Sous la halle du marché municipal inauguré en décembre dernier, un pêcheur a tout écoulé : friture, bec de cane, queue bleue, carangue, grisette. Habituellement, Yoran Chanene installe son étal à La Foa le vendredi, et se rend à Ducos pour le marché de gros le samedi matin. C'est un manque à gagner, "mais on fait avec". Niveau carburant, "ça y est, je suis au bout, déplore-t-il. Impossible de rejoindre le bateau avec la voiture, de partir en mer... On va attendre." La chambre d'agriculture vient de l'appeler. "Ils n'envisagent de rouvrir le marché de Ducos que dans plusieurs semaines."
Le pain, base de l'alimentation
Tom Delaporte, le boulanger installé à Méaré, a rejoint le Grand Nouméa cette semaine pour se ravitailler en farine. Il a pu livrer ses clients, mais sera dans l'impossibilité de le faire dès samedi. "Il faut qu'on trouve du mazout pour les camions. La farine on a, les stocks sont remontés." L'entreprise familiale compte un employé et n'a pas de boutique, juste une zone de livraison. L'autre problème, c'est l'argent liquide : "les gens n'ont plus de pièces." Les distributeurs ont été réapprovisionnés, alors les clients du marché arrivent avec des billets.
Le pain, c'est une denrée primordiale, en Calédonie. On attend. Il faut de la patience. Comme il y a beaucoup de on-dit, mais rien de sûr...
Tom Delaporte, boulanger à La Foa
"Des gens vont devenir pauvres"
Dans sa maison de Nily, Loïc Maréchaux ne reste pas inactif. Le fondateur de Pacifique fumoir, qui fume à froid au feu de bois wahoo, marlin, thon et crevettes, est proche du chômage technique. Habituellement, il se fournit en matières premières à Nouméa, en poissons pélagiques issus de la pêche hauturière. Quinze jours qu'il n'a pas pu se réapprovisionner. Mardi sur le marché de La Foa, il écoulait le stock qu'il n'a pas pu livrer aux grandes surfaces et restaurateurs de l'agglomération : un acheté, le deuxième à moitié prix.
Je ne baisse pas les bras, il faut juste réfléchir à la suite. Plutôt que de pleurer, je cherche des solutions.
Loïc Maréchaux, entrepreneur
"On brade. Le but n'est pas de gagner de l'argent là-dessus, il faut que ça parte avant la date limite de consommation." Avec une production moyenne de 160 kilos de produit fini par mois, après trois ans d'activité, il commençait seulement à se verser un petit salaire. Loïc Maréchaux espère que le remboursement de son prêt sera gelé un moment, "pour respirer un peu". Il a passé commande à un pêcheur du coin. "Il y a d'autres choses à faire dans le fumé. Je vais lancer des tests en mulet, hareng, dawa... Il y aura un coût de matière première qui sera beaucoup moins élevé, ce qui va permettre de toucher une autre clientèle. Parce que des gens vont devenir pauvres."