"C'est une catastrophe sociale et économique" déplore le Dr Boissin. Et il pèse ses mots. En trente ans, l'endocrinologue et conseiller médical auprès de l’association des diabétiques et obèses de Polynésie, constate que le nombre dialysés est passé de "6 à 650 par an."
Aux yeux du médecin, aucun doute : les habitudes alimentaires actuelles des Polynésiens les mettent gravement en danger. Les produits raffinés les plus populaires ici sont bourrés de sucre, de sel et de gras. À l'image des nouilles instantanées, peu onéreuses et présentes dans quasiment tous les garde-mangers de Tahiti et ses îles. Plus communément appelée "soupe bleue", ce surnom fait référence au petit favori, le paquet bleu, qui contient dix grammes de sel à lui seul, alors que le seuil recommandé s'élève à cinq grammes par jour.
"La situation économique fait que les Polynésiens mangent ce qu'ils peuvent alors qu'avant, leur nourriture venait de la pêche, la chasse, les produits naturels. Maintenant, ils ont davantage de produits raffinés, beaucoup plus dangereux, comme la soupe bleue, le soyou, la sauce huître -ce sont des produits super dangereux, super salés..." s'inquiète le médecin.
Taxer pour changer les habitudes alimentaires ?
Difficile de s'en défaire puisque la majorité des habitants en a dans son placard...alors que faire ? Car dans le même temps, l'économie du Pays aussi en prend un coup. "Dix milliards par an pour les hémodialyses" estime le médecin, alors qu'il "suffirait de taxer beaucoup plus ces produits afin de générer une source de revenus et faire de la prévention."
Il semble néanmoins rassuré par l'intérêt que porte le nouveau Gouvernement à cette cause. Le ministre de la Santé Cédric Mercadal a d'ailleurs fait une halte au stand de dépistage de l'hôpital ce mardi. Il compte présenter, d'ici l'année prochaine, son plan de prévention et de promotion de la santé, conscient de la problématique liée au diabète.
Aujourd'hui, au stand de dépistage du marché de Papeete ouvert jusqu'à 15h30, Dr Boissin a également détecté de l'hypertension artérielle une fois sur deux. "C'est la grande voie vers l'AVC", alerte-t-il. "Ça aussi, c'est une catastrophe !"
La situation se dégrade d'année en année, comme dans l'ensemble des outre-mers, sans le soutien du Pays. "C'est la mairie de Papeete qui a financé cette semaine de dépistage, avec le Rotary Club. Heureusement qu'on a des sponsors !" nous apprend Jean-Louis Boissin. Il conseille de manger moins de pain, de riz, de pâtes et moins de friture et de favoriser la cuisson vapeur, "comme ça, tout le monde sera en bonne santé !"