Les statistiques confirment le ressenti des Calédoniens : qu'est-ce qu'il a plu... Entre juin et août, Météo-France NC a observé une saison fraîche non pas exceptionnelle, mais très exceptionnelle ! Du côté des précipitations comme du mercure. Un point de situation était dressé à Nouméa, mercredi 31 août. Voici ce qu'on peut en retenir.
+ 130 % de pluies
Ces trois derniers mois, les pluies ont été exceptionnellement intenses en Calédonie, avec 130 % de précipitations en plus que la normale évaluée pour la période 1991-2020. Des records de record ! "Au cours de cette saison fraîche 2022, on a enregistré des pluies records, avec des cumuls deux à trois fois supérieurs aux valeurs habituelles", détaille Thomas Abinun, climatologue au centre Météo France de Nouvelle-Calédonie. "On a des pluies non seulement records, mais en plus, des records qui dépassent largement ce qu'on avait connu jusqu'à présent en saison fraîche."
Après une saison chaude déjà remarquable par ses pluies, la saison fraîche 2022 est la plus arrosée depuis 1971.
Météo-France Nouvelle-Calédonie
+ 1,3 °C en journée et + 2,6 °C la nuit
Le mercure a également grimpé plus que d’ordinaire, durant ces trois mois. Les anomalies de température se sont intensifiées à partir de mai. De quasiment deux degrés au-dessus des normales.
- Anomalie de la température maximale en juin, juillet et août : +1,3 °C, soit une moyenne de 25,9 °C en journée.
- Anomalie de la température minimale en juin, juillet et août : + 2,6 °C, soit une moyenne de 19,4 °C la nuit.
"Ce qui représente là encore un record, et un record bien au-dessus aussi de tout ce qu'on avait connu jusqu'à présent en saison fraîche", résume le climatologue. Ajoutons que pendant la saison chaude 2021-2022, la Calédonie a déjà atteint des écarts de température de +0,9 °C par rapport à la normale.
La saison fraîche 2022 en Nouvelle-Calédonie est la plus chaude jamais observée depuis 1971.
Météo-France NC
La combinaison de plusieurs facteurs
Selon la synthèse établie par les services météo, "l’abondance des pluies et les excès de chaleur observés ces derniers mois peuvent s’expliquer par la combinaison de plusieurs facteurs climatiques" :
- la Niña, qui "crée un environnement plus humide et plus chaud au voisinage de la Nouvelle-Calédonie".
- le changement climatique, qui "renforce les anomalies chaudes de La Niña sur le Pacifique Sud-Ouest".
- une anomalie de température de l’océan Pacifique à hauteur de la Calédonie, qui "a atteint au cours du trimestre juin, juillet, août 2022 une valeur record inédite".
- et un environnement exceptionnellement instable observé depuis plusieurs mois.
Elle fait quoi, La Niña ?
Attardons-nous sur la fameuse Niña. Le phénomène ainsi dénommé désigne un renforcement
des alizés équatoriaux, couplé à un déplacement des eaux chaudes vers l’Ouest du Pacifique. Météo-France NC décortique son impact :
- un environnement océanique plus chaud.
- une atmosphère plus chaude et plus humide.
- un renforcement des précipitations.
- des températures atmosphériques plus élevées, même hors réchauffement climatique.
- un alizé en retrait, au profit d'un temps tropical instable plus fréquent.
Inhabituel qu'elle perdure ainsi
Avec cette remarque : "La Niña est un phénomène qui, en principe, se met en place durant la saison
chaude australe. Il est peu habituel que le phénomène perdure durant l’hiver austral." Cette année, elle a connu un regain d'intensité inattendu entre mars et mai, puis un maintien durant la saison fraîche malgré un affaiblissement en mai et en juin. Et "les anomalies de température de l’océan Pacifique en juillet témoignent d’une Niña toujours active actuellement", de même que "la présence de vents d'Est toujours anormalement forts sur l’océan Pacifique équatorial en juillet".
Les indicateurs océaniques et atmosphériques montrent que La Niña est en place depuis octobre 2021 et que ses 'mécanismes climatiques d’activation' sont toujours en marche.
Météo-France NC
Réchauffement climatique
Mais comme signalé plus haut, La Niña ne serait pas la seule responsable du temps si chaud et pluvieux au cours des derniers mois. Météo-France NC signale que "la température de surface de l'océan Pacifique Sud-Ouest à l'entrée dans la saison fraîche (en mai) n'a jamais été aussi élevée qu'en 2022. Le changement climatique pourrait donc être responsable en partie de l'environnement chaud et humide qui sévit actuellement chez nous."
Et ce n'est donc pas tout. "Entre mai et juillet 2022, l’anomalie de température de l’océan a augmenté à une vitesse qui ne peut être expliquée par le changement climatique, relate Météo-France NC : entre mai et juillet 2022 (ainsi qu’en août), l’anomalie s’est encore amplifiée, atteignant désormais plus de 2,0°C par rapport la normale de saison !" Or, "il est difficile d’expliquer ce rapide réchauffement hivernal, qui peut trouver son origine par la combinaison de diverses influences climatiques."
L’été sera très chaud et très pluvieux
Pour résumer, il faut s'attendre à une fin d'année 2022 et un début 2023 plus chauds et davantage pluvieux que la normale.
Selon Météo-France NC, les modèles internationaux prévoient tous un renforcement de La Niña à partir de ce mois de septembre.
Elle devrait se maintenir jusqu’en fin d’année au moins, et probablement jusqu’à la fin de la prochaine saison chaude. Ce qui provoquerait une troisième saison chaude consécutive sous le signe de La Niña.
Météo-France NC
Ce qui devrait aussi persister, c'est la forte anomalie positive de température océanique, sur le Pacifique Sud-Ouest, jusqu'en janvier. Cela rime avec conditions plus chaudes et plus humides.
Maintien attendu, également, des fortes anomalies de pression atmosphérique sur cette zone, là aussi jusqu'en janvier, "tandis que les hautes pressions devraient être rejetées vers le Sud". Traduction : "les types de temps tropicaux et instables (humides et chauds) devraient rester privilégiés durant toute cette période sur la Nouvelle-Calédonie."
Synthèse radio...
Une saison fraîche anormale, reportage de Valentin Deleforterie
…et synthèse télé, par Natacha Lassauce-Cognard et Lina Waka-Ceou :