Une publication qui intervient à la veille de l’arrivée de la Première ministre à La Réunion, pour une visite officielle de trois jours. La Fondation Abbé Pierre attire l’attention sur l’urgence sociale à laquelle la population réunionnaise doit faire face, particulièrement les femmes réunionnaises. Inflation, logement, la vie coûte chère et plonge de nombreux ménages dans la pauvreté.
Regardez le reportage de Réunion La 1ère :
Les ménages éprouvent de plus en plus de difficultés à se nourrir, se loger, se soigner et se déplacer, constate la Fondation Abbé Pierre à La Réunion. Le logement, dépense contrainte et essentielle dans le budget de consommation, dont le coût subit une hausse continue, est un poste de dépense majeur des ménages.
Face à l’urgence sociale, la Fondation Abbé Pierre rappelle qu’il est impératif d’agir pour mettre à l’abri toute personne. Une vision stratégique et une volonté politique portées par les pouvoirs publics locaux est indispensable pour y parvenir, insiste Mathieu Hoarau, le président de la Fondation Abbé Pierre à La Réunion.
Une inflation inédite à La Réunion
L’année 2022 a été marquée par une inflation inédite et jamais égalée depuis plus de 30 ans, alerte la Fondation Abbé Pierre dans sa synthèse régionale pour La Réunion, parue ce mercredi 10 mai. Cette inflation, évaluée à près de 3,9% dans le département, vient aggraver les inégalités face au pouvoir d’achat auxquelles sont confrontés les Réunionnais. Dans l’ile, le niveau de vie médian est inférieur de 35% à celui de l’Hexagone et l’écart des prix entre La Réunion et l’Hexagone atteignait déjà 7,1% en 2015.
En 2017 déjà, 38% des ménages pauvres déclaraient avoir des difficultés à boucler les fins de mois et 10% ne pas pouvoir y arriver sans faire de dettes.
36% de la population est pauvre
A La Réunion, 311 900 personnes sont pauvres, soit 36% de la population. Le taux de pauvreté dans l’île diminue chaque année, mais il reste deux fois plus élevé que la moyenne française, à 14%, souligne la Fondation Abbé Pierre. Dans les quartiers prioritaires de la politique de la vielle et en milieu rural, 1 réunionnais sur 2 est touché par la pauvreté.
Un Réunionnais sur 4 est allocataire des minimas sociaux, 36% de la population active est au chômage, soit 2,3 fois plus qu’en métropole, et près de 41 000 jeunes ne sont ni en emploi, ni en études, ni en formation.
4 Réunionnais sur 10 impactés par la crise du logement
Le nombre de demandeurs de logements sociaux ne cesse d’augmenter dans le département, pour atteindre 39 263 fin 2022. Seuls 2 300 logements sociaux sont en moyenne financés chaque année, depuis 2017, contre 4 000 entre 2011 et 2014.
En 2021, les 2/3 des communes concernées par la loi SRU présentaient un déficit en logements sociaux. Enfin, les logements financés ne correspondent pas aux profils des demandeurs. Des difficultés relayées par la Confédération Nationale du Logement à La Réunion, qui demande que l’habitat soit reconnu comme grande cause départementale.
A La Réunion, on estime que plus de 140 000 personnes souffrent du mal-logement ou d’absence de logement personnel. 75 000 personnes vivraient dans des conditions de logement très difficiles du point de vue du confort, 34 000 personnes vivraient en situation de surpeuplement dit "accentué", et sur près de 30 000 personnes dépourvues de logement personnel, 1 000 seraient à la rue.
Mais plus généralement, la Fondation Abbé Pierre estime que près de 200 000 personnes seraient fragilisées par rapport au logement, soit 4 Réunionnais sur 10. Conséquence de l’évolution à la hausse des coûts du logement, les Réunionnais sont encore trop nombreux à éprouver des difficultés pour se maintenir dans leur logement, indique la Fondation Abbé Pierre.
Les politiques sociales n’apportent pas de réponse adaptée
Le nombre de personnes accueillies dans les accueils de jour a presque doublé, passant de 991 personnes en 2019 à 1 845 en 2022. Pour la Fondation cela traduit le délitement des solidarités familiales et amicales, " dernier filet de sécurité lorsque les politiques sociales n’ont pas permis d’apporter une réponse adaptée ".
Les demandes de mise à l’abri au 115 sont passées de 34 334 en 2020 à 48 565 en 2022, avec désormais des familles avec enfants qui n’ont pas obtenu de place d’hébergement. Une première depuis de nombreuses années à La Réunion, souligne l’ONG. Elle constate que le droit à l’hébergement inconditionnel pour les personnes en situation de détresse n’a pas été respecté à La Réunion ces derniers mois, et à plusieurs reprises.
Les femmes réunionnaises, un public précaire et fragilisé
La Fondation Abbé Pierre a souhaité, cette année, mettre en lumière la situation des femmes, plus exposées à la précarité économique et sociale. A La Réunion, 98% des familles monoparentales sont des femmes. 1 femme sur 4 âgée de 25 à 54 ans est cheffe de famille monoparentale, contre seulement 4% des hommes. 1 demande d’hébergement d’urgence sur 3 au 115 concerne des femmes seules avec enfants en 2021.
Les Réunionnaises sont plus éloignées de l’emploi ou exposées à des emplois précaires et peu rémunérateurs. Seules 42% des femmes en âge de travailler occupent un emploi en 2017, et 28% des femmes travaillent à temps partiel.
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