"C'est en montant dans un ATR que j'ai voulu devenir pilote. Et j'y suis arrivée" ; Mahea a longtemps douté, mais elle peut enfin se le dire : objectif atteint... Ce jeudi 16 mai, elle effectue son quatrième vol au poste qu'elle a toujours rêvé d'exercer, celui de commandant de bord. La première, de la compagnie domestique Air Tahiti. Nous partageons ce trajet avec elle, en partance de Tahiti. Premier atterrissage à Raiatea, son île natale où elle en profite pour vérifier l'état des pneus et l'aspect général de l'avion... Ça fait partie de ses responsabilités désormais.
Trouver la confiance
Après 17 ans de carrière, dont sept chez Air Tahiti, elle accède enfin aux commandes sur le siège de gauche... Gratitude ! "C'est l'aboutissement de tout un travail. Je suis fière pour ma famille, pour mon île, pour ceux qui sont derrière moi à me pousser, les instructeurs, qui eux y ont cru en moi, même avant moi, pour toutes les personnes qui m'écrivent. Je reçois des messages tous les jours... Pour eux, je suis fière" exprime Mahea, émue.
Mère de deux enfants, elle a d'abord appréhendé. Quatre ans qu'elle était éligible au poste, "mais j'ai eu un enfant, il y a quelques années donc j'ai voulu me consacrer à ma famille. Parce-que ça demande beaucoup de travail, se remettre dans les bouquins... Et j'avais besoin de gagner en confiance en moi" admet-elle. Cette année, "j'ai senti que c'était le bon moment".
De la confiance il en faut pour piloter des avions...surtout lorsqu'on est une femme dans un monde d'hommes. Si elle est plutôt préservée du machisme en Polynésie, Mahea a pu avoir un petit aperçu lors "à l'école, où on nous dit 'vous vous êtes trompés d'endroit, les hôtesses ce n'est pas ici', ce genre de choses... Mais ici, non" confie-t-elle. En cabine, ses camarades hôtesses qui l'ont vu évoluer en sont fières : "Elle apporte une touche féminine et brise les stéréotypes dans le métier de pilote, dominé par les hommes. C'est un bel exemple !"
Beaucoup de travail...et de responsabilités
Avec son expérience, elle maîtrise parfaitement ses vols et ses appareils, même les atterrissages en plein mara'amu à Raiatea et Huahine. Son copilote le sait, "elle est au top niveau, depuis les simulateurs !"
Mais ce niveau, Mahea l'a atteint après des milliers d'heures de vol, des formations écrites, orales, en ligne, des tests et plusieurs jours de simulateur. Puis sur le terrain, "ça commence aux opérations, on étudie si le vol est faisable en fonction de la météo, on voit s'il y a un souci sur l'avion" détaille la commandant de bord.
En ce moment, les pilotes doivent aussi s'adapter à la grève des contrôleurs aériens. "Ils ne laissent pas partir beaucoup d'avions en même temps donc il y a un risque de retard. Sur chaque île, ils nous forcent à faire ce qu'on appelle des 'procédures'. On ne nous donne pas l'approche à vue donc c'est plus long. On doit suivre toutes les procédures sur chaque île. Donc on prend le carburant en fonction de l'attente que l'on risque d'avoir" précise Mahea. C'est tout ça, le rôle de commandant de bord, en plus d'être responsable de la sécurité de centaines de passagers.
Sur 60 pilotes de la compagnie, seules onze sont des femmes, et Mahea est l'unique commandant de bord à ce jour. "Les derniers mois, mon conjoint a dû s'occuper des enfants...il n'a pas fait ça pour rien !" lance-t-elle en riant. Plus sérieusement "cela me tient à cœur. Une de mes meilleures amies est copilote chez Air Moana : on a fait toute notre formation ensemble. Et maintenant, je lui souhaite c'est de passer commandant !"