Législatives 2024 - Moetai Brotherson : "On ne change pas une équipe qui gagne, c'est le choix de la stabilité"

Moetai Brotherson, président de la Polynésie française
Ce dimanche 16 juin, le président du Pays était l'invité du plateau du journal télévisé de Polynésie la 1ère. Moetai Brotherson est revenu sur les candidats Tavini et l'union autonomistes aux Législatives, la démission de Lana Tetuanui, la candidature de James Heaux au RN qui devrait être exclu du Tavini, et le remaniement ministériel...

Cybèle Plichart : Les candidats aux législatives sont connus, le dépôt des candidatures est clos… Mereana Reid-Arbelot, qui vous avait remplacé dans la troisième circonscription, se présente. Vous êtes confiant ?

Moetai Brotherson : "Très confiant et très content surtout parce que depuis l'annonce de nos candidats, c'est la liesse dans nos rangs. Tout est en train d'être organisé, planning, distribution des tâches, tout le monde est sur le pont".

Cybèle Plichart : En 2022, les autonomistes étaient partis divisés, cette fois, ils se sont entendus, est-ce que vos chances diminuent pour autant selon vous ? 

Moetai Brotherson : "C'est le peuple polynésien qui décidera. Moi, je crois que cette union de circonstance qui a tout de même émergé de tractations de marchands de tapis absolument incroyable et qui ont d'ailleurs valu un début de scission dans cette plateforme autonomiste, n'est pour moi pas crédible. Elle [ndlr : Lana Tetuanui] a bien eu raison de s'en aller, je salue son courage de dire que c'est un grand n'importe quoi ce qu'il se passe autour de cette soi-disant union. Encore une fois, c'est le peuple qui décidera, nous, on ne change pas une équipe qui gagne, c'est le choix de la stabilité, la jeunesse devant. On a Tevahitua Bordes qui vient suppléer Steve Chailloux, on a aussi l'expérience avec Vannina Crolas qui vient être suppléante de Mereana Reid, et on a, Rahiti Buchin, quelqu'un de posé et très connu sur Moorea."

Cybèle Plichart : Le Tapura a fait le choix de la jeunesse avec Moerani Frebault

Moetai Brotherson : "C'est très bien. On a montré la voie, ils nous emboîtent le pas. C'est très bien".

Cybèle Plichart : Pour Edouard Fritch, vos députés n’ont pas été à la hauteur, prônant plutôt l’indépendance qu’autre chose au palais Bourbon. Il y a aussi Pascale Haiti qui a déclaré que les députés ont fait "n'importe quoi" à l'Assemblée nationale... Comment vous réagissez ?

Moetai Brotherson : "Je crois que venant d'eux, cela n'a pas tellement d'importance. Excusez-moi mais c'est une déformation patente de la réalité. Il suffit de se rapporter aux interventions de nos députés. J'ai entendu en reo Tahiti Nicole Sanquer dire qu'ils porteraient la voix de l'autonomie à l'Assemblée nationale... Nos députés indépendantistes ne sont pas allés porter uniquement la voix de l'indépendance à l'Assemblée nationale, ils sont allés porter la voix des Polynésiens". 

Cybèle Plichart : Le Rassemblement National est finalement dans la course. James Heaux qui était dans vos rangs et auparavant au Taho’eraa se présente à la députation sous l’étiquette RN. Cela vous étonne ?

Moetai Brotherson : "Non, cela ne m'étonne malheureusement pas. On va certainement prononcer son exclusion du Tavini Huiraatira. On ne peut pas accepter ce genre d'oiseau migrateur. Il a fait son choix, je lui souhaite bon vent aux côtés du Rassemblement National."

Cybèle Plichart : Il y a l’enjeu local, l’autonomie et l’indépendance, il y a votre bilan sur lequel vont jouer les autonomistes mais il y a aussi cet enjeu national : l’extrême droite est aux portes du pouvoir. Est-ce que vous allez en faire un axe de campagne ?

Moetai Brotherson : "Non pas du tout. Nous, nous sommes en Polynésie, nous parlons aux Polynésiens. Pour nous, le Rassemblement Nationale en Polynésie, cela n'existe pas, c'est un épiphénomène. Ce n'est pas là-dessus que nous allons axer notre campagne". 

Cybèle Plichart : Mais, pour les prochaines élections, ce sera important ? 

Moetai Brotherson : "Pour les prochaines élections, ce sera important. La Polynésie comme pour toutes les élections de président de la République pèsera très peu dans la balance. Pour ce qui nous concerne, nous avons aucun point commun avec le Rassemblement National. Nous avons en revanche l'habitude de bien fonctionner dans l'opposition, contrairement à nos collègues autonomistes, qui ne savent fonctionner que quand ils sont dans la majorité. Donc, la question qu'il faut poser est plutôt aux autonomistes : si demain la majorité est le Rassemblement National, deviendrez-vous Rassemblement National ?"

Cybèle Plichart : Est-ce que vous allez travailler avec le Front Populaire, c'est-à-dire l'union de la gauche ?

Moetai Brotherson : "Nous travaillons déjà avec l'union de la gauche. Au dernier sondage, il y a une probabilité que ce soit au contraire l'union de la gauche qui sorte majoritaire de ces Législatives".

Cybèle Plichart : Vous avez procédé à un remaniement ministériel, on s’attendait à de grands bouleversements, finalement seule la vice-présidente a changé. Vous héritez du portefeuille du logement, il vient s’ajouter au tourisme, aux transports aériens, aux affaires internationales... Ça fait beaucoup, est-ce que vous allez pouvoir agir sur tous les fronts, sachant que les attentes sont immenses ?

Moetai Brotherson : "J'ai récupéré trois portefeuilles : le logement, l'aménagement et le foncier. Sur ces trois portefeuilles, j'ai considérablement renforcé mon cabinet. Donc, j'ai des conseillers techniques qui s'occupent de ces dossiers. Je vais me donner six mois, le temps de mener des réformes de fond, puis ensuite se posera éventuellement la question de venir compléter l'équipe par un ou une dixième ministre qui récupérerait ces portefeuilles". 

Cybèle Plichart : Vous rentrez de Paris, vous avez signé le contrat de développement et de transformation, est-ce que l'esprit est le même que le précédent ?

Moetai Brotherson : "L'esprit est un peu différent parce qu'il y a dans ce CDT [nldr : contrat de développement et de transformation] un volet qui se porte sur les Jeux du Pacifique par exemple, il y a aussi cette volonté de verdir le contrat de développement et transformation. Les volumes restent peu ou prou identiques, l'esprit diffère un petit peu. Il nous reste à signer le volet "communes" de ce CDT, normalement ça devait se faire avec l'actuelle ministre déléguée [ndlr : Marie Guévenoux] lors de sa venue pour les Jeux Olympiques, on verra si c'est toujours elle qui sera ministre au soir du 7 juillet ou s'il faudra le signer avec un autre ministre ou avec le Haut-commissaire qui après tout est le représentant de l'État ici".