Les élus Loyalistes et Rassemblement le crient de plus en plus haut et fort : pour eux, la répartition des sièges au Congrès de Nouvelle-Calédonie est injuste et doit être révisée. Actée par les accords de Matignon et d’Oudinot, en 1988, elle accorde 32 sièges à la province Sud, 15 sièges à la province Nord et 7 à la province des Îles.
Ce découpage volontairement discriminatoire visait à "ramener les Kanak, qui étaient à la périphérie, vers les institutions”, rappelait Aloisio Sako, doyen du Congrès, après le départ des élus Loyalistes et Rassemblement de l’hémicycle, le 21 mars.
Des discriminations y compris au niveau national
Mais les discriminations de représentation ne sont pas propres à la Nouvelle-Calédonie. Au niveau national, il en existe, créées elles aussi volontairement. Par exemple, un député compte en moyenne 120 000 habitants dans sa circonscription. Mais, aux dernières élections, en 2022, celui de Saint-Pierre-et-Miquelon en avait un peu moins de 6 000. Celui de la 5e circonscription de Loire-Atlantique, 167 177, soit 25 fois plus. Et si l’on s’en tient à la France hexagonale, il y a 2,5 fois plus d’habitants par député dans la 5e circonscription de Loire-Atlantique, la plus peuplée, que dans la 2e du Cantal, la moins peuplée avec 62 753 habitants.
C'est le même écart qui prévaut entre la province Sud et la province des Îles.
Si de telles disparités sont tolérées et même instaurées par l’Etat, c’est pour permettre à chaque territoire d'être représenté, même s'il ne compte que très peu d'habitants. Il s'agit de tenir compte “d'impératifs d'intérêt général”, précise le code électoral. Pour maintenir une certaine proximité entre l’élu et la population, il est par exemple admis que chaque département français compte au moins deux députés. Sans cela, les distances à parcourir pourraient empêcher le bon exercice du mandat d’élu.
Combien d’électeurs inscrits par élu ?
Une logique transposable à la Nouvelle-Calédonie. Carine David, professeur de droit public à l’université d’Aix-Marseille, l'a expliqué lors de conférences données à Poindimié, Koné et Nouméa la semaine dernière.
Si l’on rapporte maintenant le nombre d’électeurs au nombre d’élus, l’écart se resserre entre les provinces calédoniennes. En partie parce que des personnes des îles et du Nord restent inscrites dans leur commune d'origine, alors qu'elles sont parties travailler en province Sud.
En 2023, 115 261 personnes étaient inscrites sur la liste électorale provinciale en province Sud ; 41 460 en province Nord et 21 653 en province des Îles. Résultat : un élu de province Sud représente 3 601 électeurs inscrits. C’est 1,3 fois plus qu’un élu de province Nord.
Un écart bien moins important que dans l’Hexagone. Le député de la 3e circonscription de Vendée, qui enregistre le plus d’inscrits (135 251), a ainsi trois fois plus d’électeurs que celui de la 2e du Territoire de Belfort (46 494). Celui de la 2e circonscription de Nouvelle-Calédonie en a lui près de 13 fois plus que son voisin de Wallis-et-Futuna.