A L'Entre-Deux, des sexagénaires s'initient à la lecture à la l'écriture : "Avant mi gagnais pas écrire mon nom"

A L'Entre-Deux, des sexagénaires s'initient à la lecture à la l'écriture grâce à une association
A l'occasion de la 10ème édition des Journées nationales d'action contre l'Illettrisme, gros plan sur le travail réalisé par l'association Lire Dire Ecrire à L'Entre-Deux. Là-bas, des sexagénaires qui n'ont jamais eu la chance d'être scolarisées ont l'opportunité de se rattraper grâce aux ateliers d'alphabétisation.

Assise face à leur "professeur", Marie Danielle, Marie Claude et Marie Denise manipulent tour à tour stylo, dominos et billets de Monopoly. Pour la première fois de leur vie, ces sexagénaires apprennent à lire, à écrire et à compter car elles n'ont jamais eu la possibilité, plus jeunes, de prendre le chemin de l'école.

"Comme j'habitais à Dimitile, je n'ai jamais pu partir à l'école. Et puis, il fallait travailler pour pouvoir vivre", lance Marie Denise Dijoux sans détour. A défaut d'apprendre à compter, la grand-mère dit avoir appris à "gratter la terre, à couper les géraniums et à fouiller les patates !"

Regardez le reportage de Réunion La 1ère :

A L'Entre-Deux, des sexagénaires apprennent à lire, écrire et compter avec l'aide d'une association

"Remplir mes papiers sans demander d'aide à personne"

Elles ne lâchent pas leur sourire, mais ces drôles de dames ont connu une existence à la dure. Et aujourd’hui, elles veulent s’en sortir et devenir véritablement autonomes. Alors chaque mercredi, les trois grand-mères se rendent dans les locaux de l'association Lire Dire Ecrire, à L'Entre-Deux, avec une soif d'apprendre qui force le respect.

"Il y a des choses avant que mi gagnais pas faire, mais maintenant mi gagne écrire et c'est un plaisir pou moin. Mi voudrais lire et remplir mes papiers moin même sans demande d'aide domoun", indique Marie Danielle Payet. 

Une demi-douzaine de personnes accompagnées

L’apprentissage n’est pas toujours aisé mais la volonté de réussir de ces sexagénires est plus forte. Marie-Claude Payet a dû, elle, s’occuper de ses dix enfants. Des enfants qui ont tous leur baccalauréat, tient-elle à souligner. "A moin ma la poin de Bac, ma la point rien moin ! Même pas un bac l'eau", ironise-t-elle.

"Maintenant mi lé mieux dans ma tête. Parce qu'avant, mi gagnais pas écrire mon nom, mi connaissais pas ma date de naissance", souligne-t-elle en se retenant de pleurer... A l’association Lire Dire Ecrire, ce sont une demi-douzaine de personnes au total qui ont pris cette décision de sortir de l’illettrisme.

Des mises en situation pratiques

Pour Cellia Grondin, leur encadrante, les ateliers et séances d'apprentissage sont préparés selon leurs desiderata. "On s'adapte en fonction de ce qu'ils ont besoin d'apprendre dans la vie de tous les jours. Par exemple, apprendre à compter pour aller à la boutique ou encore apprendre à écrire et remplire leurs papiers tous seuls", explique cette dernière.

D'autres actions sont entreprises dans d'autres communes et notamment à Saint-Denis, dans le quartier du Bas de la Rivière où le Pôle d'intégration, un espace à vocation sociale, vient en aide aux personnes concernées en leur proposant des ateliers d’apprentissage.

23% de la population réunionnaise en situation d'illettrisme

A La Réunion, 23% de la population est en situation d'illettrisme selon les chiffres de l'Insee. Ces chiffres datent de 2011 mais une nouvelle étude est en cours et les résultats devraient être connues d'ici le début de l'année 2024, indique Olivier Hugard, le coordinateur régional à La Réunion de l'agence nationale de lutte contre l'illettrisme.

Revoir l'interview d'Olivier Hugard sur Réunion La 1ère :

Lutte contre l'illettrisme : itw d'Olivier Hugar