La propriété et sa belle plage de sable blanc valent de l’or. Les propriétaires, la famille Trafton, étaient jusqu’alors opposés à toute vente. En 2013, lorsque le Pays s’était intéressé à ce bien de plus de quatorze mille mètres carrés, ils avaient déjà affiché un refus catégorique, mais n’étaient pas contre une location.
En 2023, après avoir été approchés par un lithuanien, la famille Trafton serait prête à céder. « L’offre du lithuanien était de 893 millions 605 mille francs, pour une superficie de 14 604 m2 » a précisé Yvonnick Raffin, ministre de l’économie et des finances, lors de la session extraordinaire du jeudi 23 février 2023.
Bloquer les négociations
Le Pays use alors de son droit de préemption pour préserver le patrimoine foncier. Selon le prix au mètre carré fixés par la commission du domaine de l’assemblée de la Polynésie, le bien est estimé à plus de 600 millions F.CFP. Ce droit de préemption permet pour l’heure de bloquer les négociations entre les deux parties.
« Je salue la décision du pays de préempter. Mais c’est quand même difficile de préempter à mon avis, à un prix très très élevé que propose le lithuanien. Parce que pour avoir fait flancher la famille Trafton, qui ne voulait vraiment pas vendre…ça veut dire que le prix était vraiment plus qu’intéressant quoi. Il touchait le jackpot avec cette affaire-là. Et donc on ne peut pas laisser faire, parce que ça va avoir des répercussions comme je le disais dans mon intervention au sein de la commission…ça va avoir des répercussions sur le reste des parcelles non encore acquises », explique Luc Faatau, représentant Tapura Huiraatira à l’assemblée de la Polynésie française.
De son côté, la représentante du A Here ia Porinetia Nicole Sanquer s’inquiète, « et je reprends le compte-rendu [de la commission des domaines, ndlr], et c’est Monsieur Luc Faatau qui dit bien ici, il reste encore une grosse propriété au milieu qui appartient aux Maiau, qui ne veulent pas vendre en dessous d’un certain prix. À trente mille francs, la discussion était largement ouverte. Aujourd’hui, ils vont demander le même prix, je pense qu’il faut aller à l’expropriation si l’on veut éviter de payer », souligne-t-elle.
Expropriation ?
User de ce droit pourrait être une action louable, sauf que le gouvernement s’intéresse également à des parcelles avoisinantes, détenues par la famille Maiau. Pour elle, il est hors de question de céder ses parts. L’une de ses membres se dit prête à s’engager dans une procédure judiciaire.
« C’est sûr qu’on va se battre…je n’ai pas l’intention de laisser le Pays nous racheter, nous forcer à le vendre, ou à nous exproprier. Ça c’est sûr, je vais me battre. Il y a déjà eu un premier partage par donation et un autre par testament. Etant donné que nous sommes plusieurs, nous avons engagé une procédure pour refaire un partage, afin que tout le monde puisse obtenir 3 000 m2, et développer une structure hôtelière », affirme Maire Maiau.
Mais le Président Edouard Fritch l'assure : « je n’irai pas jusqu’à l’expropriation, je ne crois pas. Et effectivement, il va rester une grande partie des consorts Maiau qu’il faudra convaincre. »
Maire s’agace et s’inquiète aussi…car sur la parcelle détenue par le pays, près de la plage publique de Haapiti, auraient été enterrés les bungalows de l’ancien club Med. Ils contiendraient de l’amiante. Ceux encore sur site en renferment encore.
Après de multiples interpellations de sa part, l’établissement Grands Projets de Polynésie a effectué des études de sols en 2022. Mais les résultats ne lui jamais été transmis.
« Ils ont enlevé du sable pour l'envoyer je ne sais où dans la nuit. Et on a appris qu’à la place du sable qu’on a retiré, il y a plus de 150 bungalows sur la parcelle, là où je suis maintenant et sur cette plage publique. Bon maintenant, à qui la faute ? Je n'en sais rien moi, on a respiré ça pendant des mois, et au fait, qui a cette responsabilité ? » s'interroge Maire.
En attendant, la propriétaire et sa famille ont pour projet de développer une structure hôtelière. Et si la transaction ou l'expropriation ont finalement lieu, la démarche se fera avec le futur gouvernement.