Au lendemain du comité directeur des membres de l’Union calédonienne, réunis ce samedi 22 avril à Koumac, Sonia Backès souhaite d’emblée commenter le discours du président du parti indépendantiste. "Tout le monde attend une réaction aux propos insupportables tenus ce weekend par Daniel Goa, en ouverture du comité directeur de l’UC. Nous avons décidé, avec les Loyalistes, notamment Nicolas Metzdorf et Gil Brial, de saisir le procureur de la République sur la base des appels à la violence, à la sédition mais aussi aux appels aux puissances étrangères." Et de poursuivre, "On avait l’habitude des discours provocateurs mais je crois que Daniel Goa a dépassé un cap. Et ce n'est pas ce qu’attend la majorité des Calédoniens."
Des référendums demandés par les indépendantistes
Ces derniers jours, Sonia Backès rappelait qu’il n’était pas du rôle de l’Etat de faire des allers-retours entre les uns et les autres, et que l’on était "arrivé au bout de l’exercice des bilatérales, il faut maintenant qu’on arrive à se parler entre personnes qui vivent en Nouvelle-Calédonie". Maintenant que les trois référendums prévus par l'Accord de Nouméa sont passés, Sonia Backès réaffirme la nécessité de passer à la suite, notamment à la tenue de discussions en trilatérales. Mais les indépendantistes sont pour l'heure fermés à cette idée. La cheffe de file des Loyalistes s’interroge sur leur stratégie. "Quel est le sens de cette position ? Ils considèrent que nous n’avons pas notre place sur cette terre ? Nous ne sommes pas aptes à discuter de l’avenir, contrairement à eux ? Quelle est leur vision de l’avenir ? C’est une vision où nous sommes tous ensemble ou ils sont tout seuls ? Il va falloir qu’ils s’expliquent là dessus."
S’agissant du référendum du 12 décembre 2021, jugé illégitime par les indépendantistes et organisé "unilatéralement selon le président de l’UC", Sonia Backès "rappelle que, contrairement à ce qui est dit par Daniel Goa, le troisième référendum ne leur a pas été imposé. Ce troisième référendum a été demandé par les indépendantistes, 25 signatures dont la sienne, et il n’a jamais retiré cette signature (…) Maintenant il faut que l’on passe à autre chose, à savoir la signature que les uns et les autres ont mis sur l’Accord de Nouméa. Un accord qui prévoit que tous les partenaires se retrouvent, les indépendantistes, les non indépendantistes et l’Etat pour examiner la situation ainsi créée. Nous les attendons autour de la table."
La perspective des élections provinciales
Se pose aussi la question du calendrier, établi par le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer. Gérald Darmanin avait annoncé qu’à l’issue de cette série de bilatérales à Paris, se tiendraient des négociations "tripartites" au mois de mai, mois durant lequel Gérald Darmanin et Jean-François Carenco prévoient de revenir en Nouvelle Calédonie avant une visite d’Emmanuel Macron. Par la suite, les partenaires auraient cinq mois de travail intense avant l’échéance capitale fixée par le chef de l’Etat, la réforme constitutionnelle prévue début 2024. "On a tous intérêt à trouver un consensus parce que nos institutions ne fonctionnent plus, les Calédoniens ont envie que ça avance, ils ont envie d’avoir des réponses sur leur vie quotidienne, ils ont envie qu’on travaille ensemble… C’est ça la réalité." De la même manière, poursuit-elle, "on ne peut pas continuer à avoir 45 000 personnes qui sont exclues du corps électoral et ne rien faire pour eux en attendant un éventuel consensus. Il y a des élections provinciales l’année prochaine, ces élections ne pourront pas se tenir avec un corps électoral gelé. On sait très bien qu’on ne peut pas avoir un corps électoral complètement réouvert, donc il faut un consensus. Soit on le trouve en se mettant autour de la table, soit on continue à ne pas se parler…et je ne vois pas comment on pourrait parvenir à un consensus."
Sur ce point, source de profondes divisions, Daniel Goa assure qu’un corps électoral ouvert contraindrait les indépendantistes "à réagir", en choisissant alors "un tout autre mode d’expression pour exister et aboutir à notre souveraineté." Et de poursuivre que "plus aucune élection ne se tiendra dans ce pays avec ce nouveau corps electoral ouvert." Concluant, "cette terre ne sera jamais une terre de France." Dans ce contexte, comment croire à une reprise du dialogue ? "Je veux croire que Daniel Goa est un peu isolé" commente Sonia Backès. "Même s’il est président de l’UC et qu’il y a des militants derrière lui, je constate que Gilbert Tuyenon tient, lui, des propos plus modérés. En revanche, Daniel Goa fait clairement un appel à la violence concernant le dégel du corps electoral. Quand il affirme qu’il n’y aura pas d’élections, je ne vois pas comment il va les empêcher en dehors d’actions violentes donc c’est tout simplement insupportable. On sait très bien qu’il va falloir trouver une solution. Soit ils veulent retourner à la violence, ce n'est pas notre cas, soit ils veulent trouver une solution et c’est tous ensemble".