Répondre au fléau des papillons piqueurs

Les producteurs de Nouvelle-Calédonie ont perdu en quelques semaines des milliers de tonnes d’oranges. Une calamité qui a pour responsable le papillon piqueur. Le changement climatique aidant, il revient de plus en plus souvent. Les pouvoirs publics sont allés se rendre compte à La Foa.
«Une piqûre de la nuit, ici. La pourriture ne s’est pas encore installée. Regarde le nombre de piqûres.» Le président de l’Agence rurale mesure, sur des oranges de La Foa, l’étendue des dégâts. Lionnel Brinon ne manque pas de connaissances sur le papillon piqueur. Mais l’administrateur qu’il est devenu tient à avoir un regard exhaustif sur la dernière attaque portée aux vergers.
 

Il faut que les spécialistes viennent nous faire les constats, pour que derrière, on puisse travailler avec des chiffres arrêtés et officiels. J'attends ces documents pour pouvoir proposer au conseil d'administration de réfléchir à des solutions. Pour pouvoir indemniser, dans un premier temps, mais il faut aller plus loin.
- Lionnel Brinon, président de l'Agence rurale

 
 

Ravages considérables

En trois semaines, les ravages sont considérables. Dans certains vergers, c’est 90% de la production qui est détruite. Le salaire d’un an de travail et plus, qui s’envole.  
 

La prochaine cueillette, c'est octobre 2021. Vous devez entretenir vos arbres, et tout, pendant dix-huit mois, pour espérer qu'il n'y ait pas une catastrophe, encore, avant 2021. Et bien sûr, vous n'avez pas de chiffre d'affaires pendant dix-huit mois. 
- André Estieux, producteur d’agrumes

 
 

Indemnisation, mais...

S'agissant d'une calamité naturelle, il ne fait pas de doute que les producteurs pourront compter sur une indemnisation. Mais elle ne dépassera guère les 50% du prix de vente espéré. Et ce n’est en aucun cas une solution face à ce fléau.
 

C'est quelque chose qui revient régulièrement après les grandes sécheresses. On avait par le passé des sécheresses tous les sept à dix ans. Là, on traverse une période où on a une sécheresse tous les deux ans. On ne peut pas continuer simplement à attendre, et à indemniser les agriculteurs après, sans qu'on puisse apporter des solutions techniques durables.  
- Lionnel Brinon

 

Un papillon connu

Et notamment bénéficier des résultats des recherches effectuées à l’Institut agronomique calédonien. Car ce papillon piqueur, on commence à bien le connaître.
 

Ce papillon se développe sur une liane qui ne vit que dans les côteaux forestiers du centre de la Chaîne. Mais la présence des érythrines en plaine, à proximité des vergers, fait que ça apporte l'ensemble des conditions les plus optimales pour son développement. 
- Christian Mille, responsable du laboratoire d’entomologie à l’IAC

 

Elevage d'Eudocima fullonia

Nom du responsable : Eudocima fullonia. Lise Leroy en a fait son sujet de thèse. Dans son élevage, les chenilles sont nourries avec des feuilles d’érythrines. Elle a même réalisé un cycle de reproduction complet en laboratoire. Une première. Mais le sujet de recherche porte sur les odeurs, celles qui vont l’attirer.
 

Le but est de voir si, dans le milieu naturel, on va avoir la même réponse qu'on a obtenue en laboratoire. C'est à dire pouvoir capturer les papillons dans le milieu extérieur avec les odeurs qu'on a fabriquées. 
- Lise Leroy, doctorante en écologie chimique à l’UNC

 
 

Pas de solution miracle

Certains résultats sont chargés de promesses. Mais foi de scientifique, il ne faut pas attendre UNE solution miracle. Ce ne peut-être qu’un ensemble de mesures, et peut-être des changements dans nos pratiques agricoles, qui protégeront efficacement du papillon piqueur. 

Un reportage de Bernard Lassauce et Claude Lindor :
©nouvellecaledonie