Demande d'inscription à l'Unesco : les Marquisiens entre manque d'information et inquiétude

Avec le classement à l'Unesco, les Marquises vont rayonner et attirer les visiteurs. Mais il y aura des règles à respecter.
Le dossier de candidature des îles Marquises au patrimoine mondial a été officiellement déposé, le 24 janvier à Paris par notre ministre de la Culture, à la délégation française de l’Unesco. Le dossier est désormais entre les mains du Comité du patrimoine mondial qui a 18 mois pour examiner sa qualité. L’annonce d’une possible inscription devrait intervenir à l’été 2024. Pas de réjouissance parmi la population de Nuku Hiva. Jusqu’à présent silencieuse, elle s'inquiète et demande plus d'information.

L’Unesco est désormais sur toutes les lèvres et contre toute attente, l’aspect positif du classement de l’archipel au patrimoine de l’humanité n’est pas l’élément le plus tangible du discours, bien au contraire.

L’inquiétude de la population est grande.

Il semble que peu de personnes aient assisté aux réunions d’information relatives au classement à l’Unesco et que de ce fait les campagnes d’information menées ces derniers mois n’aient pas pu rassurer les habitants du village principal mais aussi des vallées de la capitale marquisienne.

D'où une forme non pas de refus catégorique, mais d'hésitation voire de réticence. Notamment par rapport aux futurs sites classés à visiter. Que se passera-t-il s'ils se trouvent sur un terrain familial ? "Si l'Unesco prend tout ça, si on ne peut plus travailler sur nos terres, comment on va faire après ? C'est l'Unesco qui va venir nettoyer ? Je ne suis pas d'accord avec l'Unesco", lance Damas TAUPOTINI artisan de Hakaui.

Damas TAUPOTINI artisan de Hakaui est contre le classement à l'Unesco. Il craint de ne plus pouvoir travailler sur les terres familiales si elles sont dans le giron d'un site classé.

Marianne BONNO, habitante de Hatiheu, craint pour les tiki et les pae pae, "moi je ne veux pas qu'on les ramasse ! Est-ce que l'Unesco est là pour protéger ou...il faut bien nous l'expliquer. Il faut aussi que le hakaiki explique bien à la population ce que l'Unesco veut faire".

Expliquer en français et en marquisien

Le manque d'information revient souvent dans la bouche des Marquisiens. Colette TEIKITOHE, secrétaire du comité du tourisme de Nuku Hiva, l'a bien perçu. "Les tournées d'information qu'ils font dans les villages, dans les îles voisines, il faut insister ou prendre quelqu'un qui parle aussi bien en français qu'en marquisien. Tout autour de moi, honnêtement ce n'est que du négatif. Il faut informer sur plusieurs points, c'est peut-être pour ça que beaucoup de gens ne comprennent pas", explique-t-elle.

Informer davantage, en particulier sur les conséquences du classement. "L'équipe de l'Unesco qui est venue, ils ont dit ce qu'ils pensaient et ce qu'ils comptaient faire. Mais après pas de suite : le territoire n'est pas là, les maires pas là non plus", se demande Laurette PAHUATINI, prestataire de service de Hatiheu.

Un aussi beau paysage classé à l'Unesco apportera-t-il plus d'avantages ou de contraintes aux Marquisiens .

Cécile ROCHON, commerçante de Taiohae, fait la comparaison avec les îles Galapagos, classées au patrimoine mondial de l'Unesco. Si là bas le classement a boosté le tourisme, le développement économique et le rayonnement de ces îles, la médaille a son revers à cause des contraintes. Par exemple un projet individuel qui ne rentrerait pas dans le cadre du classement ne peut pas aboutir. "Si j'ai un projet de construire une pension de famille sur mon terrain et qu'en même temps il y a un pae pae, ça ne peut ne pas être validé par l'Unesco", dit-elle.