Depuis samedi 1er juin midi, le port est à l'arrêt. En cause : le non-renouvellement du contrat de Brice Kiener, en poste depuis avril 2023. Sans responsable juridique, le port se retrouve paralysé. Mais il semblerait que le directeur soit remplacé dans les prochains jours, selon le président du conseil d'administration Gilbert Tyuienon. Une décision qui n'est pas soutenue par la Fédération des industries (FINC), ni par la Chambre de commerce et d'industrie et pas même par le membre du gouvernement en charge de l'économie de la mer, Christopher Gygès. Ce dernier siégeant au côté de Gilbert Tyuienon au gouvernement, mais aussi au conseil d'administration du port. Un mail a également été envoyé par le directeur destitué samedi. Celui-ci détaille les implications de l'arrêt de son contrat. Enfin, Gilbert Tyuienon, répond par voie de communiqué, ce dimanche.
NC la 1ère fait le point en retraçant le fil des événements.
1 Le port à l'arrêt
Depuis l'annonce du non-renouvellement du contrat du directeur du port autonome, Brice Kiener, toutes les activités du site sont à l'arrêt depuis ce samedi 1er juin à midi. Deux navires étaient en attente de déchargement et les conteneurs n'ont pas pu être livrés car aucun transport routier ne peut rentrer au port. Une situation très préoccupante dans le contexte de la crise que traverse le Caillou.
2 Le directeur remplacé
Le directeur du port autonome est, selon les règles en vigueur, nommé par le président du conseil d'administration, actuellement Gilbert Tyuienon, l'un des porte-paroles du gouvernement et également premier vice-président de l'Union Calédonienne. Contacté par NC la 1ère samedi 1er juin dans l'après-midi, Gilbert Tyuienon indique que le contrat de l'actuel directeur arrivait à son terme et que son successeur serait désigné en début de semaine.
3 Soutien de la FINC et de la CCI à Brice Kiener
Dès vendredi 31 mai, avant l'annonce officielle du non-renouvellement du mandat de Brice Kiener, la Fédération des Industries de Nouvelle-Calédonie (FINC) tenait à saluer les réussites du directeur du port autonome et de ses équipes. Dans ce courrier, le président de la FINC défend "la nécessité de le conforter à ce poste ". "S'il advenait qu'une décision contraire soit prise, la FINC mais aussi l'ensemble du monde économique et les Calédoniens, pourraient comprendre que seuls les clivages politiques gouvernent la Nouvelle-Calédonie au détriment du bien commun ", est-il écrit.
Samedi soir, la Chambre de commerce et d'industrie dénonçait les conséquences de la paralysie du port par la voie d'un communiqué. Pour la CCI, c'est "la mise en péril immédiate de l'approvisionnement de tout le territoire". "Dans cette période de crise extrêmement difficile, il est d'autant plus important d'assurer une stabilité du fonctionnement et la continuité de l'activité du port, sans rupture aucune".
4 Le directeur aurait pourtant été renouvelé, selon un membre du gouvernement
Dimanche 2 juin au matin, coup de théâtre. Christopher Gygès, membre du gouvernement en charge de l'économie de la mer, et membre du conseil d'administration du port autonome, annonce que le contrat de l'actuel directeur Brice Kiener, a en fait été renouvelé pour trois mois, le 22 mai dernier "afin d’éviter de se retrouver dans la situation que nous connaissons aujourd’hui", est-il écrit. Brice Kiener devrait donc rester en poste jusqu'au 22 août. Mais "pour que cette décision soit effective, le membre en charge des transports, président du conseil d’administration, Gilbert Tuyienon, doit contresigner cet arrêté, ce qu’il refuse de faire", écrit Christopher Gygès qui siège au côté de Gilbert Tyuienon au gouvernement. Une institution qui se voulait pourtant unie malgré les différences politiques avait-il été annoncé lors de la dernière conférence de presse consacrée à l'économie.
5 Une lettre de Brice Kiener explique les conséquences
Dans un mail que s'est procuré NC la 1ère, écrit par Brice Kiener samedi 1er juin, il explique les conséquences de cette décision. L'ancien directeur rappelle que "le président du conseil d'administration est seulement compétent pour prendre les décisions individuelles concernant le directeur, une fois nommé par arrêté du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie". L’absence de directeur engendre selon lui différentes problématiques comme le fait que le conseil d’administration devra "se réunir pour autoriser la conclusion de tous les actes, contrats, traités et marchés, sans pouvoir, pour autant, les signer" . En effet, le port autonome de Nouvelle-Calédonie "est structuré de manière bipartite avec un organe délibérant (CA) et un organe dirigeant (directeur), l’un ne fonctionnant pas sans l’autre".
Toujours selon Brice Kiener, dans le cadre d’une délégation de pouvoir, donné par le conseil d’administration le directeur "assure le fonctionnement général de l’établissement et passe en son nom tous actes, contrats, traités et marchés ". Il a également des attributions qui lui sont propres. Il peut notamment "déléguer sa signature à tout agent du port autonome de Nouvelle-Calédonie, ce qui signifie que la fin du mandat du directeur met automatiquement fin aux délégations de signature qu’il a pu consentir."
Selon le directeur destitué, "la situation inédite dans laquelle se trouve l’établissement présente de nombreux risques administratifs et juridiques." Il détaille les conséquences : "aucun mouvement de navires alors qu'actuellement deux sont accostés, aucun déchargement de marchandises (…) , aucun mouvement de barge" ce qui induit que le ravitaillement pour les populations sera plus compliqué et enfin, "la fin des mouvements de camion et engins pour le déblaiement des voies de circulation."
6 La réponse de Gilbert Tyuienon
"Le président du Conseil d’Administration du Port Autonome de la Nouvelle-Calédonie veut apporter un démenti à propos d’informations évoquant une paralysie du fonctionnement du port", annonce Gilbert Tyuienon, dans un communiqué, ce dimanche 2 juin en fin de journée. Pour lui ce sont des "informations erronées".
"Il est injustifiable et irresponsable d’affirmer qu’un tel changement entraîne une paralysie de l’établissement. Il est tout autant ridicule de faire croire que la pérennité de l’action du port pourrait dépendre d’une seule personne. Ce changement de direction n’entraînera aucune conséquence sur le fonctionnement de l’installation portuaire", annonce-t-il. Et d'ajouter : " particulièrement dans le contexte actuel, le conseil d’administration du port et les agents qui opèrent sur l’espace portuaire, s’investissent et font preuve de vigilance pour que le port autonome de Nouvelle-Calédonie poursuive sa mission de service public dans l’approvisionnement du pays."