C’est une pathologie qui s’installe doucement et qui fait peur à ceux qui en sont atteints comme à leur entourage. La maladie d’Alzheimer concerne en Nouvelle-Calédonie entre 2 000 et 2 500 personnes, et autant de familles.
Oublis répétés, changements de comportements, ce sont souvent les proches qui poussent à consulter : "La confrontation à la vieillesse, c’est complexe pour les patients parce que on a la dégradation à la fois du corps et de la pensée, souligne Tatiana Izidoro, psychologue en gérontologie. Certains patients vont réussir à traverser cette étape là avec tout un soutien autour et d’autres patients pour qui ça va être plus complexe et qui vont développer des moyens défensifs au quotidien." Le déni, appelé anosognosie dans sa forme médicale, fait d’ailleurs partie du tableau clinique de la maladie.
Mais ce n’est pas parce que l’on oublie ses clefs ou qu’un mot manque que l’on est forcément atteint d’Alzheimer : "On peut consulter un généraliste, mais de petits oublis peuvent aussi être liés à des moments de fatigue, de stress. La maladie d’Alzheimer nécessite un diagnostic appronfondi et pluridisciplinaire", précise la neurologue Anaé Monta.
Rôle primordial des aidants
Lorsque le diagnostic est posé, la maladie va évoluer lentement, parfois sur une décennie. C’est pour cela que le rôle des aidants est primordial. "Au bout d’un moment, les familles sont éprouvées, note Tatiana Izidoro. Souvent l’aide repose sur les épaules d’une seule personne."
L’unité Alzheimer du CHS Albert-Bousquet propose des séjours de répit qui permettent aux aidants de souffler et qui sont l’occasion de poser des stratégies de communication. "On ne renvoie jamais un patient Alzheimer à un principe brutal de réalité, explique Tatiana Izidoro. Si un patient nous confond avec un proche, on va tenter d’engager le dialogue pour savoir ce qui chez nous lui fait penser à ce proche."
A ce jour, il n’existe pas de traitement pour la maladie d’Alzheimer, les thérapies proposées sont donc axées sur le bien-être, et la stimulation des patients : ateliers théâtre, sollicitation cognitive ou encore " thérapie snoezelen", basée sur une approche multi-sensorielle.
Facteurs de risque
Contrairement aux idées reçues, la maladie d’Alzheimer n’est pas héréditaire dans la grande majorité des cas. Avoir un proche atteint est par contre un facteur de risque, mais au même titre que le diabète, l’hypertension ou le tabac. A contrario, une bonne hygiène de vie et un " haut niveau socio-culturel peuvent aider à se protéger de la maladie, indique le docteur Valérie Albert-Dunais, cheffe du service de gérontologie clinique du CHS. Cela veut dire que si on a fait des études, et même si ce n’est pas le cas, si au cours de sa vie on a eu beaucoup de stimulation intellectuelle, par le travail, la lecture, les relations sociales, ou encore les voyages, hé bien ce sont des facteurs protecteurs des maladies neuro-dégénératives."
Manque de structures
Avec le vieillissement de la population, le nombre de personnes touchées par la maladie augmente. Mais le nombre de structures ne suit pas. La plupart du temps, les malades vivent en famille ou en maison de retraite, le CHS dispose lui seulement de 15 places pour la prise en charge de patients dont le comportement compromet le maintien à domicile ou en institution. Les structures dites " de répit ", permettant aux familles de confier leur proche malade le temps de se reposer font aussi cruellement défaut. Notamment dans le Nord et les Iles. "Tout est à construire", souligne le Dr Valérie Albert-Dunais. Ce manque de structures de proximité est "coûteux financièrement et humainement", estime-t-elle.