Le bruit de l’explosion du volcan tongien Hunga Tonga Hunga Ha’apei a été entendu à 17h30 ce samedi 15 janvier par des témoins habitant au Mont-Mou ou encore à Nouméa. Soit 1h30 après et à près de 2 000 kilomètres de l’épicentre du phénomène. "Ce volcan est de type andésitique, explique Philipson Bani, volcanologue de l’IRD. Ce type de volcan est riche en silice et ils ont tendance à produire beaucoup d’explosions."
Un phénomène aggravé par sa localisation, au milieu de l’océan. "L’eau se mélange au magma, c’est ce que l’on appelle une éruption phréato-magmatique. L’eau qui interagit avec le magma crée encore plus de gaz."
Résultat, l’onde de choc provoquée par l’explosion du samedi 15 janvier a parcouru la moitié de la terre. "C’est très impressionnant, mais il faut imaginer qu’en 1883, l’onde de l’éruption du Krakatoa en Indonésie avait fait 7 fois le tour de la planète, tempère Philipson Bani. On a l’habitude de dire que c’est l’équivalent de 10 000 bombes atomiques."
On a l’habitude de dire que c’est l’équivalent de 10000 bombes atomiques.
Philipson Bani, volcanologue à l'IRD
Soit un indice d’explosivité volcanique de 6 (sur une échelle qui en compte 8). Le bruit provoqué par le Krakatoa est le plus fort jamais enregistré sur terre. Le Hunga Tonga Hunga Ha’apei est certes moins puissant, mais il a tout de même projeté son nuage de cendres à 19 km de haut, dans une explosion si forte qu’elle a suscité des variations de pression atmosphérique sur tout le globe.
Outre les cendres, le volcan projette du soufre (SO2), qui peut être dangereux pour la santé et l’environnement en retombant sur terre sous forme de pluie acide.
Une éruption majeure il y a 1 000 ans
Entré en éruption modérée 2009, ce volcan avait fait parler de lui pour la dernière fois en 2014 en donnant naissance à une nouvelle île. Mais le Hunga Tonga Hunga Ha’apei semble avoir eu une vie passée mouvementée. "Les études montrent qu’il s’est construit sur une grande caldeira [dépression créée par l’effondrement du sol après une éruption NDLR.] de 4 à 6 kilomètres de diamètre. Cela veut dire que ce volcan a déjà connu des éruptions gigantesques par le passé", précise Philipson Bani. Une éruption massive qui aurait eu lieu il y a 1 000 ans. "Selon les premières études scientifiques qui sont sorties ce dimanche matin, c’est une séquence qui se produit tous les 1000 ans", confirme Jérôme Aucan, directeur du Centre de la Communauté du Pacifique pour les Sciences Océaniques.
Aujourd’hui "l’île née en 2014 a littéralement explosé, ça implique que ce qui se trouvait sous l’île a aussi disparu, et c’est cela qui a provoqué le tsunami", poursuit Jérôme Aucan. Un tsunami qui "a pris tout le monde de court, souligne-t-il. En fait les systèmes d’alerte sont faits pour détecter les tsunamis provoqués par les séismes, les plus fréquents, et pas ceux dus à l’activité volcanique, beaucoup plus rares."
L’île née en 2014 a littéralement explosé, ça implique que ce qui se trouvait sous l’île a aussi disparu, et c’est cela qui a provoqué le tsunami
Jérôme Aucan, CPS
Les alertes ont donc été données par chaque pays au fur et à mesure de la progression de la vague, vague qui a bien touchée la Calédonie comme le confirme Jérôme Aucan : "les marégraphes, ces instruments qui mesurent le niveau de la mer en temps réel indiquent qu’on l’a très bien vu à Lifou, à Ouvéa, à Ouinné, Thio et à Nouméa où il y a eu 10 à 15 centimètres de vibration au niveau de la mer sur quelques minutes."
Si le nuage de cendres ne représente pas de danger pour la Calédonie, il devrait "se diluer dans l’atmosphère dans les jours à venir et donner des couchers de soleil très colorés", indique Jérôme Aucan. Dans les prochains mois, il est également très probable que des pierres ponces, poussées par les courants, arrivent sur les plages.