Alors que la discipline peine encore à rassembler par-delà les ego et les générations, certains accompagnateurs tentent de structurer la scène, offrant des outils aux jeunes pour se lancer.
Assurer la transmission du flambeau
Dès 2001, DJSE est impliqué dans le crew Vandal Position, avec Ybal Khan notamment. À la barre du "label" Kassos devenu Keskiya Prod, le beatmaker assume progressivement un rôle en coulisses. En 2006 puis 2009, deux mixtapes "Interdit à la Vente" rassemblent les voix du moment. "L’idée n’était pas de signer tous les artistes, mais de proposer un disque sur lequel ils pouvaient venir et montrer qu’ils étaient là. Par cette démarche on montrait ce qu’on faisait à la maison. Ça n’est pas que ça nous coûtait rien, mais on se finançait avec les concerts" se souvient le DJ, qui revendique une certaine "débrouille" en écho à l’état d’esprit indépendant du hip-hop.
Par la suite, cette "photo exhaustive du mouvement" a été prise par un nouvel acteur dans le jeu : l’association Dix Vers Cités, qui gère le studio d’enregistrement du Rex. Depuis 2015 sortent les mixtapes Ina Di Rex, au rythme d’une par an. Elles offrent à la fois une tribune pour la jeunesse des quartiers et un espace de promotion. Rasta Vins, lui-même rappeur et producteur, officie comme ingé son et formateur. "Il y a des jeunes qui m’appellent ‘grandi’, c’est une manière de dire ‘grand frère’. Alors qu’à la base je suis juste quelqu’un qui fait son taff, mais avec le côté un peu social ça crée cette proximité avec les jeunes. Au contraire, parfois il y en a avec qui ça ne passe pas, ils ne reviennent plus. J’essaie d’être juste et honnête avec eux, c’est important. Je pense qu’en étant soi-même déjà, tu apportes beaucoup de choses aux gens."
Pour DJSE, la tendance à se reposer un peu trop sur l’offre du Rex plutôt que de chercher à développer ses propres capacités d’enregistrement, pourrait à terme pénaliser certains artistes. Mais la dynamique est en train de changer, différents crews affichant la volonté de gagner en autonomie.
"La scène locale en hip-hop est très jeune, je ne sais même pas si les trois quarts des artistes ont plus de 25 ans. On parle de la old school, mais on est quatre en old school. Dans 10 ans, quand tu reviendras faire le bilan des 40 ans du hip-hop calédonien, y aura peut-être beaucoup plus de matière en albums, en artistes matures. C’est l’évolution logique des choses."