PORTRAIT. Vetea David : la légende du surf polynésien

Vetea David, la légende du surf polynésien
Champion du monde junior en 1986, premier surfeur pro polynésien à avoir intégré le circuit mondial, pionnier du tow-in, Vetea David dit "Poto", est une légende du surf. Il se confie dans le podcast Horizon Teahupo'o.

On le surnomme "Poto", que l'on peut traduire par "petit" en tahitien. Pourtant, Vetea David n'est pas vraiment "poto", mais plutôt de taille moyenne, entre 1m75 et 1m80. "Lorsque j'arrive sur une intervention en tant que pompiers, les gens sont surpris. Ils me disent : 'mais tu es plus grand que moi, pourquoi on t'appelle "poto"?' Je leur dis tous que je suis le grand "poto", raconte-t-il en souriant. "Ca a été un surnom qui m'a été donné par des anciens de mon quartier".

Vetea David a grandi à Punaauia. C'est sa cousine et son petit ami, Ben Florès, qui l'initient au surf. Très vite, le surf devient une passion."Je ne savais pas que j'allais être surfeur  professionnel. Pour moi, c'était une passion. J'allais au surf en autostop. Quand il n'y avait pas de vague à Taapuna, je marchais jusqu'à Sapinus, je faisais des allers retours. Il y a des gens qui s'arrêtaient pour m'emmener. Aujourd'hui encore, ils me disent : 'c'est moi qui me suis arrêté pour t'emmener surfer'."

Naturellement, il se lance dans la compétition. A 13 ans, il part en Australie pour faire le circuit junior professionnel "J'ai été là bas pendant deux mois. Il y avait un très gros niveau là-bas, j'avais un coach sur place, et quand j'ai recommencé à faire les championnats de Tahiti, j'ai bien vu mon évolution".

VETEA DAVID EN 1989

Ses premiers résultats

Les premiers résultats ne tardent pas. Vetea David devient champion de France en 1984, puis champion d'Europe junior en 1985. En 1986, il remporte le titre de champion du monde junior de surf, en Angleterre. Lors de cette compétition, il croise un certain Kelly Slater. A cette époque, l'adversaire à battre s'appelait Nicky Wood. "Son surnom, c'était le fantôme, parce qu'on ne le voyait pas souvent, mais il battait tout le monde...Ce jour-là, la houle est montée. Il y avait des vagues de 2 mètres. Mais c'était mon jour. J'ai les ai battus 5-0". Nicky Wood finit deuxième et Kelly Slater monte sur la troisième marche du podium.

En 1989, il intègre le circuit pro du championnat du monde de surf. Dès sa première année, il se hisse 2ème de la Pipe Master. En 1992 et 1993, il se classe 17ème mondial. Néanmoins, ses résultats ne lui garantissent pas une place dans l'élite mondiale. Il est obligé de participer aux épreuves qualificatives, le WQS (World Qualifying Surf). "Si je perdais, je prenais ma retraite et je ne voulais pas rentrer à la maison, après une carrière de deux ou trois ans. Je voulais encore rester sur le circuit pro". A l'époque, Vetea David peut compter sur l'expérience de son beau-frère, Arsène Harehoe, autre légende du surf polynésien, qui a remporté à plusieurs reprises le titre de champion de France.

Si je perdais, je prenais ma retraite et je ne voulais pas rentrer à la maison après une carrière de deux ou trois ans. Je voulais encore rester sur le circuit pro

Vetea David

Polynésiela1ère

"J'avais le SMIG

En 1992, le Salaire Minimum Interprofessionnel Garanti est fixé à 495,33 FCFP l'heure soit environ 83 000 francs pacifique par mois (Arrêté n° 1190 CM du 29/10/1992). Financièrement, la vie de surfeur pro était dificile. A l'époque, tout l'argent que Vetea David gagne, il le dépense en excédents de bagages. "Je voyageais avec deux paquets de planches de surf. Il y avait au moins 4 à 5 planches dans chaque sac"  se souvient-il."En France, un contrôleur du train m'arrête en me disant que je ne pouvais pas monter dans le train avec mes planches. Je lui demande pourquoi. 'Le Tour de France, t'imagines si tout le monde arrive en vélo ?' J'ai pensé à ma mère...Je lui ai remis un collier de coquillages que ma mère m'avait donné. J'ai aussi pris une photo avec une vahine à moitié nue, en train de boire un coco"

Je lui ai expliqué, si je ne prends pas le train, je ne peux pas avoir ma correspondance et ma carrière est terminée. Il y avait beaucoup de pression. J'étais toujours sous pression.

Vetea David

Horizon Teahupo'o - Polynésiela1ère

En 1997, il décide de se retirer du circuit professionnel.  "'J'en pouvais plus de faire toujours la même chose tous les ans, je voulais faire un break. Je me suis basé sur Tom Curren et Marc Occhilupo, qui, à l'époque avaient fait un break. Ils sont revenus, ils ont gagné le titre. Je me suis dit : 'je vais faire ça'. Mais au retour, je n'avais plus de point. Il fallait que je recommence depuis la 200ème place. Je ne voulais pas revivre les petites vagues et tout ça."  

Un pionnier du tow-in

Vetea David se lance alors dans le free surf, pendant plusieurs années. Il est sponsorisé par une marque allemande de vêtements. A la fin des années 1990, il est l'un des premiers surfeurs à se lancer dans le tow-in aux côtés de Laird Hamilton. "Je les ai accompagnés en zodiac à Sunset. Au départ, je voulais juste rester dans le zodiac. Lorsqu'on a pris la première vague, ils m'ont dit : 'regarde derrière !'. Quand j'ai vu cette vague, c'est de là qu'est venue cette passion". La légende du surf reste un surfeur de grosses vagues accompli. En 2020, il fait partie des nominés pour XXL Biggest Wave Awards, aux côtés de Raimana Van Bastolaer, Nainoa David, Matahi Drollet, Kevin Bourez et Ariihoe Tefaafana. 

Au début des années 2000, il est, dès le début, membre de la Water Patrol de Teahupoo avec Arsène Harehoe. Cette patrouille intervient à chaque compétition pour assurer la sécurité sur le spot. "A l'époque, Billabong faisait la compétition à Teahupo. Ils nous ont emmenés à Mavericks aux Etats-Unis ou en Australie, pour être formés auprès de Brian Keaulana, le père du sauvetage à Hawaii".

Hitivai, 19 ans, se souviendra toujours de ce jour où Vetea David est venu le sauver de la noyade.

 

En 2007, Vetea David endosse une nouvelle casquette puisqu'il devient pompier à Punaauia. Sauver des vies devient son sacerdoce. En 2022, il sauve de la noyade un jeune homme de 19 ans qui a failli se noyer. "Malheureusement, ce n'est pas le premier et ce ne sera pas le dernier". Pour cette légende du surf, il est impératif de confier la sécurité en mer à de vrais professionnels. "Entre les courses de pirogues, les compétitions de surf, les sports aquatiques, tu vois des gens qui veulent juste être dédommagés pour leur essence (...). Le Faaati Moorea, il y a eu un mort. Ils prennent des gens qui ne sont pas qualifiés. Il faudrait une structure dédiée au sauvetage en mer."

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