À La Réunion, la consommation d'oignons est de 8 000 tonnes environ par an, mais la production locale de "zonion péi" s'élève seulement à 1 000 tonnes. La filière locale n'est pas suffisante, d’autant plus que l’Inde a annoncé arrêter l’exportation de cet ingrédient phare de la cuisine traditionnelle réunionnaise.
Regardez le reportage de Réunion La 1ère :
La Chambre verte réclame des formations pour les agriculteurs
La Chambre d'agriculture s’est réunie ce mercredi 17 avril, à Saint-Paul. Elle tire la sonnette d'alarme sur cette filière "fragile et sensible", qui nécessite pour Frédéric Vienne, président de la Chambre verte, bien plus qu'un simple accompagnement.
Ce dernier réclame la mise en place de formations, notamment pour tenter de redynamiser la culture d'oignons à La Réunion.
Aujourd’hui, le Département accompagne les producteurs d’oignons indépendants à hauteur de 6 000 euros pour 8 tonnes de production. Le problème n’est pas que financier, on n’a plus d’outils pour produire. On n'a pas suffisamment de soutien pour que la culture d'oignons fonctionne correctement.
Frédéric Vienne, président de la Chambre d'agriculture
Le prix des oignons explose
Après le prix exorbitant des tomates sur les étals, ce sont le prix des oignons qui font grincer les dents des consommateurs.
Si le prix du kilo d'oignons varie entre 4,90 euros et 8 euros, voire plus selon les endroits, la Chambre verte pointe du doigt les "réseaux de distributeurs". Autrement dit, les importateurs.
La question des prix revient aux réseaux de distributeurs. Malheureusement, cette situation va perdurer encore (jusqu'à octobre 2024 - NDLR). Donc, il faudra trouver d’autres pays fournisseurs d’oignons, mais il faut des oignons qui correspondent à notre cuisine locale. Et ça, c’est compliqué.
Frédéric Vienne, président de la Chambre d’agriculture
Une culture plus dynamique dans les années 1980
Dans les années 1980, "la culture d'oignons était bien plus florissante à La Réunion", souligne Frédéric Vienne.
En 30/40 ans, on a tout perdu. On a perdu notre savoir-faire en partie, car la génération des producteurs d’oignons des années 1980 n’est plus active. Les jeunes n’ont pas d’affinité avec cette culture. Un agriculteur fait souvent une culture par affinité avec celle-ci. Et s’il l’a pas, on ne va pas improviser. Donc, aujourd’hui, on a des problèmes.
Frédéric Vienne, président de la Chambre d'agriculture
Zonion péi, une culture "pénible"
La filière locale d'oignons est une filière "pénible", car elle demande "énormément de manipulations humaines", affirme Frédéric Vienne.
"Le désherbage sélectif qui existait à l’époque, dans les années 1980, n’existe plus. Le manque de main d'œuvre est criant sur les exploitations, car c’est une culture très sensible aux aléas climatiques", précise le président de la Chambre verte.
On a le semis, l’arrosage, l’arrachage, le nettoyage, le désherbage, la mise en sacs aussi qui est très peu mécanisée à La Réunion. Donc, ça ne suscite pas des vocations nouvelles.
Frédéric Vienne, président de la Chambre verte
Une culture de zonion péi peu mécanisée
La culture de zonion péi est principalement manuelle à La Réunion. Elle est également saisonnière. En effet, les agriculteurs attendent le pic de production pour les mois de septembre et octobre.
Si les agriculteurs espèrent que la culture de zonion se mécanise au fil des années, certains sont découragés quand ils réalisent le travail et les efforts que cela demande.
Actuellement, on est en début de plantation pour cette année. La grosse difficulté qu’on rencontre c’est toute la partie préparation du terrain. On est sur une zone où au niveau du climat on est gâté, mais au niveau du travail du sol, c’est assez compliqué. Le fait qu’on rencontre tellement de contraintes, ça nous décourage. Avec mon collègue, c’est la troisième année qu’on cultive des zonion péi, mais si on fait les comptes, on se dit qu’il vaut mieux arrêter.
Mickaël Ethève, agriculteur à la Saline-les-Bains
Mais les agriculteurs gardent tout de même espoir. "Ce qui m’a attiré dans la culture de l’oignon, c’est que je pensais que c’était une culture vite mécanisable, alors que c’est très très compliqué. On espère qu’on arrivera à mécaniser la production au plus vite", confie l'agriculteur qui attends d'ores et déjà que les collectivités se mobilisent davantage pour redynamiser la filière locale.
Des rendements moindres
En termes de rendements, les variétés d'oignons "Véronique" et la "rose de bourbon" n'atteignent pas les quotas prévu.
On n’a pas de rendement comme on le voudrait. On n’est même pas sur la moitié de ce qui a été annoncée. L’année dernière, sur la “Véronique” on a fait 8 tonnes alors qu’on devait en avoir 15. Pour la “rose bourbon” on est à 20 tonnes hectares, alors qu’on devait en avoir 45 tonnes.
Mickaël Ethève, agriculteur à la Saline-les-Bains
Pas de concurrence...
Même si ce problème date de plusieurs années déjà, les agriculteurs déplorent le fait qu'ils ne peuvent pas concurrencer les oignons d'importation, qui, eux aussi, se font rares.
"On n'a pas les moyens de concurrencer un oignon qui vient du Pakistan ou d’Inde. La main d'oeuvre est beaucoup moins chère, on n'a pas les mêmes coûts de production. Tout ça, ça fait qu'on n'est pas avantagé. Avec la crise actuelle, ça va être la chasse aux pays producteurs pour les importations", explique le président de la Chambre verte.
Plusieurs filières locales en péril
Il faudra attendre la saison des zonion péi pour les voir sur les étals du marché. "En général, c'est aux alentours des mois de septembre ou octobre le pic de production", souligne Frédéric Vienne, le président de la Chambre verte.
Avec la filière locale, "il faut penser à imaginer l’avenir de l’oignon à La Réunion, mais aussi à l’avenir de la carotte, de la pomme de terre et de l’ail", conclut le président de la Chambre verte qui attend de pied ferme que des mesures soient prochainement prises.