"On vit au jour le jour" : la débrouille d'une famille expulsée qui a trouvé refuge dans une voiture de location à Nouméa

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C’est une situation dramatique que vit une famille de six personnes, avec quatre enfants, dont un bébé de neuf mois. Expulsés de leur logement en décembre dernier, ils dorment depuis près d’un mois dans une voiture louée.

Depuis près d’un mois, un couple et quatre de leurs enfants vivent dans un petit véhicule loué. "Je dors sur le fauteuil conducteur, décrit Bertrand* et les deux grands s'allongent sur la banquette." La maman, Germaine*, est "avec les deux petits sur le siège passager." Le mari était patenté et faisait des petits chantiers. Mais la crise consécutive aux émeutes a plongé la famille dans une situation très précaire.

Le ménage a été expulsé de son logement de la Sic à Tuband en décembre dernier, parce qu’il ne pouvait plus payer son loyer. "On avait négocié pour rester jusqu'à la fin de la période scolaire, afin que les enfants ne soient pas perturbés, explique Bertrand. À la base, c'est ma femme qui avait ce logement depuis plus de dix ans."

Au parc pour la toilette, avant l'école

À la rue, la petite famille est restée quelque temps chez des proches. Au départ ils étaient huit : six enfants et le couple. Les deux plus grands ont été confiés à la famille. Restent avec leurs parents les plus petits âgés de douze, onze, deux ans et un bébé de neuf mois. "On change d'endroit tous les jours, parce que la police tourne le soir. Le matin, je réveille tout le monde à 5 heures, raconte Bertrand. On va dans un parc pour qu'ils puissent faire leur toilette, pour arriver présentables à l'école car ils ne peuvent pas prendre de douche. Quand il fait beau, on va à la rivière."

On se débrouille comme on peut, on vit au jour le jour, mais on ne les laisse pas sans manger, ça c'est sûr.

Germaine, mère de six enfants à la rue

Les parents n'ont pas pu acheter ce dont avaient besoin les deux collégiens pour la rentrée des classes. "Je remercie grandement et du fond du cœur l'UGPE, qui nous a offert les fournitures scolaires, salue Germaine. Ils n'ont pas encore d'uniforme. Ils ne mangent pas à la cantine : soit ils prennent quelque chose le matin, ce qu'on a sous la main, sinon on passe quand on peut... On leur a expliqué qu'on doit courir à droite et à gauche pour trouver des solutions. Chercher du travail ou frapper aux portes des organismes pour trouver un toit. On se débrouille comme on peut, on vit au jour le jour, mais on ne les laisse pas sans manger, ça c'est sûr."

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Aucune aide concrète des institutions

Malgré leurs démarches auprès des institutions, aucune aide concrète ne leur a été apportée. Seul le Sénat coutumier a répondu à l'appel. "Ils nous ont envoyés vers des associations qui nous ont donné des denrées alimentaires". Et des employées du Sénat coutumier se sont cotisées, et leur ont remis "une enveloppe qui nous a permis de payer la voiture, raconte Germain, des trémolos dans la voix. Ils se sont engagés à nous appeler tous les jours, à prendre de nos nouvelles et essayer de trouver une solution."

La location de la voiture prend fin cette semaine. Et il faudra trouver un nouveau lieu pour dormir. "On a eu une assistante sociale au téléphone après avoir parlé avec le directeur d'un foyer, qui pouvait nous accueillir. Mais elle a dit qu'on n'était pas éligibles, parce qu'on ne travaille pas", déplore Germaine.

Le couple loue un local dans le grand Nouméa depuis novembre dernier, pour en faire un snack, mais ne peut plus payer le loyer. Le lieu doit être rendu à son propriétaire. Le père de famille avoue même avoir volé pour pouvoir nourrir les siens. Lui et sa femme cherchent activement un emploi, et envisagent de s’inscrire à des concours pour offrir à leurs enfants un toit et une vie meilleure.

* Les prénoms ont été modifiés