Automobilistes, si vous ne faites pas partie des publics prioritaires, mauvaise nouvelle. La plupart des quelque 80 stations-service calédoniennes se trouvent à sec. “C’est la ruée depuis ce matin, de bonne heure, cinq heures et demi - six heures, et là, on n’a plus de gasoil, il est onze heures moins le quart”, a décrivait Corine Delaplane samedi, au micro de NC la 1ère, dans une station située Vallée-des-Colons. Il n’y avait déjà plus d’essence depuis vendredi midi.
Même écho dans le quartier d'à côté : cette station ne peut plus servir d'essence depuis jeudi, et plus de gasoil depuis vendredi. "Là, on est à sec, complet", a résumé Mathew Mathelon, pompiste. "Plus rien."
La quête
Ce week-end encore, beaucoup se sont mis en quête d’une pompe ouverte, quitte à appeler avant de se déplacer. Un vrai défi. Il n’y avait qu’à traverser le Grand Nouméa, par exemple, pour s’en faire une idée : soit les stations ont fermé leurs pompes avec des plots, soit des files s'étiraient devant. “J’ai fait le tour au niveau des baies”, a raconté une conductrice croisée à Nouméa. "J’ai fait quatre ou cinq stations et je n’ai pas trouvé d’essence. On opte pour le covoiturage !”
Annonce d'un "durcissement"
Cet autre se montrait fataliste. "Ben, si j'en trouve, tant mieux. Si je n'en trouve pas, tant pis." “Là, j’ai encore un peu”, a signalé un troisième, qui cherchait à anticiper sur le problème. “C’était pour avoir le plein, pour être tranquille, pour reprendre le boulot lundi.” Jeudi 21, une mobilisation a en effet commencé contre la taxe pour l'équilibre tarifaire, cette mesure destinée à rééquilibrer les comptes de la société Enercal. Y compris devant des dépôts de carburant, dont l'accès a commencé à être filtré. Depuis, un durcissement des blocages à partir de lundi 25 mars a été annoncé.
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Dispositif de réquisition
Un point de situation est effectué de façon régulière entre le haut-commissariat et les pétroliers. "À ce jour, il n’y a plus de carburant sur Nouméa, dans l’ensemble des stations, ou alors, éventuellement, dans des petites stations qui en auraient gardé un petit peu", décrivait à la mi-journée Stéphanie Di Luccio, directrice commerciale de la SSP, la Société de services pétroliers, en évoquant ensuite la Brousse.
"Par contre, il y a du carburant dans les stations qui sont réquisitionnées. Ces stations sont autorisées à servir entre 7 heures et midi uniquement les véhicules autorisés." Une organisation "pas simple du tout à gérer, mais on fait au mieux".
Dialysé ou pompier
Angelo Poli fait partie de ceux qui ont pu faire le plein samedi dans une des stations réquisitionnées. “J’ai besoin d’être dialysé trois fois par semaine, précise-t-il. Si je n’ai pas d’essence pour me déplacer du domicile jusqu’à la dialyse, ça risque de poser problème pour ma santé.” Louis Waishitine, également autorisé, expliquait être pompier volontaire.
Qui est concerné ?
C'est jeudi soir que le haussariat a évoqué ce dispositif destiné à "garantir la continuité du service public sur l’ensemble du territoire". À condition de présenter un justificatif - carte professionnelle, autorisation nominative, certificat médical - avec une pièce d'identité valide. Samedi, ajustement. On est passé de quinze à seize stations réquisitionnées.
Changement aussi dans la liste des concernés :
- les services d’intervention d’urgence et de secours (ordre public, sécurité et justice y compris l'administration pénitentiaire ; incendie et secours ; sauveteurs en mer ; contrôleurs aériens).
- les services sanitaires ou de soins à la personne (activité hospitalière et centre de dialyse ; véhicules sanitaires privés ; soins à domicile ; livraison de produits pharmaceutiques et sanguins ; médecins, infirmiers, sages-femmes ; transport funéraire).
- d'autres services d’urgence (sur les réseaux d'eau, d'électricité, de gaz et de téléphone ; opérateurs pétroliers ; transport en commun public et privé ; maires et adjoints ; journalistes ; bateaux-pilotes).
Pour le reste, le haut-commissariat a appelé "à la responsabilité et au civisme de chacun", invitant les automobilistes "à se rendre dans les stations-service lorsque cela est strictement nécessaire".
Voyez aussi le reportage de Thierry Chapuis