Le transport maritime mondial grippé, et l'économie polynésienne tousse

Comme beaucoup de chefs d'entreprise, Bruno Bellanger, patron de Plastiserd, a prévu du stock pour que l'activité de sa société continue.
La crise covid et la guerre en Ukraine perturbent fortement le marché international du transport maritime ! Au jeu de l'offre et de la demande, les compagnies maritimes tirent leur épingle du jeu. Pendant ce temps, à Tahiti, les entreprises subissent l'augmentation des coûts. Si cela dure, ça pourrait être un gros problème.

Le transport maritime mondial perturbé, et c'est toute l'économie planétaire qui en subit les conséquences. 

Depuis quelque temps, les entreprises polynésiennes rencontrent de gros retards d'approvisionnement. Résultat, les prix des matériaux et produits ont bondi. Dans le secteur du bâtiment, c'est flagrant. "PVC et autres, on constate des augmentations" qui peuvent atteindre 100% de la matière ce qui peut avoir comme conséquence une hausse de 50% du prix de revient du produit, reconnaît Bruno Bellanger, directeur général de Plastiserd et président du Sipof.

Les deux dernières années ont été chaotiques. La crise sanitaire est passée par là et a quelque peu déréglé le marché. "En 2020, il n'y avait plus aucune demande à cause du confinement quasiment mondial. Après l'économie est repartie mais sans retrouver un équilibre : il y a davantage de demande que d'offre, et les prix flambent", précise Bruno Bellanger.

Anticiper pour continuer

Difficulté supplémentaire, les transporteurs ont du mal à acheminer les produits, donc "ils augmentent leurs prix. Et là des aléas surviennent : confinements ici ou là, des engorgements portuaires dans une zone A ou B...au final tout est déréglé".

A Plastiserd aussi, les coûts de production ont augmenté. En cause : la reprise économique mondiale et les problèmes de transport maritime.

Mais comme les entreprises ont besoin de matières pour continuer à fonctionner, elles sont obligées de payer le prix fort. "Elles subissent les prix de revient des matières, le prix d'achat et du fret, parce que c'est la condition sine qua non pour ne pas arrêter l'activité"Et Bruno Bellanger d'ajouter que "la seule solution pour maintenir l'activité c'est approvisionner nos machines en matières et donc d'anticiper. Gérer c'est anticiper, c'est ce qu'on fait aujourd'hui".

Faire des stocks

Dans un magasin spécialisé dans les activités et les produits nautiques, l'anticipation est également le maître mot. "Toutes les commandes sont passées des mois à l'avance, beaucoup plus en avance qu'auparavant à cause des difficultés à les obtenir", remarque Vincent Baudy, directeur commercial de Tahiti Sport. 

Rareté et coût des matières qui impactent les fabricants fournissant ce magasin, difficulté à trouver des conteneurs pour acheminer les produits commandés, prix du fret qui a été multiplié par 2 ces derniers mois... Résultat, il faut "en moyenne 14 mois", selon Vincent Baudy, pour importer des combinaisons de plongée en néoprène ! Heureusement, ce magasin comme d'autres entreprises ont constitué des stocks.

"La priorité numéro 1 est de satisfaire le client, donc il faut toujours approvisionner les rayons...même si c'est plus cher" pour lui, avoue ce directeur commercial. Car ne rien lui proposer est la pire des choses.

Danger pour la Polynésie

Bruno Bellanger de Plastiserd reste quand même optimiste pour l'avenir. Du moins pour "les prix des matières [qui] devraient se réguler avec l'offre et la demande. Par contre les prix du fret risquent de continuer à être maintenus très haut. Depuis qu'ils ont pris l'habitude, ce n'est pas certain que cela va baisser, ce qui est dangereux pour la Polynésie".

En effet, vu les difficultés d'acheminement, les compagnies maritimes vont privilégier des navires de plus en plus grands pour amortir les coûts. Elles pourraient ainsi "éviter la Polynésie" pas encore équipée pour les accueillir. Dans ce cas, "le futur port d'avitaillement du fenua serait plus Auckland qu'ailleurs."