Démissionnaire du gouvernement, Nicole Bouteau a "le coeur lourd"

« J’ai le coeur lourd ! C’est comme un gâchis ! » Ce sont les mots de Nicole Bouteau qui a démissionné de son poste de ministre du Travail et du Tourisme vendredi dernier. Plus en phase avec le gouvernement, elle pointe son "incohérence et son manque de crédibilité" face à la population.

Un ministre, ça ferme sa gueule ou ça démissionne ! Cette phrase de Jean-Pierre Chevènement, prononcée en février 1983 lors d'un conseil des ministres à l'issue duquel il avait démissionné du gouvernement, aurait pu être reprise par Nicole Bouteau. 

Elle a donc démissionné de son gouvernement vendredi dernier, mais a attendu ce matin pour en donner les raisons lors d'une conférence de presse.

Pilier du gouvernement, ministre du Travail et du Tourisme, largement sollicitée ces deux dernières années à cause de la crise sanitaire et économique, Nicole Bouteau n'a pas apprécié que le président de l'Assemblée de Polynésie et le vice-président du gouvernement soient à contre-courant de la politique gouvernementale.

"Des élus au-dessus des lois"

 

Notamment celle consistant à mettre en avant la vaccination pour tous, et en obligeant, à travers une loi, certaines catégories de personnels à se faire vacciner parce qu'en contact avec d'autres gens. Nicole Bouteau souligne qu'à aucun moment, lors des débats sur cette disposition, "ni le président de l'APF ni le VP ne s'étaient exprimés, ou opposés". Mais, dit la ministre démissionnaire, quelle ne fut pas la surprise du gouvernement, une fois la loi votée, "d'entendre le président de l'Assemblée sur sa radio communale, remettre longuement en cause cette obligation vaccinale !"

"Aujourd'hui, nous avons des élus et des responsables politiques qui sont au-dessus de la loi ! Celle à qui on demande à la population de l'appliquer !", s'agace Nicole Bouteau. "Certes cette loi ne vise pas spécifiquement les élus ou membres du gouvernement, mais c'est une obligation morale. C'est une question de cohérence, quand on met en place une politique publique de santé, pour lutter contre une pandémie sans nom, il n'est pas possible que des responsables politiques puissent avoir une position individuelle, où l'intérêt collectif ne prime pas".

Et de rappeler que "le 21 octobre, lors du conseil politique, le sujet était déjà très chaud au sein de nos instances, le Président Fritch a été ferme en demandant au président de l'APF et au VP de se conformer car c'est une question de cohérence et de crédibilité."

Nicole Bouteau fustige alors le manque d'exemplarité des membres du gouvernement, dont elle même, lors du mariage du vice-président le 5 août "quand le pic épidémique était au plus et que le personnel soignant était mobilisé...nous avons constaté que dans le restaurant, [il n'y avait] aucun respect des mesures barrières...Le lendemain du mariage, c'est le président qui s'est exprimé et non le VP". 

"Pas de compassion pour les familles"

 

Lequel ne l'a fait que le 13 octobre pour dire qu'"il était heureux et que son état biologique était particulier... A aucun moment, un mot de compassion pour toutes les familles endeuillées ou touchées par la pandémie. Juste un mot de sa part : "je ne pouvais pas reporter mon mariage, d'autres l'ont fait", déplore Nicole Bouteau. 

Nicole Bouteau

 

Laquelle enfonce le clou en réitérant que "nous avons des gouvernants qui, finalement, sont au-dessus des lois, au moment le plus dur de la crise et sur une politique publique importante qui est celle de la vaccination". 

Etre d'accord ou "démissionner"

 

Garder l'ex-vice président au gouvernement est pour elle une incohérence, un manque de crédibilité, voire "un pied-de-nez à la population...Pour moi, quand on n'est pas d'accord avec des décisions prises par le gouvernement ou notre majorité, et je pense que le président de l'APF ou le VP sont dans cette situation, dans ces conditions on démissionne ! Et si on ne prend pas ses responsabilités, c'est au chef de parti, ou du gouvernement de les prendre. La fermeté au conseil politique n'a pas été celle qui a été prise au final. Comment peut-on accepter que la fonction de VP lui soit retirée et qu'il puisse continuer à siéger au sein du conseil des ministres en expliquant qu'il ne peut pas se faire vacciner ?" 

 

Pour elle, rester dans ce gouvernement serait cautionner cette situation, elle a ainsi "décidé de démissionner de mes fonctions de ministre du gouvernement...J'ai comme un sentiment de gâchis,...et j'ai aussi le coeur lourd car on ne quitte pas ses fonctions à la légère, loin de là, ...il ne faut pas continuer à s'enfoncer dans nos erreurs", conclut-elle.

C'est la 2e fois dans sa carrière politique que Nicole Bouteau démissionne de ses fonctions de ministre. A l'époque, elle était dans le gouvernement dirigé par Gaston Flosse.

De son côté le président Édouard FRITCH ne commentera pas, ni ne réagira ce jour, à la démission de Nicole BOUTEAU.

Concernant le remaniement ministériel qui découle de cette situation, le président se réserve encore le temps de la réflexion et de la consultation.