"800 entreprises" sont "totalement détruites, brûlées ou dans l'incapacité de reprendre", a précisé ce mercredi sur Franceinfo David Guyenne, président de la Chambre de commerce et de l'industrie de Nouvelle-Calédonie plus de deux mois après le début des émeutes dans l'archipel. Après les émeutes, 20 000 personnes se sont retrouvées au chômage de façon directe ou indirecte, "ce qui représente 30 % de l'emploi salarié privé". "25 % du PIB de la Nouvelle-Calédonie" a été détruit en deux mois, "c'est absolument catastrophique", s'est-il alarmé.
L'État a accordé une aide exceptionnelle de 150 millions (17,9 milliards cfp) qui s'inscrit dans une enveloppe globale s'élevant à 300 millions d'euros (35,8 milliards cfp) d'aide aux collectivités et entreprises hors celles liées au nickel. "Ça ne suffira pas", a assuré David Guyenne, mais, selon lui, l'État doit soutenir d'abord "le système de protection sociale, le système de chômage de la Nouvelle-Calédonie, pour éviter cet effondrement du tissu social calédonien", a-t-il expliqué. Puis, aider les entreprises par des "subventions".
Quelle est la situation aujourd'hui en Nouvelle-Calédonie ?
C'est une situation assez bizarre parce qu'on ne parle plus trop de la Nouvelle-Calédonie, parce qu'effectivement, il n'y a plus les entreprises brûlées, il n'y a plus les exactions et les barrages très dangereux. Pour autant, l'apparent retour au calme est un faux calme. Il y a encore des endroits en Nouvelle-Calédonie où on ne peut pas se rendre parce que des barrages d'émeutiers sont trop dangereux. Et puis surtout, on est dans une situation où tous les jours, on a un risque d'effondrement du système économique et social calédonien. C'est un moment très difficile, avec beaucoup de flou et très peu de certitudes.
Vous arrivez à vivre à peu près normalement ?
Il ne faut pas qu'on s'habitue à cet état aujourd'hui en Nouvelle-Calédonie. Oui, les Calédoniens sont très résilients. Les Calédoniens comprennent que le retour à l'ordre, par exemple, prend du temps dans des situations très compliquées. Pour autant, dans un territoire de la République, on ne peut pas l'accepter. On comprend que la Nouvelle-Calédonie est un territoire très compliqué, très difficile et qu'il faut prendre des pincettes quand on avance. Mais il va falloir trouver des solutions, sinon c'est l'ensemble de l'économie et le tissu social qui va s'effondrer.
Combien d'entreprises ont été détruites lors des émeutes ?
Aujourd'hui, la situation est stabilisée. On va présenter à la ministre un bilan très lourd. 800 entreprises totalement détruites, brûlées ou dans l'incapacité de reprendre, 20 000 chômeurs directs ou indirects, ce qui représente 30 % de l'emploi salarié privé et 25 % du PIB de la Nouvelle-Calédonie détruits en deux mois. C'est absolument catastrophique. Les entreprises n'ont pas eu le choix que d'avoir recours au chômage partiel ou à des ruptures de contrat parce qu'elles vivent leur survie. Ce qui est inquiétant, c'est que l'ensemble du système économique et social est grippé. On n'arrive pas à mettre de l'huile dans les différents rouages parce qu'il n'y a pas de retour à l'ordre. Les entreprises ne peuvent pas se remettre en état de fonctionner durablement. Les fournisseurs, les clients, rien ne fonctionne normalement. Les acteurs doivent mettre des liquidités dans les rouages de l'économie calédonienne, par exemple les assurances, les banques ou l'État à travers les aides d'urgence. Mais aujourd'hui, l'argent n'arrive pas suffisamment fortement et suffisamment rapidement.
Le secteur du nickel qui a fait prospérer la Nouvelle-Calédonie se porte très mal, car il est concurrencé par l'Asie. Les entreprises du nickel vont vers la faillite ?
Les entreprises du nickel peuvent, à court terme, être de vrais acteurs de la relance parce que les montants du secteur minier sont très vite très importants pour l'exportation du minerai. Avec les problèmes d'accès aux mines, à la ressource pour pouvoir même l'exporter, on sait qu'il y en a peut-être une ou deux usines qui vont sombrer prochainement. En tout cas, une est annoncée dans les semaines qui viennent. Oui, ça va venir assombrir un peu plus le tableau et surtout fragiliser l'ensemble du système économique calédonien.
Le montant des dégâts causés par les émeutes est estimé à 2 milliards d'euros (238,66 milliards cfp) par le gouvernement calédonien. Le gouvernement prévoit une nouvelle aide d'urgence de 150 millions. Où doit aller cet argent ?
Ça ne suffira pas. On est en mode survie, l'État doit intervenir de deux manières. D'abord pour soutenir le système de protection sociale, le système de chômage de la Nouvelle-Calédonie, pour éviter justement cet effondrement du tissu social calédonien. L'État doit aussi intervenir directement auprès des entreprises calédoniennes par des subventions pour que les entreprises survivent. Ce qu'on demande, c'est le temps d'arriver à trouver une solution politique, une solution institutionnelle et un nouveau modèle économique calédonien dans les six prochains mois, il faut que l'État nous aide par des subventions pour éviter que tous les outils qui permettent aujourd'hui un vivre ensemble fragile et un faire ensemble calédonien fragile subsistent
Source : franceinfo
800 entreprises détruites : la situation économique calédonienne "absolument catastrophique"
Un quart du PIB de la Nouvelle-Calédonie a été détruit en l'espace de 2 mois après les émeutes. Sans l'aide de l'Etat, l'archipel ne pourra évidemment pas se relever. Le président de la CCI de Nouvelle-Calédonie lance un cri d'alarme.
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