Le festival Caledonia +687 célèbre les 33 ans de la poignée de main entre Jean-Marie Tjibaou et Jacques Lafleur

Le festival Caledonia +687 a lieu tous les ans, place de la Marne, au centre-ville de Nouméa. Objectif : célébrer toutes les communautés locales et rendre hommage à la poignée de main entre Jean-Marie Tjibaou et Jacques Lafleur. Ce samedi 26 juin, cet évènement historique soufflait ses 33 bougies. 

Le festival, créé par l'artiste Tim Sameke, célèbre cette année, le 33ème anniversaire de la poignée de main entre Jean-Marie Tjibaou et Jacques Lafleur.

Ce samedi 26 juin, place de la Marne, on se serait presque cru à une cérémonie officielle à l’ouverture de l'évènement. Haut-commissaire, président du gouvernement, deux vice-présidents de la province Sud et la maire de Nouméa : personne ou presque ne manquait à l’appel pour commémorer la célèbre poignée de main. Pourtant, il s'agit bien d'une initiative privée. "Il y a la fête de l'avocat, la fête de la vanille, il y a une fête pour tout en Calédonie, mais on ne commémore jamais le 26 juin. Alors on a pris les choses en main", explique Tim Sameke.

 

Il y a plein de fêtes en Nouvelle-Calédonie et on ne commémore jamais le 26 juin, pourtant, grâce à cela aujourd'hui, la paix est partout, la joie est partout, grâce à cette poignée de main.

Tim Sameke, artiste et organisateur de l'évènement


"Continuer à oeuvrer ensemble"

De son côté, la maire de Nouméa l’assure : dans un an, pour le 34ème anniversaire, une statue commémorant la poignée de main se dressera sur la place de la Marne. De là à rêver d’une cérémonie officielle, il n’y a qu’un pas. Warren, 32 ans, aimerait que l’événement soit célébré officiellement. "Mon père est un ancien du RPCR, ma mère c'est les Foulards rouges donc ça fait trente ans, et j'ai été baigné dans les accords de Matignon, à l'école maternelle. On a connu cette poignée de main et nous devons continuer à oeuvrer ensemble, pour le changement et la paix"  raconte le jeune homme.

Dans l'attente d'un jour officiel

Alors cette date du 26 juin sera-t-elle un jour célébrée officiellement ? C’est en tout cas le souhait assumé de Thierry Santa, président du 16ème gouvernement. "J'ai formulé ce voeu, qu'un jour, cette date devienne officielle, pour toute la Calédonie. Le choix de l'histoire a été différent mais là, en l'occurence, je parle de l'avenir et il faut peut-être trouver ces symboles qui nous rassemblent et qui fassent comprendre à tout un chacun, que la meilleure façon de cheminer, c'est de le faire tous ensemble" explique-t-il.

33 ans après la poignée de main, la balle est dans le camp politique. Seules les institutions calédoniennes ont le pouvoir d’instituer une telle cérémonie officielle. En attendant, la huitième édition de ce festival se poursuit ce dimanche 27 juin, toujours avec des danses et des chants, de toutes les communautés du territoire.


Le reportage de Brigitte Whaap et Claude Lindor.


La poignée de main décryptée

Nous sommes le 26 juin, date anniversaire de la signature des accords de Matignon-Oudinot. En 1988, cet accord met fin aux affrontements en Calédonie et ouvre une nouvelle page d'histoire. Cette réconciliation est marquée par la poignée de main entre le loyaliste, Jacques Lafleur et l’indépendantiste, Jean-Marie Tjibaou. Aujourd’hui, est-ce que le sens de cet accord est toujours le même ? 

Cette poignée de main a un sens immédiat. Elle marque l’entente entre les deux hommes forts de cette période sur le territoire par la signature d’un accord qui met fin à l’escalade de la violence. Dans le même temps, pour l’historien Ismet Kurtovich, les deux visionnaires que sont Jacques Lafleur et Jean-Marie Tjibaou, ont voulu faire passer un message fort, faire que le compromis soit privilégié. "Une poignée de main, ça signifie que les Calédoniens s'engagent à trouver un compromis sur leur désaccord statutaire important, dans l'avenir" 

Plus de 33 ans ont passé. La Calédonie sera appelée le 12 décembre prochain à une troisième consultation. Plusieurs questions se posent aujourd’hui : est-ce que cette poignée de main a toujours le même sens qu’ont voulu ses précurseurs ? Nos élus politiques s’inscrivent-ils dans cette démarche ou ce sens-même a été quelque peu dilué ? "Si on écoute attentivement les discours des uns et des autres, lorsque chacun avance ses divergences, il conclut toujours en disant qu'une solution doit être trouvée dans la discussion et dans le compromis, à chaque fois, même dans les campagnes référendaires"

L’historien calédonien rappelle que le compromis entre les deux leaders politiques apporte une phase référendaire. Ainsi en cas de "Oui" à l’indépendance, la pleine souveraineté s’applique et en cas de "Non", une discussion statutaire doit s’engager. Une étape inévitable.