements, pour assumer cette expertise.»«Très inquiets pour l'avenir»
«Nous en sommes au point, poursuit-il, où nous avons d'énormes peines à recruter des collègues, qui considèrent que les conditions d'exercice ici ne sont pas satisfaisantes. Et nous sommes très inquiets pour l'avenir.»Statut ancien
Les praticiens demandent la révision de leur statut, qui date d'une vingtaine d'années. «Le médipôle a des difficultés de recrutement aujourd'hui», analyse le médecin urgentiste Guillaume Dureau, «parce qu'il est amené à recruter selon un statut qui n'a pas été revisité depuis vingt ans, avec des conditions de rémunération qui n'ont pas été revues également, et qui nous rendent non concurrentiel.»Continuité des soins
Et de préciser: «Ni par rapport au secteur privé, ni par rapport à la métropole, compte-tenu du volume horaire que nous devons accomplir, compte-tenu de l'exigence de la permanence des soins qui consiste à nous faire travailler le jour, la nuit et les week-ends.»Gouvernance et organisation
Autre syndicat qui appelle à la révision du statut des médecins, le syndicat du service public hospitalier (SPH). «Il y a un grave problème qui est dû à deux choses, estime le Dr Jacques Robert. D'une part, les conditions de recrutement et les avantages statutaires ne sont pas comparables à ce qui existe en métropole. Et d'autre part, la gouvernance et l'organisation des soins ne sont pas ce qu'ils devraient être. Donc il y a un grave problème humain, aussi. A ce titre, le rapport sur les risques psychosociaux à l'hôpital montre bien que le malaise est profond.»«Ces événements nous échappent»
Dans ce contexte, les syndicats craignent les burn-out. De son côté, la direction du centre hospitalier Gaston-Bourret répond qu'elle va accélérer les recrutements. «Effectivement, depuis quelques mois, on a été confrontés à quelques événements qui ont fait qu'il faut remplacer dans certains services les médecins», reconnaît Jacqueline Bernut, la présidente du conseil d'administration. «Mais ces événements nous échappent.»Conseil d'administration
Le directeur, souligne-t-elle, a été missionné pour accélérer les recrutements.Et ce vendredi, le conseil d'administration du CHT devait examiner ceux de plusieurs médecins: «en anesthésiologie, en chirurgie orthopédique, en médecine polyvalente à orientation pneumo, en néphrologie-hémodialyse», énumère Jacqueline Bernut. «Et on espère que d'ici juillet, on aura tous les effectifs nécessaires.»Le reportage de Dave Waheo-Hnasson et Laura Schintu.
Audit et difficultés financières
Selon une source du gouvernement, un audit est attendu à la mi-avril à propos du centre hospitalier, qui se trouverait par ailleurs en cessation de paiement.L'invitée
Yvan Avril a évoqué le sujet de ces graves difficultés financières au JT du 14 mars, avec son invitée Pascale Rouhaud-Bruzzi. La présidente du SMPH était venue développer les conséquences de ce manque de médecins, en termes de pénibilité du travail ou d'impact sur la retraite.Retrouvez son entretien.