Le projet d'"accord-cadre", qui n'a pas encore été adopté, autoriserait le déploiement d'équipes de sécurité et de navires chinois dans l'archipel en crise.
Les États-Unis et l'Australie s'inquiètent depuis longtemps de la possibilité que la Chine construise une base navale dans le Pacifique sud, ce qui lui permettrait de projeter sa puissance maritime bien au-delà de ses frontières. Le projet d'accord a provoqué une onde de choc à Canberra, puissance dominante de longue date en Mélanésie.
"Nous nous inquiéterons de toute action qui déstabiliserait la sécurité de notre région", a déclaré le ministère australien des Affaires étrangères dans un communiqué. "Les membres de la famille du Pacifique sont les mieux placés pour répondre aux situations affectant la sécurité régionale du Pacifique."
Anna Powles, experte en sécurité à l'Université Massey, en Nouvelle-Zélande, a déclaré que le projet d'accord était "de large portée" et contenait "plusieurs dispositions ambiguës et potentiellement ambitieuses sur le plan géopolitique".
Il autoriserait la police et l'armée chinoises à se déployer à la demande des Îles Salomon, afin de maintenir "l'ordre social".
Les forces chinoises seraient également autorisées à protéger "la sécurité du personnel chinois" et "les projets majeurs dans les Iles Salomon". Sans accord écrit de l'autre partie, aucun des partenaires ne serait autorisé à révéler les missions publiquement.
Selon Mme Powles, ce projet montre aussi que "la Chine recherche des capacités d'approvisionnement logistique et des actifs matériels situés dans les Iles Salomon" pour les navires en visite.
L'accord ferait écho, à certains égards, à celui déjà conclu avec l'Australie par les Iles Salomon.
Des émeutes ont secoué trois jours durant en novembre dans ce pays de 800 000 habitants. Ces manifestations contre le Premier ministre Manasseh Sogavare trouvaient leurs racines dans la pauvreté, le chômage et les rivalités entre îles.
Mais il était aussi reproché à M. Sogavare de vouloir forger des liens plus étroits avec Pékin après avoir brusquement rompu en 2019 ses liens de longue date avec Taïwan. Les dirigeants de l'île la plus peuplée, Malaita, s'opposent farouchement à cette décision.
Environ 200 membres des forces de maintien de la paix venant d'Australie, des Fidji, de Nouvelle-Zélande et de Papouasie-Nouvelle-Guinée avaient été momentanément déployés dans le pays. La Chine avait annoncé également l'envoi de matériel anti-émeute et de conseillers policiers "sur demande" des Iles Salomon.
Les Etats-Unis ont annoncé mi-février la réouverture de leur ambassade dans les Iles Salomon, au moment où Washington cherche à renforcer sa présence dans la région pour contrer l'expansion de l'influence chinoise.
En début de semaine, le haut-commissaire australien dans le pays, Lachie Strahan, a rencontré M. Sogavare et accepté de prolonger jusqu'en décembre 2023 le mandat de la "Solomons International Assistance Force" déployée lors des émeutes. Ils ont également convenu que l'Australie construirait des projets d'infrastructure et fournirait une aide budgétaire.
L'Australie avait précédemment dirigé une mission d'interposition régionale aux Îles Salomon de 2003 à 2017.