Tarita Teriipaia, en toute intimité

Tarita Teriipaia, dans son jardin à Punaauia.
Actrice dans les Révoltés du Bounty, compagne de Marlon Brando, auteure de ses mémoires “Marlon : mon amour, ma déchirure”, Tarita Teriipaia est devenue une figure Polynésienne incontournable. Récemment, son livre a inspiré le spectacle des collégiens de Bora-Bora au Heiva Taure’a. Tarita y a assisté, émue…Nous l’avons rencontrée quelques jours après, dans sa maison de Punaauia.

Tarita Teriipaia a 82 ans aujourd'hui. Elle nous accueille chaleureusement dans sa maison de Punaauia, où elle a élevé ses enfants. Teihotu, Maimiti et Tuki, le fils de Cheyenne, ont quitté la maison pour construire leur vie. Seul le fils de Maimiti, Maui, vit encore avec sa grand-mère.

Le spectacle des collégiens de Bora-Bora, son île natale, a réveillé des souvenirs douloureux, notamment le décès tragique de Cheyenne Brando, deuxième enfant de Tarita et Marlon. À la fin de la soirée, tout le monde pleurait. J’avais les larmes aux yeux !” Avec ses enfants et son fidèle ami Alberto, Tarita redécouvre son histoire contée au Heiva Taure'a, le 10 mars dernier.

Photo de Tarita encadrée chez elle, prise par la MGM à l'époque.

L'ancienne actrice n’apprécie pas particulièrement le fait d'être exposée, mais le projet des collégiens l’a convaincue. “Pour les enfants, je ferais tout. Et c’était bien, vraiment magnifique de voir ces enfants danser, chanter…” Le groupe ne remporte par le premier prix mais l’émotion est là. “Ce soir-là, j’étais avec Alberto, une ancienne travailleuse de Tetiaroa, ma fille Maimiti et ma fille adoptive, Raiatua” décrit Tarita. 

Tourmentés par le passé

Cheyenne s’est donnée la mort en 1995, à seulement 25 ans, dans la maison familiale à Punaauia. Elle était atteinte de plusieurs troubles, avait fait plusieurs séjours en psychiatrie et n’a pas supporté la disparition de son compagnon, Dag Drollet, lequel aurait été assassiné par le demi-frère de Cheyenne, Christian Brando. 

Cheyenne se faisait battre. Elle rentrait avec des bleus, je ne supportais pas…Puis un jour alors que nous étions à Los Angeles chez Marlon, elle s’est confiée à Christian. Il avait la haine…” dévoile Tarita. 

Pour cette mère de famille, Dag a eu une mauvaise influence sur sa fille et c’est la drogue -qu’elle a commencé à prendre avec lui- qui a provoqué ses troubles du comportement. “C’était une gentille fille, elle avait de bonnes notes et elle s’occupait bien de ses petites sœurs” se souvient Tarita.

Photos de famille encadrées chez Tarita. On y voit Cheyenne, Tuki, Teihotu, Maui, Maimiti, Marlon et Tarita.

Famille brisée

Maimiti, la dernière fille de Tarita née d’une autre union, garde aussi des souvenirs heureux de sa grande sœur. 

J’adorais les raisins secs et une fois, Cheyenne s’est amusée à en mélanger avec des crottes de lézards !” raconte Maimiti, en riant. Nous échangeons un court instant avec elle, dans le jardin de la maison de Punaauia. Elle rend visite à sa mère de temps en temps mais ne reste jamais bien longtemps. Avant, la maison rayonnait. Mais depuis que Cheyenne est partie, l'atmosphère est lourde ici. (...) C’était ma confidente. Souvent, je pense à elle.” nous livre Maimiti, les larmes aux yeux.

Elle a quitté la maison de Punaauia à 15 ans, pour habiter chez son compagnon de l’époque, au moment où sa sœur commençait à devenir agressive et instable.

Marlon Brandon et Tarita Teriipaia jeunes, sur le tournage de Révoltés du Bounty.

Le spectacle des collégiens a fait ressurgir beaucoup de tristesse. “Quand tu es jeune, la vie est devant toi mais quand tu vois ce qui s’est passé au final, ça fait mal” regrette Tarita. Son amour pour Marlon Brando a apporté beaucoup de malheur à sa famille.

Prise au piège

L'acteur avait d'innombrables maîtresses et ne s'en cachait pas. Il s'amusait à rendre jalouse Tarita mais ne supportait pas qu'elle voit d'autres hommes que lui. Un jour, alors qu'elle avait refait sa vie, Marlon a débarqué à Tahiti "pour me tabasser à mort. Mais je n'avais pas peur !" relate Tarita. Il pouvait se montrer très aimant avec les enfants comme les ignorer du jour au lendemain. Ce comportement les a d'ailleurs beaucoup affectés. 

C’est quelqu’un de cruel. Il n’a jamais porté les enfants dans ses bras. Il manipule tout le monde. C’est un jeu pour lui. Tu n’imagines pas le nombre de femmes qui m’ont envoyé des lettres, pour dire qu’elles s’étaient retrouvées à la porte une fois enceintes. Il est comme ça, étrange, malade. (...) Il se servait souvent des enfants pour m’avoir. (...) C’est ma patience et mon calme qui m’ont donné la force, même si j’avais le feu au fond de moi”, se remémore Tarita.

Cinquante années de vie "commune" avec Marlon se sont écoulées même si, pour Tarita, l'amour avait déjà disparu à la naissance de leur premier enfant, qu'il avait tant désiré au départ, puis rejeté et finalement reconnu, des années plus tard. 

Un jour, alors que Marlon l'avait viré de son poste à l'hôtel de Tetiaroa puis demandé d'y travailler à nouveau, et ce pour la quatrième fois, Tarita a refusé. "Il avait l'habitude d'avoir tout le monde a ses pieds. Cette fois, c'était non. Eh bien tu sais quoi ? Il a pleuré !" dit Tarita. Elle a donc fini, comme toujours, par acquiescer... Mais pourquoi cédait-elle perpétuellement à ses caprices ? "Je lui étais redevable, pour tout ce qu'il a fait, payé, tous les voyages..." Et Marlon reste malgré tout, le père de ses enfants. Elle est restée auprès de lui, sur son lit de mort ; "À la fin, j'avais pitié."

Au cours de la discussion, Maui commente sur un ton de reproche : “de toute façon, cette famille est maudite.

L'ancienne actrice vit désormais sur la parcelle de terrain qui lui appartient à Punaauia, dans une maison qu'elle a fait construire à quelques mètres de celle de Marlon. Sa petite retraite de Tetiaroa paie les charges quotidiennes. Très casanière, elle profite pleinement de ses enfants, de son jardin, adore les plantes, la couture et s'occupe de ses nombreux compagnons à quatre pattes.

Aujourd'hui, Tarita est soulagée : “depuis que Marlon est mort, je suis enfin tranquille. Tout ce que je cherchais, je le vis maintenant : la paix.” Elle a dû accepter ce passé éprouvant pour aller de l'avant.