Citoyen mondorien est partie d’un principe. Que “la partie Sud du Mont-Dore subit depuis trente ans [des] exactions sur la route de Saint-Louis, avec des conséquences graves”. En particulier des caillassages récurrents, qui entraînent des dégâts matériels sur les véhicules pris pour cible, mais aussi des blessures physiques et des effets psychologiques.
Pour ACM, “les habitants du Sud du Mont-Dore ont une certaine perception des conséquences des exactions, sans pour autant pouvoir totalement les déterminer et les chiffrer”. Afin de réunir des données précises, l’association a demandé une enquête sur le sujet à l'institut Quidnovi. Mardi 28 novembre, son rendu a été présenté devant environ 200 personnes à la salle des Communautés, au Vallon-Dore.
On attendait avec impatience qu’ils puissent nous donner quelques résultats, afin de savoir où on allait, parce que c’est vrai qu’économiquement, on est très touchés.
Un professionnel du Sud Mont-Dore
La méthode
Comment a été menée cette étude ? Outre la compilation de données existantes (en termes de démographie, par exemple), il y a eu 547 réponses à un questionnaire, détaille l'association : 94 membres d'ACM, 105 résidents du Sud Mont-Dore ne faisant pas partie de l'association, trente Mondoriens installés dans la partie Nord, 318 personnes vivant ailleurs dans l'agglomération, 38 entreprises de la partie Sud et 32 basées ailleurs.
En cinq ans, 161 familles seraient parties
Selon le rendu, entre 2014 et 2019, la partie Sud du Mont-Dore a perdu 161 ménages de type couple avec enfants. Pour information, si l'on regarde les données globales des recensements, la partie du Mont-Dore au-delà de Saint-Louis comptait 11 491 habitants à celui de 2014. Contre 10 992, à celui de 2019. La différence est d'environ 500 personnes en moins entre 2014 et 2019. Autre précision pour le lecteur, on parle là des quartiers La Coulée, Vallon-Dore, Mont-Dore Sud, et Plum, ainsi que du secteur Lembi / Grand Sud / île Ouen.
Un secteur moins attractif
“Dans la mesure où il n’y aurait pas d’exaction sur la route de Saint-Louis”, est-il estimé, “32 % des habitants du Grand Nouméa hors Mont-Dore envisageraient d’habiter au Mont-Dore". Et "67 % des habitants du Mont-Dore Nord envisageraient d’habiter au Mont-Dore Sud". Mais 48 % des habitants de l’agglomération ne souhaiteraient "vraiment pas" habiter dans la partie Sud du Mont-Dore, malgré la perception d’un endroit qui offre des grands espaces verts et permet le sport ou les loisirs. Principales raisons invoquées : les blocages sur la route (à 66 %), les caillassages et dégradations de biens (à 47 %), ainsi que les embouteillages le matin et le soir (à 35 %).
Un immobilier déprécié ?
D'après cette analyse, l’écart de valeur moyenne par transaction immobilière, entre le reste du Grand Nouméa et le Mont-Dore est passé de - 8 % en 2011 à - 19 % en 2020. La valeur moyenne des biens immobiliers des habitants du Mont-Dore serait inférieure de 20 % aux biens de Nouméa.
Des entreprises affectées
Le nombre d’entreprises basées au Mont-Dore a, selon cette présentation, fortement progressé entre 2002 et 2010, avec une augmentation d’environ 200 entreprises par an. Après 2010, en revanche, "la chute a été constante pour passer à une augmentation de 50 entreprises en 2022". Dans la partie Sud du Mont-Dore, 48 % des entreprises déclarent avoir une activité réduite voire inexistante, contre 34 % dans la partie Nord de la ville. "Les secteurs d’activité qui subissent les conséquences des blocages sont, pour les habitants du Sud,
- les entreprises du Sud à 62 %,
- les entreprises en général à 45 %,
- les sous-traitants de l’usine du Sud à 38 %.
Et de conclure : "Le Sud du Mont-Dore a des difficultés pour faire venir les entreprises, ce qui génère un appauvrissement des forces vives dans la commune."
Le tourisme, "pas un facteur économique"
Les perturbations sur la route qui mène vers le Sud ont un impact sur les activités touristiques. Cette étude l'évalue à travers la fréquentation du parc de la rivière Bleue, par exemple. Elle a diminué de 24 % sur la période 2019-2020, en lien avec le conflit autour de l’usine Vale qui a notamment affecté le Grand Sud. Toujours selon cette étude, le taux de remplissage moyen des gîtes dans le secteur Sud a été de 53 % en 2019, 23 % en 2020, 19 % en 2021 (deux années marquées par la crise Covid) 47 % en 2022 et 54 % en 2023.
Et d'avancer : "À cause des caillassages et des exactions sur la route de Saint-Louis, 46 % des personnes interrogées hors Mont-Dore Sud ne vont que très rarement, voire jamais, dans le Grand Sud". Avant de conclure : "Malgré un potentiel fabuleux du Sud de la Nouvelle-Calédonie, le tourisme ne peut pas être un facteur économique pour la commune du Mont-Dore."
Une qualité de vie appréciée, mais "perturbée"
L'étude rapporte que pour 43 % des habitants du Sud Mont-Dore interrogés, les conditions de vie sont satisfaisantes par la qualité de l'air. Pour 37 %, par l'accès facile à la mer. Pour 28 %, par le calme et la bonne ambiance dans les quartiers. Mais que "cette qualité de vie est perturbée pour 57 % par la distance, les trajets et les transports ; pour 50 % par les agressions ; et pour 40 % par le manque d'équipements, d'infrastructures et de services". Autre donnée : 37 % des habitants du Mont-Dore Nord qui ont répondu iraient passer une soirée au Mont-Dore Sud sans hésiter, contre 16 % pour les gens vivant ailleurs dans l'agglo.
J’habite du coté du Mont-Dore Nord. Ma fille habite le Sud et on a des gros soucis, on ne peut jamais pouvoir se voir quand on veut.
Une participante à la restitution
Cette deuxième route tant réclamée
Les différentes perturbations (blocages, inondations, accidents…) que les automobilistes subissent sur la RP1 gênent d'autant plus que c'est le seul axe desservant la partie Sud du pays. Citoyen mondorien n'en finit pas de militer pour la construction d'une "route de désenclavement". D'après les personnes sondées, "82 % des Mondoriens du Sud et 60 % des autres déclarent qu'il est indispensable de faire cette deuxième route. 85 % des Mondoriens du Sud et 74 % des autres déclarent qu'[elle] est d'intérêt général."
Dernier projet évoqué, le viaduc de quatre kilomètres, qui a été estimé à soixante milliards de francs. Selon ACM, l’Etat et la province sud se sont accordés pour financer une étude géotechnique courant 2024. L’association compte retravailler avec les institutions pour voir qui pourrait financer un tel projet, une fois le coût une nouvelle fois évalué.