“Je savais que j’étais obèse. Je me sentais lourde, j’avais du mal à faire mes lacets, ce n'est pas normal, mais je fermais les yeux”, raconte Malia. Pendant six mois, elle a été suivie par un psychologue, une diététicienne, une infirmière, des médecins et un éducateur en activités physiques adaptées. Comme une dizaine d’autres habitants de Païta. Tous intégrés au programme obésité de proximité (POP), lancé par la province Sud à titre expérimental.
Quand elle en a entendu parler, Malia a eu un déclic. Elle a réalisé qu’elle avait peur. “De ne pas vivre longtemps, de ne pas voir mes enfants grandir, de ne pas connaître mes petits-enfants.” Car elle le sait : le surpoids “engendre des maladies”. Diabète, problèmes cardiovasculaires, du foie et de la vésicule biliaire, douleurs articulaires, complications respiratoires... “On l’apprend à l’école.”
"Maintenant, j'arrive à m'aimer"
Le programme est gratuit, l’occasion d’essayer de changer ses habitudes, se dit-elle. De trouver comment elle en est arrivée là. “J’ai compris”, assure-t-elle. Comme presque tous les autres volontaires, elle s’est oubliée. “Pour mes enfants d’abord. Quand je vois leur scolarité, je suis fière.” Mais elle a découvert que s’occuper de soi et de sa famille n’est pas incompatible. “Je suis fière de la maman que je suis et de la femme que je suis devenue”. Loin de la Malia de décembre, qui refusait d’être prise en photo, “timide, qui n’a pas confiance en elle, qui a honte. Maintenant j’arrive à m’aimer”.
“Elle a envie de mettre en valeur sa beauté”, rit Lonisa, une autre participante. Les deux sont femmes de ménage. Un métier parfait pour se bouger et pour mesurer son état de santé. “Avant, j’étais essoufflée en arrivant au 3e étage. Maintenant, je peux courir pour y aller”, observe Malia. Ensemble, elles ont décidé que les escaliers seraient des squats. Le matériel, des poids. Et passer la serpillère, l’occasion de faire des pas chassés. “On n’est pas folles, on profite de la vie !”
Un voyage à la clé du "mieux-manger"
Et la vie a changé, avec POP. À un point "inimaginable". Malia a entraîné toute la famille. “Mon mari fait des exercices avec moi le soir. Il privilégie la marche à la voiture. Notre vie sexuelle est plus épanouie. Tous les week-ends, on va se balader, on sort de la maison, on voit de nouvelles choses. Et tous les mois, on s’équipe en matériel de sport.” Dernier achat en date : un sac de frappe pour l’un des deux fistons.
En préférant les fruits et légumes aux plats préparés et aux paquets de gâteaux, ils ont fait des économies. “On va pouvoir partir en voyage tous ensemble.” Une première en dix-sept ans. Direction Tahiti, où vivent le frère et la sœur de Malia. Elle en est certaine : "Je ne redeviendrai pas la Malia d’avant”.
"Ça va être facile de continuer"
Le programme s’arrête officiellement ce jeudi mais “ça va être facile de continuer”. Son poids vient de descendre à deux chiffres. “Ce n’était pas ma priorité. Je voulais surtout réapprendre à bien manger mais là, ça me motive encore plus.” Et puis, elle pourra compter sur son mari, sur les autres participants, devenus des amis, et sur l’équipe médicale et paramédicale de la province Sud. Des suivis continueront à être assurés. Pour le bien des patients et de la science. “Ça nous permettra de comprendre les raisons des échecs, s’il y en a”, explique Valérie Annel, coordinatrice du programme.
L’expérimentation a en tout cas réussi : le programme va être développé à Kaméré et à Thio à partir de la première semaine de juillet et une deuxième session va être ouverte à Païta, en août.