Cette mesure peu utilisée qui protège les victimes de violences

L'ordonnance de protection a été évoquée lors de la table ronde du 8 mars à la cour d'appel.
Il existe une mesure qui permet de protéger les victimes de violences conjugales. Une ordonnance de protection, valable pour quatre mois et applicable en Nouvelle-Calédonie depuis 2010. Pourtant, elle est rarement utilisée. Eléments d'explication. 
 
Le sujet a été abordé ce 8 mars. Pour la Journée internationale des droits des femmes, la cour d'appel de Nouméa a proposé une table ronde inédite sur le thème: «De la plainte au jugement, le parcours judiciaire d’une victime de violences». Les intervenants dans le cheminement d’une femme victime de violences conjugales, par exemple, ont expliqué leur mission d’écoute et d’accompagnement. 
 

Pour les personnes de droit commun

Parmi les outils à leur disposition, l'ordonnance de protection. Cette mesure civile d’urgence concerne les personnes de droit commun, mariées, pacsées ou en concubinage. Applicable en Calédonie depuis près de dix ans, il y est rarement fait recours. Cette ordonnance permet de protéger une victime de violences pendant quatre mois.
 
 

Attribution du domicile familial

Jean-Jacques Gilland (photo ci-dessus) explique de quelle façon. «Ne serait-ce que par l'interdiction de contact avec la personne qui l'a agressée», développe le magistrat coordonnateur de la chambre du pôle famille au tribunal de première instance. «Ne serait-ce, aussi, que par l'attribution du domicile familial. Avec aussi la fixation de la résidence des enfants, ou des modalités financières de qui va payer le loyer, qui va assurer l'entretien des enfants au quotidien...»
 

Le temps de la réflexion

La victime a le temps de réfléchir, et de préparer un éventuel dépôt de plainte. «Une femme m'a dit: "Il ne me bat plus, il ne me donne que des gifles", relate Jean-Jacques Gilland. Ça démontre qu'il y a un degré d'acceptation d'une certaine violence, qu'il y a une grande méconnaissance de la loi. Il y a aussi peut-être un manque de travail de la part des associations d'aide aux victimes.»
 

Pas pour les femmes de statut coutumier

Un vrai problème existe: cette ordonnance de protection ne s’applique pas aux victimes de violences qui relèvent du statut coutumier. «Il faut impliquer les autorités coutumières, mais très sérieusement», insiste Sarah Wabete, assistante sociale au centre d’accueil des femmes en difficultés de la province Nord. «Et c'est pour ça que depuis l'année dernière, l'association de la Case juridique kanak intervient sur la côte Est. Ils sont aussi compétents pour informer les victimes, ou le public, sur le droit coutumier quel que soit le problème.»
 
Sarah Wabete et Julie Beurois.
 

Prendre en compte la culture kanak

La seule solution pour ces femmes est de sortir de là où elles vivent. La mesure de protection, si elle s’appliquait, éviterait à la victime de quitter le domicile, et de se retrouver en foyer ou dans la famille. «Il faut aussi prendre en compte l'aspect culture kanak, souligne Sarah Wabete. En règle générale, dans la société kanak, quand une femme arrive dans une tribu, elle arrive d'ailleurs. Elle vient chez l'homme. Donc, oui, il faut l'extraire, et elle demande à être extraite. Pour éviter les représailles, la honte, tout conflit avec la belle-famille ou le clan...»
 

En pratique

Comment l’ordonnance de protection fonctionne-t-elle, concrètement? Un courrier adressé au greffe des affaires familiales suffit pour que les conjoints soient convoqués. Mais ce courrier doit être accompagné de documents tels qu'un certicat médical, une attestation de voisins ou de la famille qui justifie de la vraisemblance des violences et de la mise en danger d’autrui.